Elle soutient que :
- l'administration ne démontre pas que les frais professionnels, exposés notamment dans le cadre de déplacements et de réceptions, pourtant justifiées par des factures et des quittances, ne se rattacheraient pas à une gestion normale ;
- elle ne justifie pas non plus le rejet de la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les factures correspondantes ;
- s'agissant des suppléments d'impôt sur les sociétés, elle était fondée à provisionner la somme de 154 458 euros, correspondant à la moitié de la créance qu'elle détient à l'égard de la mairie de Paris ;
- l'absence de diligences suffisantes s'explique par le coût de la procédure juridictionnelle, l'incertitude de son issue et le souci de préserver sa relation commerciale avec la Ville de Paris, qu'elle entretient depuis 2007.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- Le rapport de M. A...,
- les conclusions de M. Chayvialle, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., pour la SARL COUVERDURE.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL COUVERDURE, qui offre des prestations de service pour l'installation d'équipements sportifs légers en textiles ou gonflables, relève appel du jugement n° 1600974 du 23 janvier 2018, par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la réduction des suppléments d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des exercices et périodes correspondant aux années 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes.
Sur la fin de non-recevoir du ministre de l'action et des comptes publics :
2. Si les conclusions de la SARL COUVERDURE tendant à la décharge des impositions litigieuses sont motivées en ce qui concerne les frais professionnels et la provision pour dépréciation de créance sur la Ville de Paris, ses autres conclusions tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée, à supposer qu'elles soient reprises en appel, ne sont pas assorties de moyens permettant d'en apprécier le bien-fondé. Ainsi, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir du ministre de l'action et des comptes publics, elles ne peuvent qu'être rejetées.
Sur le surplus :
En ce qui concerne les rehaussements d'impôt sur les sociétés :
3. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " (...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. (...) ". Aux termes de l'article 39 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire. / Toutefois les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. Cette disposition s'applique à toutes les rémunérations directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursements de frais. (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice (...) ".
4. Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicable sauf loi contraire, il incombe en principe à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause ainsi que sur l'existence de la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle n'a pas de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.
5. La SARL COUVERDURE a déduit, sur le fondement du 1 de l'article 39 précité du code général des impôts, des dépenses, principalement de voyage, de frais de restaurant et d'hôtel, exposées par son gérant, M. C... D.... Elle fait valoir qu'elle a produit les factures ou notes de restaurant et d'hôtel, ainsi que les quittances de compagnies aériennes révèlant de nombreux déplacements d'avions en Italie, dans une moindre mesure à Londres, ainsi qu'à Saint-Barthélemy. Pour autant, comme le relève l'administration, ces justificatifs ne suffisent pas à établir le caractère professionnel des frais déduits dès lors que si certaines factures et notes de restaurant portent le nom de personnes, elles ne permettent pas de déterminer s'il s'agit de clients ou de fournisseurs, ni dans le cadre de quels marchés les dépenses ont été exposées. De même, le motif professionnel des déplacements, justifiés par de nombreuses quittances de compagnies aériennes, n'est nulle part indiqué. Il en va de même du motif des nombreuses consommations au Paris Golf et Country Club de Rueil-Malmaison. Seul le devis communiqué par une lettre du 14 avril 2008 au maire d'Antibes justifie du caractère professionnel des notes du restaurant de Bacon, au cap d'Antibes, le 12 avril 2008, et de la note d'hôtel à Cannes du même jour. Par suite, le moyen tiré de ce que ces dépenses ont été rejetées comme non exposées dans l'intérêt de l'entreprise, ne peut être accueilli qu'en ce qui concerne ces deux notes.
6. Il résulte de l'instruction qu'une provision pour dépréciation de créances d'un montant de 154 458,64 euros a été enregistrée dans un " à nouveau " au 1er janvier 2008, et maintenue au cours de deux exercices vérifiés. La SARL COUVERDURE soutient que cette somme correspond à la dépréciation de la créance de 308 317,27 euros qu'elle estime détenir sur la Ville de Paris et qui résulte du non règlement d'une partie du marché initial, d'intérêts moratoires et surtout de travaux supplémentaires, pour un chantier de rollerparc du centre sportif Noël à Paris XIVème. À cet effet, elle relève que son gérant n'a signé que " sous toutes réserves " le décompte général de ce marché du 2 novembre 2007 et que, contrairement aux affirmations de l'administration de la Ville de Paris, saisie dans l'exercice du droit de communication, elle a adressé des courriers, accompagnés d'accusé de réceptions, en date du 17 décembre 2007 et du 14 janvier 2008, à titre de titre de réclamation et de mémoire financier en vue d'obtenir paiement de la somme en question. Pour autant, la société reconnaît d'elle-même que les travaux supplémentaires, qui constituent l'essentiel de sa créance alléguée, n'ont été ni commandés par la Ville de Paris, ni validés par le maître d'ouvrage. En outre, elle ne conteste pas s'être abstenue de faire constater sa créance par le tribunal administratif dans le délai prévu aux articles 50-31 et 50-32 du CCAG. Par suite, la créance n'est pas fondée dans son principe. Alors que le risque de non recouvrement est apparu au cours de l'année 2007, la SARL COUVERDURE n'établit pas non plus l'avoir enregistrée à la clôture de l'exercice 2007. Enfin, elle ne justifie pas de la réduction à 50 % de la valeur de la créance, telle qu'elle résulte de la somme portée en provision. Ainsi, le moyen tiré du rejet erroné de la déduction de cette provision doit être écarté.
En ce qui concerne les suppléments de taxe sur la valeur ajoutée au titre des périodes correspondant aux années 2008 et 2009 :
7. Aux termes du II de l'article 271 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures ; (...) 2. La déduction ne peut pas être opérée si les redevables ne sont pas en possession soit desdites factures, soit de la déclaration d'importation sur laquelle ils sont désignés comme destinataires réels. (...) ".
8. Il résulte de ce qui a été dit au 6 que les frais dont la déduction a été rejetée, n'ont pas été exposés pour les besoins des opérations de l'entreprise, sauf en ce qui concerne les notes du restaurant de Bacon, au cap d'Antibes, et d'hôtel à Cannes, le 12 avril 2008. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de II de l'article 271 du code général des impôts ne peut être accueilli que pour la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé ces notes.
9. ll résulte de tout ce qui précède que la SARL COUVERDURE est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la réduction de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice 2008 et des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période correspondante, et des pénalités y afférentes, résultant des notes mentionnées au 6 et de la taxe dont elles étaient grevées.
Sur les conclusions accessoires :
10. Il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au profit de la SARL COUVERDURE qui est, dans la présente instance, la partie principalement perdante, la somme que cette dernière demande au titre des frais exposés par elle et non comprise dans les dépens.
11. En l'absence de dépens justifiés et chiffrés, les conclusions tendant à leur remboursement doivent être en tout état de cause rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La base d'imposition assignée à la SARL COUVERDURE au titre de l'impôt sur les sociétés et de la taxe sur la valeur ajoutée est réduite des sommes figurant sur les notes d'hôtel et de restaurant mentionnées au paragraphe 6.
Article 2 : La SARL COUVERDURE est déchargée de la différence entre les suppléments d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie, en droits et pénalités, au titre de l'année 2008 et le montant résultant de l'article 1er.
Article 3 : Le jugement n°1600974 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 23 janvier 2018, est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL COUVERDURE est rejeté.
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18VE01001