Par un jugement n° 1606683-1606684 du 18 juin 2018, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 29 août 2018, Mme D... épouse E..., représentée par Me A..., avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler ces décisions ;
3° de condamner l'Etat à lui verser la somme de 60 000 euros en réparation de ses préjudices ;
4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 7 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'administration a commis une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que, contrairement à ses affirmations, la relation de travail avec le rectorat n'a pas été interrompue le 1er septembre 2015 par une démission ou un abandon de poste de sa part ; en effet, enseignante contractuelle depuis 2009 et affectée depuis le 1er septembre 2011 au collège George Sand à Magnanville, le rectorat de l'académie de Versailles lui a adressé le 13 juillet 2015 un avis de contrat de recrutement au titre de l'année scolaire 2015-2016 au sein du même établissement ; cette affectation lui a été en outre confirmée par la direction de l'établissement le 27 août 2015 ; elle a par ailleurs participé à la rentrée des enseignants le 31 août suivant ; s'il est vrai qu'à la suite d'un incident avec la directrice de l'établissement le 1er septembre 2015, elle a adressé un courriel le lendemain à l'inspectrice d'académie dans lequel elle déclare ne pas vouloir poursuivre la relation de travail avec l'administration, ce courriel a été rédigé sous le coup d'une violente émotion ; elle n'a jamais adressé au recteur un courrier recommandé qui puisse attester d'une volonté non équivoque de sa part de démissionner, conformément aux dispositions de l'article 48 du décret du 17 janvier 1986 ; en outre, si l'administration lui a adressé le 7 septembre 2015 une mise en demeure de rejoindre son poste sous peine de licenciement pour abandon de poste, le rectorat n'a pas donné suite à cette mise en demeure et n'a engagé aucune procédure de licenciement ; par ailleurs, son arrêt maladie en date du 21 septembre 2015 a eu pour effet de suspendre le cours de la relation contractuelle et faisait obstacle à sa rupture ; l'administration ne pouvait dès lors lui adresser le même jour une attestation destinée au Pôle emploi mentionnant une fin d'activité le 31 août 2015, consécutive à un refus de poste de sa part ; par un courrier du 12 octobre 2015, elle a demandé au rectorat de reconsidérer sa position, ce qu'il a refusé par un courrier du 15 octobre suivant ;
- l'administration a ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;
- elle a subi un préjudice financier qui peut être évalué à la somme de 40 680 euros, ainsi qu'un préjudice moral qui peut être évalué à la somme de 19 320 euros, soit la somme totale de 60 000 euros.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- les conclusions de M. Clot, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., pour Mme D... épouse E....
Considérant ce qui suit :
1. Mme D... épouse E..., née le 17 août 1983, employée en qualité de professeur contractuel depuis le 10 septembre 2009, a été nommée en dernier lieu, par un avis de contrat de recrutement du rectorat de l'académie de Versailles du 13 juillet 2015, pour exercer ses fonctions d'enseignante contractuelle au sein du collège George Sand à Magnanville, du 1er septembre 2015 au 31 août 2016. Par un courrier du 12 octobre 2015, l'intéressée a demandé à la direction des ressources humaines du rectorat de lui transmettre son contrat de travail afin de pouvoir le signer. Cette demande a été rejetée par le recteur le 15 octobre suivant au motif que, n'ayant pas rejoint son poste le 1er septembre, ni répondu à la mise en demeure qui lui a été adressée le 7 septembre 2015, elle ne pouvait plus se prévaloir d'un lien contractuel quelconque avec l'administration. Par un courrier du 24 mars 2016, Mme D... épouse E... a demandé, d'une part, sa réintégration dans ses fonctions de professeur contractuel et, d'autre part, le versement d'une somme de 60 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait du refus qui lui a été opposé par le rectorat. Ces demandes ont fait l'objet d'une décision implicite de rejet, dont les motifs ont été communiqués à l'intéressée par un courrier du 20 juillet 2016. Mme D... épouse E... relève appel du jugement du Tribunal administratif de Versailles du 18 juin 2018 rejetant ses demandes.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article 48 du décret du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat pris pour l'application de l'article 7 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " L'agent non titulaire informe son administration de son intention de démissionner par lettre recommandée. L'agent est tenu, dans ce cas, de respecter un préavis dont la durée est identique à celle qui est mentionnée à l'article 46, alinéa 1er ci-dessus. (...) ".
