Le PREFET DES YVELINES soutient que M. B...ne peut bénéficier de l'application combinée des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 211-2-1 du même code, ne justifiant pas d'une entrée régulière sur le territoire français, dès lors qu'il n'a pas souscrit la déclaration obligatoire et qu'il était en provenance directe d'un État partie à la convention de Schengen.
La requête du PREFET DES YVELINES a été communiquée à M.B..., qui a produit des pièces et un mémoire sans le ministère d'un avocat, qui n'ont pas fait l'objet d'une régularisation.
Vu II, sous le n° 18VE04123, la procédure suivante :
Par une requête, enregistrée le 12 décembre 2018, le PREFET DES YVELINES demande, par les mêmes moyens que ceux soutenus à l'appui de sa requête n° 18VE04113, d'ordonner le sursis à exécution du jugement du Tribunal administratif de Versailles.
Par des pièces, enregistrées les 5 et 6 mars 2019, et un mémoire en défense, enregistré le 13 mai 2019, M.B..., représenté par Me Thomas, avocat, conclut :
1° au rejet de la requête du PREFET DES YVELINES ;
2° à ce qu'il soit enjoint au PREFET DES YVELINES de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", en application des dispositions combinées des articles L. 313-11, 4° et L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de
150 euros par jour de retard ;
3° à défaut, à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de destination, et à ce qu'il soit enjoint au
PREFET DES YVELINES de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail, dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4° à ce que soit mise à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. B...fait valoir que :
- il ne peut lui être opposé une entrée irrégulière sur le territoire français ;
- l'arrêté attaqué a été pris en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention d'application de l'accord de Schengen du 19 juin 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Méry ;
- les observations de M.B....
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes n° 18VE04113 et n° 18VE04123 tendent à l'annulation et au sursis à exécution du même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.
2. D'une part, le PREFET DES YVELINES relève appel du jugement en date du
9 novembre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du
19 juin 2018 portant refus de délivrance d'un titre de séjour à M.B..., ressortissant congolais (République du Congo), né le 20 mars 1976, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination. D'autre part, le PREFET DES YVELINES demande à la Cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement attaqué.
Sur la requête n° 18VE04113 :
En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le Tribunal administratif :
3. D'une part, aux termes des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : [...]4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; ". Aux termes de l'article L. 313-2 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire et celle de la carte de séjour pluriannuelle mentionnée aux articles L. 313-20, L. 313-21, L. 313-23 et L. 313-24 sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1. ". En vertu du dernier alinéa de l'article L. 211-2-1 dudit code : " Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour. ". Il résulte de ces dispositions que la délivrance d'une carte de séjour temporaire à un étranger en qualité de conjoint de ressortissant français est subordonnée à la production d'un visa pour un séjour supérieur à trois mois et que l'octroi d'un tel visa par l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour est subordonné à la justification d'une entrée régulière sur le territoire français.
4. D'autre part, aux termes de l'article 22 de la convention signée à Schengen le
19 juin 1990 : " I- Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties contractantes sont tenus de se déclarer, dans des conditions fixées par chaque Partie contractante, aux autorités compétentes de la Partie contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. / Cette déclaration peut être souscrite au choix de chaque Partie contractante, soit à l'entrée, soit, dans un délai de trois jours ouvrables à partir de l'entrée, à l'intérieur du territoire de la Partie contractante sur lequel ils pénètrent. ". Aux termes de l'article R. 211-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La déclaration obligatoire mentionnée à l'article L. 531-2 est, sous réserve des dispositions de l'article R. 212-6, souscrite à l'entrée sur le territoire métropolitain par l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne et qui est en provenance directe d'un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990. ". L'article R. 212-6 du même code dispose que : " L'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse n'est pas astreint à la déclaration d'entrée sur le territoire français : / 1° S'il n'est pas assujetti à l'obligation du visa pour entrer en France en vue d'un séjour d'une durée inférieure ou égale à trois mois ; / 2° Ou s'il est titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, d'une durée supérieure ou égale à un an, qui a été délivré par un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ; toutefois, la déclaration doit être souscrite par les résidents d'Etats tiers qui sont désignés par arrêté du ministre chargé de l'immigration. ". La déclaration prévue par l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen, et dont l'obligation figure à l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est une condition de la régularité de l'entrée en France de l'étranger soumis à l'obligation de visa et en provenance directe d'un Etat partie à cette convention qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire.
