Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 25 avril 2018, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de rejeter la demande de MmeB....
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a jugé que le préfet avait commis une erreur de droit en estimant que l'intéressée ne disposait plus d'un droit au séjour à la date de cet arrêté et en fondant la mesure d'éloignement sur les dispositions de l'article L. 511-1 (I, 6°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les autres moyens soulevés dans la demande de Mme B...ne sont pas fondés.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Guével a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A...B..., ressortissante chinoise, né le 12 janvier 1990, a présenté le 22 juillet 2016 une demande d'asile qui a été rejetée par une décision du 31 janvier 2017 du directeur général de l'office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 2 octobre 2017 de la cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté du 16 janvier 2018, le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé notamment d'obliger Mme B...à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Le préfet de la Seine-Saint-Denis relève appel du jugement du 26 mars 2018 par lequel le magistrat désigné du Tribunal administratif de Montreuil a annulé cet arrêté.
Sur le moyen d'annulation retenu par le magistrat désigné par le Tribunal administratif de Montreuil :
2. D'une part, aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entré et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile./(...). ". Aux termes de l'article R. 733-32 du même code : " Le secrétaire général de la cour notifie la décision de la cour au requérant par lettre recommandée avec demande d'avis de réception dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 213-3./(...). ". D'autre part, aux termes de l'article L. 511-1 (I, 6°) du même code: " I - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français à un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ".
3. Il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis justifie en appel que la décision du 2 octobre 2017 par laquelle la cour nationale du droit d'asile a rejeté le recours de Mme B...dirigé à l'encontre de la décision de refus du 31 janvier 2017 de l'office français de protection des réfugiés et apatrides a été notifiée à l'intéressée le 16 octobre 2017. Dès lors, Mme B...ne bénéficiait plus, à la date de l'arrêté du 16 janvier 2018 du préfet de la Seine-Saint-Denis, du droit de se maintenir sur le territoire français et pouvait légalement faire l'objet d'une mesure d'éloignement sur le fondement des dispositions, mentionnées au point 2, de l'article L. 511-1 (I, 6°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le préfet de la Seine-Saint-Denis est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du Tribunal administratif de Montreuil a annulé son arrêté du 16 janvier 2018.
4. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens soulevés par Mme B...devant le Tribunal administratif de Montreuil.
Sur la légalité de l'arrêté litigieux :
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire :
5. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...). ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".
6. Il ressort des termes de l'arrêté attaqué du 16 janvier 2018 du préfet de la Seine-Saint-Denis qu'il comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
7. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de Mme B...avant de prendre à son encontre l'arrêté contesté. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen de sa situation personnelle doit être écarté.
8. Aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. 2. Ce droit comporte notamment : le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ". Le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne.
9. Il ressort des pièces du dossier que Mme B...a présenté le 12 août 2016 une demande d'asile auprès de l'office français de protection des étrangers et des apatrides, demande qui a été rejetée par une décision du 31 janvier 2017, puis confirmée par la cour nationale du droit d'asile par arrêt du 2 octobre 2017. Ainsi, à l'occasion de l'instruction de ces demandes et décisions, Mme B...a nécessairement été avisée du fait qu'elle pouvait faire l'objet d'une nouvelle mesure d'éloignement, des différents droits et obligations qui en découle, et a, par conséquent, été à même de présenter, de manière utile et effective, ses observations sur l'éventualité de son éloignement à destination de son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe général du droit de l'Union européenne à être entendu doit être qu'écarté.
10. Il ne ressort pas des pièces du dossier, en particulier de l'arrêté attaqué, que le préfet de la Seine-Saint-Denis se serait cru placé en situation de compétence liée pour prendre à l'encontre de Mme B...une décision portant obligation de quitter le territoire français sur le fondement des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.
Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :
11. Pour les motifs exposés au point 6, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision fixant le pays à destination duquel Mme B...est éloignée doit être écarté.
12. En l'absence d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision fixant le délai de départ volontaire doit être écarté.
13. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. (...) Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. (...) ". Mme B...n'établit pas que sa situation personnelle aurait justifié que le préfet de la Seine-Saint-Denis lui accordât un délai de départ volontaire supérieur à trente jours, ni même d'ailleurs avoir sollicité une telle prolongation. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation affectant la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours doit être écarté.
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
14. Pour les motifs mentionnés au point 12, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision fixant le pays de renvoi doit être écarté.
15. Aux termes des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". L'article 3 de cette convention stipule que " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".
16. Mme B...ne démontre pas qu'elle serait exposée à des risques actuels et personnels de traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine, la République populaire de Chine, en se bornant à alléguer, sans d'ailleurs l'établir, qu'elle est une sympathisante de " l'église de dieu tout puissant " et s'est ainsi attirée l'hostilité du parti communiste chinois. Au demeurant, comme il est dit aux points 1 et 3, sa demande d'admission au statut de réfugié a été rejetée par une décision du 31 janvier 2017 de l'office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 2 octobre 2017 de la cour nationale du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
17. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Seine-Saint-Denis est fondé à demander l'annulation du jugement n° 1801195 du 26 mars 2018 par lequel le magistrat désigné du Tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté attaqué du 16 janvier 2018. En outre, la demande présentée par Mme B...devant le Tribunal administratif de Montreuil doit être rejetée, ainsi que ses conclusions d'appel en annulation, en injonction et relatives au frais liés à l'instance.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1801195 du 26 mars 2018 du Tribunal administratif de Montreuil est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme B...devant le Tribunal administratif de Montreuil et ses conclusions d'appel sont rejetées.
N° 18VE01432 2