Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire ampliatif, enregistrés les 9 et 22 juillet 2015, Mme A..., représentée par Me Lamine, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3° d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer une carte de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation après saisine de la commission du titre de séjour, sous astreinte de 20 euros par jour de retard ;
4° de mettre à la charge de l'État, au profit de son conseil, la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme A...soutient que :
- tant le jugement que la décision attaqués sont insuffisamment motivés, notamment en ce qui concerne l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ; en outre, il ressort de la décision qu'il n'a pas été procédé à un examen du dossier au regard de la possibilité de saisir la commission du titre de séjour ;
- cette décision a été prise au terme d'une procédure irrégulière faute de saisine de la commission du titre de séjour ;
- dès lors qu'elle réside en France depuis plus de dix ans, le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est fondée à se prévaloir des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; en effet, depuis son arrivée en France elle y a établi des liens privés sociaux et amicaux.
..........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Huon a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que MmeA..., de nationalité ivoirienne, relève appel du jugement du 6 octobre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 décembre 2013 du préfet des Hauts-de-Seine refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative :
" Les jugements sont motivés. " ;
3. Considérant qu'il ressort de l'examen du jugement attaqué que le tribunal administratif a répondu, par une motivation suffisante, au moyen tiré de ce que dès lors que Mme A... justifiait d'une présence en France depuis plus de dix ans, l'arrêté attaqué avait été édicté au terme d'une procédure irrégulière faute de saisine de la commission du titre de séjour ; qu'ainsi, le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité de ce chef ;
Sur la légalité de l'arrêté préfectoral du 26 décembre 2013 :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 79-587 du
11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;
5. Considérant que la décision attaquée mentionne, en particulier, que MmeA..., célibataire et sans charge de famille et qui n'apporte pas la preuve de l'existence de liens personnels ou familiaux anciens et stables en France, ne peut se prévaloir des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle indique, par ailleurs, que l'intéressée, qui, notamment, conserve de fortes attaches dans son pays d'origine et ne dispose pas d'une promesse d'embauche, ne justifie d'aucune considération humanitaire ou d'aucun motif exceptionnel permettant son admission au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 de ce code par la délivrance d'une carte " vie privée et familiale " ou " salariée " ; qu'elle souligne, enfin, que l'intéressée, qui n'a produit des justificatifs qu'à compter de l'année 2007, n'établit pas sa présence en France depuis au moins dix ans de sorte que la commission du titre de séjour n'a pas à être saisie de sa demande ; que cette décision comporte ainsi, y compris s'agissant de la saisine de la commission du titre de séjour, les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivée au regard des exigences posées par les dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979, dont le respect s'apprécie indépendamment du bien-fondé des motifs retenus ;
6. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des motifs rappelés au point 5. que le préfet s'est livré à un examen particulier de la situation de Mme A...et que, notamment, contrairement à ce que cette dernière soutient, contre toute évidence, il a apprécié, au vu de la durée de séjour de l'intéressée, la nécessité de saisir la commission du titre de séjour ;
7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article
L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;
8. Considérant, d'une part, que Mme A...soutient résider en France depuis le
29 novembre 2001 ; que, toutefois, elle ne produit, s'agissant de l'année 2004, que les photocopies d'une enveloppe, d'une facture et d'un relevé de compte incomplet qui ne fait apparaître aucune adresse ; que, s'il ressort des pièces du dossier qu'elle a conclu en juin 2005 un contrat de location meublée, elle ne fournit, par ailleurs, en ce qui concerne cette année mais aussi les années 2006, 2007 et 2008, que de rares quittances de loyers et factures d'électricité qui ne couvrent que très partiellement ces années ; qu'en outre, à l'exception d'une lettre de la banque LCL, datée du 2 novembre 2005, elle ne produit, pour ces mêmes années, aucun autre document, de quelque nature que ce soit, et n'apporte aucune précision sur ses conditions d'existence ; que, par suite, la requérante ne peut être regardée comme établissant une présence ininterrompue en France durant les années 2004 à 2008 ni, par conséquent, depuis au moins dix ans à la date de l'arrêté attaqué ; que Mme A...n'est donc pas fondée à soutenir qu'en ne saisissant pas la commission du titre de séjour de sa demande présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet des Hauts-de-Seine aurait méconnu les dispositions précitées du deuxième alinéa de cet article, la circonstance, invoquée par ailleurs, qu'elle serait parfaitement intégrée étant sans incidence à cet égard ;
9. Considérant, d'autre part, que, si Mme A...fait valoir qu'elle a été employée par plusieurs particuliers en qualité d'aide à la personne à compter d'octobre 2014, cette circonstance, au demeurant postérieure à la décision attaquée, ne caractérise pas l'existence d'une insertion professionnelle ancienne et stable ; qu'en outre, en se bornant à faire valoir qu'elle est titulaire du bail pour l'appartement qu'elle occupe, l'intéressée, qui n'apporte aucune précision sur les liens sociaux et amicaux qu'elle aurait prétendument tissés en France, ne justifie pas davantage une réelle insertion sociale ; que, surtout, MmeA..., célibataire et sans charge de famille et non dépourvue d'attaches dans son pays d'origine, ne fait état d'aucune circonstance particulière qui ferait obstacle à ce qu'âgée de quarante-huit ans à la date de la décision attaquée, elle poursuive normalement sa vie à l'étranger, et en particulier dans son pays d'origine, où elle n'est pas dépourvue d'attaches dès lors, notamment, que ses parents y résident ; qu'ainsi, en estimant qu'en l'absence de considérations humanitaires ou d'un motif exceptionnel, la situation personnelle et familiale de la requérante ne justifiait pas son admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salariée ", le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation de cette situation au regard des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
10. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ;
11. Considérant, ainsi qu'il vient d'être dit, que MmeA..., qui est célibataire et sans charge de famille et ne justifie d'aucun lien familial, amical ou social en France, ne fait état d'aucune circonstance l'empêchant de poursuivre sa vie à l'étranger et, en particulier, dans son pays d'origine où résident encore ses parents de sorte qu'elle n'y est pas dépourvue d'attaches ; qu'ainsi, l'arrêté attaqué ne peut être regardé comme portant au droit de Mme A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que cet arrêté n'a donc méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de
Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent également qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
''
''
''
''
3
N° 15VE02180