5. Il ressort des pièces du dossier que M. B...établit, par la copie de son passeport, revêtu d'un visa Schengen, délivré par les autorités françaises au Cap, valable du
25 août au 23 novembre 2016, et d'un tampon apposé par les autorités néerlandaises le
4 septembre 2016 à Amsterdam, être entré régulièrement dans l'espace Schengen le même jour. Toutefois, il ne s'est pas déclaré aux autorités françaises à la suite du franchissement de la frontière entre les Pays-Bas et la France. Il ne peut, dès lors, utilement soutenir qu'ayant fait une escale à Amsterdam, il ne pouvait être regardé comme étant en provenance directe d'un État partie à la convention de Schengen, au sens des dispositions précitées de l'article R. 211-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ainsi le requérant ne peut se prévaloir d'une entrée directe sur le territoire français et le PREFET DES YVELINES a pu régulièrement lui refuser un titre de séjour en qualité de conjoint de français, au motif que, ne justifiant pas d'une entrée régulière sur le territoire français, il ne peut bénéficier de l'application des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 et de celles de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, pour annuler l'arrêté litigieux, le Tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur l'existence d'une erreur d'appréciation du PREFET DES YVELINES relative à la régularité de l'entrée en France de M.B....
7. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B...devant le Tribunal administratif de Versailles.
En ce qui concerne les moyens de la demande de M.B..., dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel :
S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :
8. En premier lieu, la décision de refus de titre de séjour mentionne les textes dont elle fait application, et notamment les dispositions du 4° de l'article L. 313-11, les dispositions de l'article L. 211-2-1 et des articles L. 531-2, R. 211-32 et R. 211-33 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, concernant la demande de délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française présentée par M.B..., mais également celles du 7° de l'article L. 313-11 du même code, et les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Cette décision indique également les principaux éléments de la situation personnelle de
M.B..., relatifs à son entrée en France, à son mariage, à ses conditions de vie en France et aux attaches familiales qui sont les siennes dans son pays d'origine, la République du Congo. En conséquence, la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour opposée à
M. B...est suffisamment motivée en droit et en fait.
9. En second lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
10. M. B...se prévaut de son mariage avec une ressortissante française, le 21 avril 2018, et de son insertion dans la société française au soutien de sa demande d'annulation de la décision du PREFET DES YVELINES lui refusant la délivrance d'un titre de séjour. Toutefois, son mariage est récent à la date de la décision attaquée en date du 19 juin 2018, et l'intéressé ne justifie pas de liens intenses, stables et anciens en France. Son entrée, à la supposer établie au cours de la période de validité de son visa de court séjour, est récente et il ne démontre pas une particulière insertion dans la société française par les attestations de proches ou le contrat de travail à durée déterminée qu'il produit. Par ailleurs, il est constant qu'il a des attaches familiales dans son pays d'origine, la République du Congo, où résident l'un de ses enfants mineurs, son père, ses frères et soeurs, ainsi que ses demi-frères et demi-soeurs, et où il a
lui-même vécu la majeure partie de sa vie. Par conséquent, M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise, en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de ce que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ne peut qu'être écarté.
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
11. En premier lieu, si M. B...excipe de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour pour demander l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français dont elle est assortie, il n'invoque par voie d'exception aucun autre moyen que ceux déjà écartés qu'il a soulevés par voie d'action. Le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre soulevé à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut, dès lors, être accueilli.
12. En second lieu, M. B...faisant valoir, au soutien de sa demande d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, les mêmes éléments que ceux qu'il a fait valoir au soutien de sa demande de titre de séjour, les moyens tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par la décision portant obligation de quitter le territoire français et de l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle ne peuvent être accueillis, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 10 du présent arrêt.
13. Il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DES YVELINES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 19 juin 2018 par lequel il a refusé la délivrance d'un titre de séjour à
M.B..., l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.
Sur la requête n° 18VE04123 :
14. Le présent arrêt prononçant l'annulation du jugement attaqué, les conclusions tendant à ce que la Cour en prononce le sursis à exécution sont devenues sans objet.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1805262 du Tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : La demande portée par M. A...B...devant le Tribunal administratif de Versailles est rejetée.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 18VE04123.
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N° 18VE04113, 18VE04123