Procédure contentieuse devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 18 avril 2019, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif.
Il soutient que, contrairement à ce que le Tribunal administratif de Montreuil a jugé, il est établi que la décision par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a rejeté la demande de M. C... a été notifiée à ce dernier antérieurement à l'édiction de l'arrêté litigieux. C'est donc à tort que le tribunal administratif a annulé cet arrêté. Les autres moyens soulevés en première instance par M. C... ne sont pas fondés.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant sénégalais né le 10 mai 1991 à Diaba (Sénégal), a sollicité la reconnaissance du statut de réfugié le 18 octobre 2017. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date 11 juillet 2018, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile en date du 12 octobre 2018. Par un arrêté du 4 février 2019, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS a rejeté sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays dont il a la nationalité comme pays de renvoi, ou tout autre pays dans lequel il est légalement admissible. Le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande l'annulation du jugement du 4 avril 2019 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a annulé cet arrêté, lui a enjoint de réexaminer la situation de M. C... dans un délai d'un mois et a mis à la charge de l'Etat une somme de 800 euros en application des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur le moyen d'annulation retenu par le Tribunal administratif de Montreuil :
2. Aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. (...). " Aux termes de l'article R. 733-32 du même code : " Le secrétaire général de la cour notifie la décision de la cour au requérant par lettre recommandée avec demande d'avis de réception dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 213-3. Il la notifie également au directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides. / La cour communique au préfet compétent et, à Paris, au préfet de police, lorsque ceux-ci en font la demande, copie de l'avis de réception. / Les décisions de rejet sont transmises, sur sa demande, au ministre chargé de l'immigration. " Aux termes de l'article R. 723-19 du même code : " I. - La décision du directeur général de l'office est notifiée à l'intéressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. / (...) / III. - La date de notification de la décision de l'office et, le cas échéant, de la Cour nationale du droit d'asile qui figure dans le système d'information de l'office et est communiquée au préfet compétent et au directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration au moyen de traitements informatiques fait foi jusqu'à preuve du contraire ".
3. Il résulte de ces dispositions que l'étranger qui demande l'asile a le droit de séjourner sur le territoire national à ce titre jusqu'à ce que la décision rejetant sa demande lui ait été notifiée régulièrement par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé devant elle, par la Cour nationale du droit d'asile. En l'absence d'une telle notification régulière, et alors même qu'il incombe aux services de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou de la Cour nationale du droit d'asile d'y pourvoir, l'autorité administrative ne peut regarder l'étranger à qui l'asile a été refusé comme ne bénéficiant plus de son droit provisoire au séjour. Il incombe au préfet compétent de démontrer que cette notification a été effectuée régulièrement.
4. Pour annuler l'arrêté litigieux du 4 février 2019, le tribunal administratif s'est fondé sur la circonstance que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS n'établissait pas que la décision du 12 octobre 2018 de la Cour nationale du droit d'asile avait été effectivement notifiée à M. C... avant l'édiction de son arrêté. Toutefois, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS produit pour la première fois en appel le relevé des informations de la base de données " TelemOfpra " relative à l'état des procédures de demandes d'asile et tenue par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, attestant de ce que la décision du 12 octobre 2018 a été notifiée à l'intéressé le 24 octobre 2018. Cette date de notification, mentionnée dans l'application informatique susmentionnée, fait foi jusqu'à preuve du contraire. Or M. C..., qui n'a pas défendu dans la présente instance, n'apporte aucun élément de nature à contester la réalité de cette notification. Ainsi, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS justifie de la notification régulière de la décision de la Cour nationale du droit d'asile à M. C... le 24 octobre 2018, soit antérieurement à la date de l'arrêté attaqué du 4 février 2019. Dans la mesure où M. C... ne disposait plus à cette date du droit de se maintenir sur le territoire français, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à soutenir que c'est à tort que le jugement attaqué a accueilli le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 743-1 et R. 733-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour annuler son arrêté.
5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... devant le Tribunal administratif de Montreuil.
Sur les autres moyens soulevés :
6. En premier lieu, par application combinée des arrêtés n° 2018-2182 du 17 septembre 2018 et n° 18-2385 du 1er octobre 2018, régulièrement publiés, M. B... E..., adjoint à la cheffe du bureau de l'éloignement et du contentieux, avait reçu délégation de signature à l'effet de signer, notamment, les décisions de refus de titre de séjour, les décisions portant obligation de quitter le territoire français avec fixation ou non d'un délai de départ volontaire et portant fixation du pays de destination. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté litigieux manque en fait et doit être écarté.
7. En deuxième lieu, il ressort des mentions de l'arrêté contesté que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS a visé les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicables à la situation de M. C... et fondant sa décision. Il a par ailleurs relevé, pour justifier la mesure d'éloignement prononcée à l'encontre de l'intéressé, que celui-ci avait vu sa demande d'asile rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides le 11 juillet 2018 puis par la Cour nationale du droit d'asile le 12 octobre 2018. Il a également relevé que M. C... ne justifiait pas d'une situation personnelle et familiale à laquelle l'arrêté attaqué serait susceptible de porter une atteinte disproportionnée au regard du but poursuivi par sa décision et que l'intéressé n'établissait pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme en cas de retour dans son pays d'origine. La décision litigieuse portant refus de séjour au titre de l'asile comporte donc les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est ainsi suffisamment motivée. Il en va de même de la décision portant obligation de quitter le territoire français dont la motivation se confond ici avec celle du refus de séjour. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté doit être écarté. Le moyen tiré du défaut d'examen de la situation personnelle de M. C..., dont le bien-fondé ne ressort donc pas des pièces du dossier, doit également être écarté.
8. En troisième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union ". Aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ". Aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union (...) ". Si les dispositions de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ne sont pas en elles-mêmes invocables par un étranger faisant l'objet d'une mesure telle qu'une mesure d'éloignement du territoire français dès lors que ces stipulations s'adressent non pas aux États membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union, celui-ci peut néanmoins utilement faire valoir que le principe général du droit de l'Union relatif au respect des droits de la défense imposait qu'il soit préalablement entendu et mis à même de présenter toute observation utile sur la mesure envisagée.
9. Il ressort des pièces de dossier que M. C... a sollicité, le 18 octobre 2017, le bénéfice de l'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, qui a rejeté cette demande par décision du 11 juillet 2018. Cette décision de rejet a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile par une décision du 12 octobre 2018. Ainsi, M. C... a été mis à même de présenter des observations écrites et orales devant les instances compétentes en matière d'asile dans le cadre de l'examen de sa demande, tant s'agissant de sa demande de titre de séjour au titre de l'asile que sur la perspective de son éloignement à destination de son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la violation du droit à être entendu ne peut qu'être écarté.
10. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS aurait entaché son arrêté d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de M. C....
11. Enfin, le moyen tiré par M. C... de ce que la décision portant fixation du pays de renvoi méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé, alors que la demande d'asile présentée par l'intéressé a été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile.
12. Il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE SEINE-SAINT-DENIS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé son arrêté du 4 février 2019. Par voie de conséquence, la demande présentée par M. C... devant le Tribunal administratif de Montreuil doit, dans toutes ses conclusions, être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1902242 du Tribunal administratif de Montreuil du 4 avril 2019 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le Tribunal administratif de Montreuil est rejetée.
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N° 19VE01402