Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 19 mars 2015, la société VILMA et la société MAGAUD, représentées par Me Bineteau, avocat, demandent à la Cour :
1° d'annuler cette ordonnance ;
2° de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif ou, à titre subsidiaire, si la Cour décidait d'évoquer, d'annuler, pour excès de pourvoir, ces deux décisions ;
3° de mettre à la charge de la communauté d'agglomération du Val d'Orge et de la société d'économie mixte du Val d'Orge le versement, chacune, de la somme de 6 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- l'ordonnance attaquée est entachée d'irrégularité dès lors que l'incompétence de la juridiction administrative n'étant pas manifeste, le premier juge, qui a relevé d'office ce moyen, aurait dû, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, en informer les parties et les inviter à présenter leurs observations ;
- si la Cour annule cette ordonnance et pour une bonne administration de la justice ainsi que dans le souci d'assurer le respect du double degré de juridiction, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif ;
- c'est à tort que le premier juge a estimé que la juridiction administrative n'était pas compétente pour connaître du présent litige ; d'une part, les décisions attaquées constituent des décisions administratives relevant de la compétence du juge administratif ; en effet, il ressort du cahier des charges - règlement de la consultation que le véritable décisionnaire est la communauté d'agglomération du Val d'Orge, qui apparaît comme étant le pouvoir adjudicateur et dont le contrat répond en réalité à ses propres besoins d'aménagement de l'agglomération ; d'autre part, il ressort également des éléments du dossier que la société d'économie mixte du Val d'Orge a agi au nom et pour le compte de la communauté d'agglomération du Val d'Orge, en tant que mandataire ;
- c'est irrégulièrement que la communauté d'agglomération du Val d'Orge et la société d'économie mixte du Val d'Orge n'ont pas mis en oeuvre de procédure formalisée pour sélectionner l'opérateur alors que cette société d'économie mixte est soumise aux dispositions de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 et du titre III du décret n° 2005-1742 du 30 décembre 2005 ; le contrat en litige, conclu à titre onéreux pour répondre aux besoins de la communauté d'agglomération en matière d'aménagement de la partie commerciale de la zone d'aménagement concerté, constitue un marché public au sens de cette ordonnance ; en tout état de cause, il résulte de l'article R. 300-12 du code de l'urbanisme que la société d'économie mixte, en sa qualité de concessionnaire d'aménagement, devait se soumettre au titre III de ce décret ; compte tenu du montant du contrat en cause, il appartenait à la communauté d'agglomération et à la société d'économie mixte de mettre en oeuvre une procédure formalisée en vue de son attribution ;
- c'est irrégulièrement qu'elles ont restreint à quatre le nombre de candidats admis à présenter une offre, en méconnaissance des dispositions de l'article 23 du décret n° 2005-1742 du 30 décembre 2005 ;
- c'est irrégulièrement qu'elles n'ont procédé à aucune mesure de publicité, en méconnaissance des dispositions des articles 10 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 et 16 du décret n° 2005-1742 du 30 décembre 2005 ou, en tout état de cause, de l'article R. 300-13 du code de l'urbanisme ;
- elles ont commis plusieurs irrégularités en rejetant l'offre du groupement auquel les exposantes appartenaient ; en effet, ni la décision de rejet de leur offre, ni la note qui lui est jointe ne comportent, hormis le nom de l'attributaire, l'ensemble des informations requises par les dispositions de l'article 46 du décret n° 2005-1742 du 30 décembre 2005 ;
- elles ont violé le principe communautaire de transparence ainsi que les obligations de publicité et de mise en concurrence résultant des principes généraux de la commande publique ;
- elles ont violé les principes d'impartialité et d'égalité de traitement ; en effet, l'offre de l'attributaire présente de nombreuses insuffisances et imprécisions et est non-conforme à l'article 2.2. du cahier des charges - règlement de la consultation ; en outre, en ne mettant pas en oeuvre de procédure formalisée, la communauté d'agglomération du Val d'Orge et la société d'économie mixte du Val d'Orge ont eu l'intention manifeste de favoriser la compagnie de Phalsbourg qui restructure depuis 1998 la zone d'aménagement concerté de la Croix Blanche voisine.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. d'Haëm,
- les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., pour les sociétés VILMA et MAGAUD, et celles de Me B..., pour la communauté d'agglomération du Val d'Orge et la société d'économie mixte du Val d'Orge.
Vu la note en délibéré, enregistrée le 21 mars 2017, présentée pour les sociétés VILMA et MAGAUD.
