Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 25 juin 2020 et un mémoire complémentaire enregistré le 18 janvier 2021, Mme C..., représentée par Me Langlois, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3° d'enjoindre au préfet de la Seine Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Mme C... soutient que :
- le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet s'est fondé sur un avis qui n'est pas daté de la même date que l'avis rendu par le collège de médecins de l'OFII, ce qui ne permet pas d'attester la réalité de la tenue de la réunion collégiale ;
- l'arrêté litigieux est insuffisamment motivé ;
- la commission du titre de séjour n'a pas été consultée ;
- le préfet s'est à tort regardé en compétence liée par l'avis du collège des médecins de l'OFII ;
- au regard de l'état de santé de Mme C..., le préfet a méconnu l'article 6-7 de l'accord franco-algérien ;
- le préfet a méconnu l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté litigieux méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- elle est privée de base légale ;
- elle méconnaît l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle n'a pas été précédée d'un examen individuel ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :
- elle est privée de base légale ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
- elle est privée de base légale ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
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Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante algérienne, relève appel du jugement du 12 décembre 2019 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à 1'annulation de 1'arrêté en date du 18 janvier 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Sur la régularité du jugement :
2. L'arrêté litigieux du préfet de la Seine-Saint-Denis ne vise pas l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et il ne ressort d'aucun de ses motifs que le préfet aurait examiné le droit au séjour de Mme C... au regard de ces dispositions. Par suite, Mme C... ne peut valablement soutenir que le jugement serait irrégulier faute d'avoir répondu à son moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions par le préfet de la Seine-Saint-Denis.
Sur le fond du litige :
S'agissant du refus de renouvellement du certificat de résidence :
3. L'arrêté litigieux vise les textes et conventions dont il fait application et précise les considérations de droit et de fait qui le fondent, permettant à l'intéressée d'en critiquer utilement le bien-fondé. Par suite, il remplit les exigences de motivation prévue par le code des relations entre le public et 1'administration.
4. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention" vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays( ... ) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants algériens en l'absence de stipulations particulières de l'accord franco-algérien relatives à l'instruction de la demande des certificats de résidence : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l 'Office français de l'immigration et de 1'intégration. / L 'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé(...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre ( ...) Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. (...) / L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. ". Enfin, aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis (...). Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".
5. Lorsque l'avis du collège de médecins porte la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'OFII émet l'avis suivant ", cette mention du caractère collégial de l'avis fait foi jusqu'à preuve du contraire. Cette preuve contraire n'est pas rapportée par le fait que l'avis communiqué à Mme C... par l'OFII et celui produit par le préfet de la Seine-Saint-Denis porteraient une date différente.
6. Il ressort des dispositions précitées que le collège de médecins peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. Par suite, la circonstance qu'il ne se serait pas physiquement réuni pour délibérer est sans influence sur la régularité de 1'avis rendu. Si Mme C... conteste également l'authentification des signatures électroniques des membres du collège des médecins portés sur cet avis au regard des dispositions de l'article L. 212-3 du code des relations entre le public et l'administration, elle n'apporte aucun élément de nature à mettre en doute la validité de ces signatures. Si Mme C... soutient que la signature des trois médecins composant le collège ayant rendu son avis présenterait un caractère irrégulier, elle ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 212-3 du code des relations entre le public et l'administration, qui renvoient au 1 de l'article 9 de l'ordonnance du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives, dès lors que l'avis émis par le collège de médecins de l'OFII n'est pas au nombre des actes relevant du champ d'application de l'article L. 212-3 du code des relations entre le public et l'administration dont le respect ne s'impose qu'aux décisions administratives. Par suite, le moyen tiré d'un vice de procédure doit être écarté.
7. Il ne ressort pas des termes de 1'arrêté litigieux que le préfet, qui a entendu s'approprier les termes de l'avis du collège des médecins de l'OFII, se serait, à tort, considéré comme tenu par cet avis et n'aurait pas porté une appréciation personnelle sur l'état de santé de Mme C.... Le moyen tiré de 1'erreur de droit dont serait ainsi entaché 1'arrêté litigieux pour ce motif doit être écarté.