3. Si ces dispositions exigent que la démission d'un agent contractuel résulte d'une demande écrite, marquant sa volonté expresse et non équivoque de cesser ses fonctions, elles ne sauraient en revanche être regardées comme imposant que cette demande soit adressée par lettre recommandée, sous peine que la démission de l'agent ne soit pas valable et ne doivent pas être regardées comme subordonnant la démission à l'acceptation de l'autorité compétente. Ces dispositions ne sauraient davantage, en prévoyant la formalité de la lettre recommandée qui n'a d'autre objet que de donner date certaine à la notification à l'administration de la lettre de démission de l'agent et de fixer ainsi le point de départ du délai de préavis que celui-ci doit respecter, être regardées comme édictant une garantie dont la méconnaissance pourrait être invoquée par l'agent qui ne l'a pas respectée pour contester la légalité de la décision donnant acte de sa démission et mettant fin à ses fonctions.
4. Il ressort des pièces du dossier que, dans un courriel du 2 septembre 2015,
Mme D... épouse E..., dont le dernier contrat de travail avait pris fin le 31 août 2015, a indiqué à l'inspectrice de l'éducation nationale qu'en raison d'un incident, la veille, lors d'un entretien avec la principale du collège George Sand, au cours duquel cette dernière lui a indiqué qu'elle ne souhaitait plus travailler avec elle, elle a informé l'administration qu'elle ne comptait " pas renouveler son contrat cette année scolaire ".
5. D'une part, il résulte de ce qui a été dit au point 3 que la seule circonstance que la requérante a exprimé sa volonté de cesser ses fonctions par un courriel, et non par lettre recommandée comme le prévoient les dispositions citées au point 2, ne saurait permettre de regarder cette démission comme n'étant pas valable. Par suite, le moyen tiré de ce que, faute d'avoir été présentée par lettre recommandée, la démission de Mme D... épouse E... n'aurait pas été valable et ne pouvait donc légalement permettre à l'administration de constater qu'il avait été mis fin à ses fonctions, doit en tout état de cause être écarté.
6. D'autre part, si la requérante fait valoir que ce courriel a été rédigé sous le coup d'une émotion violente et passagère, il ressort des pièces du dossier qu'elle n'a repris contact avec l'administration que le 23 septembre 2015 en produisant un avis d'arrêt de travail, alors même que le recteur de l'académie de Versailles l'avait mise en demeure, le 7 septembre précédent, de rejoindre son poste sans délai, sous peine d'être licenciée pour abandon de poste. A cet égard, la circonstance que l'administration n'a pas donné suite à cette mise en demeure et n'a engagé aucune procédure de licenciement n'est pas de nature à établir que les relations contractuelles n'avaient pas cessé. Dans ces conditions, Mme D... épouse E... doit être regardée comme ayant mis fin, de façon expresse et non équivoque, à sa relation de travail avec l'administration, alors même que cette décision aurait été prise à la suite de nombreuses difficultés avec la direction de son établissement. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le recteur de l'académie de Versailles aurait entaché sa décision d'excès de pouvoir en refusant de la réintégrer.
7. Il résulte de ce qui précède que Mme D... épouse E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté ses conclusions à fin d'annulation.
Sur les conclusions indemnitaires :
8. Il résulte de ce qui précède qu'en refusant de réintégrer Mme D... épouse E..., le rectorat de l'académie de Versailles n'a commis aucune faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat. Par suite, les conclusions indemnitaires de la requérante doivent être rejetées.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... épouse E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses conclusions indemnitaires.
Sur les frais liés à l'instance :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par Mme D... épouse E... et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête présentée par Mme D... épouse E... est rejetée.
N° 18VE03061 2