Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 2 janvier 2020, le garde des sceaux, ministre de la justice, demande à la cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande de M. A... C....
Il soutient que c'est à tort que le tribunal a annulé la décision contestée au motif qu'elle a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière du fait de l'absence de l'assesseur extérieur lors de la commission de discipline, dès lors que, l'assesseur extérieur disposant d'une voix consultative, sa présence ne constitue pas une formalité substantielle, que l'administration n'est tenue que d'une obligation de moyen et qu'elle était dans l'impossibilité de convoquer d'autres assesseurs ou de reporter la commission ; le fait que l'assesseur extérieur convoqué ne s'est pas présenté ne lui est pas imputable ; le tribunal a mis à sa charge une obligation de résultat ; M. A... C... n'a en tout état de cause pas été privé d'une garantie dès lors qu'il a reconnu les faits.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de procédure pénale ;
- les décrets n° 2020-1404 et n° 2020-1405 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B... ,
- et les conclusions de M. Met, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... C..., incarcéré à la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis du 26 mars 2015 au 23 décembre 2016, date de sa libération, a comparu le 12 juillet 2016 devant la commission de discipline pour des faits commis le 7 avril 2016, qualifiés de tapage de nature à troubler l'ordre de l'établissement et de refus d'obtempérer. Le président de la commission de discipline lui a infligé la sanction de placement en cellule disciplinaire d'une durée de quatorze jours dont sept avec sursis. Le garde des sceaux, ministre de la justice, relève appel du jugement en date du 31 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé la décision implicite du directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris confirmant cette sanction.
2. En vertu de l'article 726 du code de procédure pénale, la commission disciplinaire appelée à connaître des fautes commises par les personnes détenues placées en détention provisoire ou exécutant une peine privative de liberté doit comprendre au moins un membre extérieur à l'administration pénitentiaire. Aux termes de l'article R. 57-7-6 du même code : " La commission de discipline comprend, outre le chef d'établissement ou son délégataire, président, deux membres assesseurs ". Aux termes de l'article R. 57-7-7 du même code : " Les sanctions disciplinaires sont prononcées, en commission, par le président de la commission de discipline. Les membres assesseurs ont voix consultative ". L'article R. 57-7-8 du même code dispose que : " Le président de la commission de discipline désigne les membres assesseurs./ Le premier assesseur est choisi parmi les membres du premier ou du deuxième grade du corps d'encadrement et d'application du personnel de surveillance de l'établissement./ Le second assesseur est choisi parmi des personnes extérieures à l'administration pénitentiaire qui manifestent un intérêt pour les questions relatives au fonctionnement des établissements pénitentiaires, habilitées à cette fin par le président du tribunal de grande instance territorialement compétent. La liste de ces personnes est tenue au greffe du tribunal de grande instance ". Enfin, aux termes de l'article R. 57-7-12 du même code : " Il est dressé par le chef d'établissement un tableau de roulement désignant pour une période déterminée les assesseurs extérieurs appelés à siéger à la commission de discipline ".
3. Il résulte de ces dispositions que la présence dans la commission de discipline d'un assesseur choisi parmi des personnes extérieures à l'administration pénitentiaire, alors même qu'il ne dispose que d'une voix consultative, constitue une garantie reconnue au détenu, dont la privation est de nature à vicier la procédure, alors même que la décision du directeur interrégional des services pénitentiaires, prise sur le recours administratif préalable obligatoire exercé par le détenu, se substitue à celle du président de la commission de discipline.
4. Il appartient à l'administration pénitentiaire de mettre en oeuvre tous les moyens à sa disposition pour s'assurer de la présence effective de cet assesseur, en vérifiant notamment en temps utile la disponibilité effective des personnes figurant sur le tableau de roulement prévu à l'article R. 57-7-12. Si, malgré ses diligences, aucun assesseur extérieur n'est en mesure de siéger, la tenue de la commission de discipline doit être reportée à une date ultérieure, à moins qu'un tel report compromette manifestement le bon exercice du pouvoir disciplinaire.
5. Il ressort des pièces du dossier que, pour assister à la commission de discipline du mardi 12 juillet 2016, l'administration pénitentiaire a contacté un assesseur extérieur habilité par la cour d'appel de Paris, par courriel, le vendredi 8 juillet 2016, sans que le serveur de destination n'ait envoyé de notification de remise. Cet assesseur ne s'étant pas manifesté, il appartenait à l'administration de chercher à le contacter pour s'assurer de sa disponibilité, de faire éventuellement appel à une autre personne habilitée à cette fin ou de reporter au besoin la réunion de la commission de discipline à une date ultérieure. En l'espèce, l'administration n'a pas pris l'attache de l'assesseur pressenti, ni tenté de solliciter un autre assesseur habilité. En outre, elle n'établit pas, ni même n'allègue, que la tenue de la commission de discipline ne pouvait être reportée, alors que les faits reprochés avaient été commis trois mois auparavant. Dans ces circonstances, l'administration ne justifie pas avoir mis en oeuvre tous les moyens à sa disposition pour s'assurer de la présence effective de l'assesseur extérieur dans la commission de discipline. Il s'ensuit que M. A... C... a été privé d'une garantie et que la sanction qui lui a été infligée doit, par conséquent, être annulée.
6. Il résulte de ce qui précède que le garde des sceaux, ministre de la justice, n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé la décision implicite de rejet du recours préalable formé par M. A... C... contre la sanction qui lui a été infligée le 12 juillet 2016 par le président de la commission de discipline de la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis.
DECIDE :
Article 1er : La requête du garde des sceaux, ministre de la justice, est rejetée.
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N° 20VE0012