8. Il ressort des pièces du dossier que, si Mme C... produit diverses preuves de ce qu'elle souffre de douleurs lombaires, d'un trouble anxio-dépressif et d'une otite chronique entraînant une hypoacousie, elle n'établit pas que, contrairement à ce qu'a estimé le collège de médecins de l'OFII, elle ne pourrait être traitée de façon adaptée dans son pays d'origine. Par suite, Mme C... ne peut valablement soutenir que 1'arrêté litigieux méconnaîtrait les stipulations précitées de 1'article 6-7 de 1'accord franco-algérien.
9. Ainsi qu'il a été dit au point 2 ci-dessus, il ne ressort pas des visas et des motifs de 1'arrêté litigieux que le préfet aurait examiné le droit au séjour de Mme C... au regard des dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, 1'erreur de droit qu'aurait commise le préfet en faisant application de dispositions qui ne s'appliquent pas aux ressortissants algériens ne peut qu'être écartée.
10. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de 1'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
11. Si Mme C... se prévaut de la naissance en France en 2016 et 2017 de ses deux enfants, elle ne conteste pas être séparée du père de ses enfants dont elle ne démontre pas qu'il séjournerait en France sous couvert d'un titre de séjour régulier. Elle ne démontre pas davantage être privée d'attaches dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 33 ans. Par suite, le moyen tiré de ce que le refus de renouvellement de son titre de séjour méconnaîtrait son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par les stipulations précitées doit être écarté.
12. Mme C... n'établit pas que le refus de renouvellement de son titre de séjour serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conditions de son séjour en France.
13. En vertu des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissant algériens, la commission du titre de séjour " est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 (...) ". Le préfet n'est toutefois tenu de saisir la commission que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Ainsi qu'il a été dit au point 11, Mme C... n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour en raison de son état de santé, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande.
S'agissant de la décision obligeant Mme C... à quitter le territoire français :
14. Il ressort de ce qui a été dit ci-dessus que Mme C... ne peut se prévaloir de l'illégalité du refus de renouvellement de son titre de séjour pour soutenir que l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale.
15. Il ne ressort pas des termes de l'arrêté litigieux que l'obligation faite à Mme C... de quitter le territoire français n'aurait pas été précédée d'un examen individuel de sa situation.
16. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) ".
17. Ainsi qu'il a été dit au point 8 ci-dessus, l'état de santé de Mme C... pouvant être pris en charge dans son pays d'origine, elle n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
18. Pour les motifs retenus au point 11 ci-dessus, Mme C... ne saurait valablement se prévaloir à l'appui de sa contestation de la légalité de l'obligation de quitter le territoire français de l'atteinte portée à sa vie privée et familiale.
S'agissant de la décision fixant le délai de départ volontaire :
19. Il résulte des motifs exposés ci-dessus que le moyen tiré de ce que la décision fixant le délai de départ volontaire serait privée de base légale doit être écarté.
20. Aux termes de 1'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. - L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. Le délai de départ volontaire accordé à l'étranger peut faire l'objet d'une prolongation par l'autorité administrative pour une durée appropriée s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. L'étranger est informé par écrit de cette prolongation. / (...). ".
21. La motivation de la décision distincte fixant le délai de départ volontaire se confond avec celle de l'obligation de quitter le territoire français, laquelle comporte les considérations de droit et de fait et est suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.
22. Dans la mesure où Mme C... n'établit ni même n'allègue avoir sollicité un délai de départ volontaire supérieur à· trente jours en se prévalant de circonstances propres à son cas, elle n'est pas fondée à soutenir que le choix de fixer un délai de cette durée est affecté d'une erreur manifeste d'appréciation.
S'agissant de la décision fixant le pays de destination en cas d'exécution forcée de 1'obligation de quitter le territoire français :
23. Il résulte des motifs exposés ci-dessus que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination serait privée de base légale doit être écarté.
24. La décision fixant le pays de destination à l'issue du séjour en France de Mme C... n'a pas en elle-même pour effet de la séparer de ses enfants. Par suite, le moyen tiré de ce qu'elle méconnaîtrait 1'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de 1'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
25. Le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination à l'issue du séjour en France de Mme C... méconnaitrait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est dépourvu des précisions permettant d'en apprécier la portée et ne peut qu'être écarté.
26. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
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N° 20VE01754