1. Considérant que, par une délibération du 30 mars 2011, la communauté d'agglomération du Val d'Orge a décidé de créer une zone d'aménagement concerté sur le site dit " Val Vert - Croix Blanche " ; qu'en application des articles L. 300-4 et L. 300-5 du code de l'urbanisme alors en vigueur, elle a conclu le 24 octobre 2011 avec la société d'économie mixte du Val d'Orge (SORGEM) un traité de concession d'aménagement pour une durée de douze ans en vue de réaliser l'aménagement de cette zone ; qu'à la suite de l'engagement, au mois de juin 2013, d'une procédure de consultation de quatre opérateurs en vue de la cession par la SORGEM d'une emprise foncière d'environ 15,8 hectares pour la réalisation et la commercialisation d'un ensemble immobilier commercial de 85 000 m2 de surface de plancher, deux offres ont été présentées, l'une par la compagnie de Phalsbourg, l'autre par un groupement comprenant notamment la société VILMA et la société MAGAUD ; que, par un courrier du 21 mars 2014, le président-directeur général de la SORGEM a informé le mandataire de ce groupement que son offre n'avait pas été retenue et que la compagnie de Phalsbourg avait été désignée lauréate de la consultation ; que la société VILMA et la société MAGAUD relèvent appel de l'ordonnance du 31 décembre 2014 par laquelle le président de la 2ème chambre du Tribunal administratif de Versailles a, sur le fondement des dispositions du 2° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, rejeté comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître leur demande tendant à l'annulation de la décision rejetant l'offre du groupement auquel elles appartenaient et de la décision désignant la compagnie de Phalsbourg comme lauréate de la consultation ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'ordonnance attaquée :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : / (...) 2° Rejeter les requêtes ne relevant manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative (...). " ; qu'aux termes de l'article R. 611-7 du même code : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement ou, au Conseil d'Etat, la chambre chargée de l'instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué. / Les dispositions du présent article ne sont pas applicables lorsqu'il est fait application des dispositions des articles R. 122-12, R. 222-1, R. 611-8 ou L. 822-1. " ;
3. Considérant, d'une part, que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ne ressort pas des pièces du dossier que les deux décisions en litige auraient été prises conjointement par le président de la communauté d'agglomération du Val d'Orge, personne morale de droit public, et par le président-directeur général de la SORGEM, personne morale de droit privé ; qu'en particulier, si le courrier du 21 mars 2014, mentionné au point 1 et revêtu de la seule signature du président-directeur général de la SORGEM, mentionne que " de concert avec le président de la communauté d'agglomération du Val d'Orge ", la décision a été prise de ne pas retenir l'offre du groupement auquel appartenaient la société VILMA et la société MAGAUD, il ressort des pièces du dossier et, notamment, des dispositions du 4.4.2. du cahier des charges - règlement de la consultation que le président de la communauté d'agglomération du Val d'Orge devait être saisi par la SORGEM, pour avis, des offres présentées lors de la procédure de consultation, avis qui a d'ailleurs été recueilli au cours d'une réunion, le 10 mars 2014, du conseil d'administration de la SORGEM à laquelle a participé le président de cet établissement public en sa qualité de représentant d'un actionnaire de la société d'économie mixte ; qu'ainsi, ni la circonstance que la communauté d'agglomération du Val d'Orge a été associée, à titre consultatif, au choix de l'opérateur en vue de la cession de l'emprise foncière envisagée, ni, par ailleurs, la circonstance que le contrat en vue duquel la procédure de consultation a été engagée répondrait, comme le font valoir les sociétés requérantes, aux propres " besoins " d'aménagement de la communauté d'agglomération ne sauraient permettre de regarder les décisions en litige, prises par le président-directeur général de la SORGEM, personne morale de droit privé, dans le cadre de l'exercice des missions concédées à cette dernière, comme ayant été édictées conjointement avec le représentant de la communauté d'agglomération, personne morale de droit public ;
4. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que le traité de concession d'aménagement conclu le 24 octobre 2011 a pour objet, notamment, de confier à l'aménageur, après acquisition des terrains nécessaires situés dans le périmètre de la zone d'aménagement concerté, d'une part, la réalisation d'infrastructures et d'équipements publics remis dès leur achèvement à la communauté d'agglomération du Val d'Orge ou à d'autres personnes publiques ou concessionnaires de services publics, et, d'autre part, la réalisation de bâtiments à vocation commerciale destinés à la vente ou à la location au profit du concessionnaire ; qu'ainsi, cette convention n'a pas comme seul objet de faire réaliser pour le compte de la communauté d'agglomération des ouvrages destinés à lui être remis dès leur achèvement ou leur réception ; que, par suite, elle ne peut être regardée comme étant un mandat donné par la communauté d'agglomération du Val d'Orge à la SORGEM pour agir en son nom ; que, dès lors et alors même que la communauté d'agglomération a été associée, ainsi qu'il a été dit au point 3, au choix de l'opérateur lors de la procédure de consultation, le contentieux relatif à la passation par la SORGEM, personne morale de droit privé, du contrat en litige portant cession d'une emprise foncière en vue de la réalisation de la partie commerciale de la zone d'aménagement concertée ne relève pas de la compétence du juge administratif ;
5. Considérant qu'il suit de là que l'incompétence de la juridiction administrative pour connaître de la demande de la société VILMA et de la société MAGAUD tendant à l'annulation des deux décisions en litige était manifeste ; qu'en outre, si les sociétés requérantes se prévalent des dispositions précitées de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, il résulte du second alinéa de cet article que ces dispositions ne sont pas applicables lorsqu'il est fait application des dispositions précitées de l'article R. 222-1 du même code ; qu'ainsi, le premier juge a pu, sur le fondement des dispositions précitées du 2° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative et sans entacher son ordonnance d'irrégularité, rejeter cette demande ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner la communication du contrat conclu entre la SORGEM et la compagnie de Phalsbourg, que la société VILMA et la société MAGAUD ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 2ème chambre du Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté d'agglomération Coeur d'Essonne Agglomération, venant aux droits de la communauté d'agglomération du Val d'Orge, et de la SORGEM, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, le versement de la somme que les sociétés VILMA et MAGAUD demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire des sociétés VILMA et MAGAUD la somme de 1 000 euros à verser à la communauté d'agglomération Coeur d'Essonne Agglomération et la somme de 1 000 euros à verser à la SORGEM sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société VILMA et de la société MAGAUD est rejetée.
Article 2 : La société VILMA et la société MAGAUD verseront solidairement la somme de 1 000 euros à la communauté d'agglomération Coeur d'Essonne Agglomération, venant aux droits de la communauté d'agglomération du Val d'Orge, et la somme de 1 000 euros à la SORGEM, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par la communauté d'agglomération Coeur d'Essonne Agglomération, venant aux droits de la communauté d'agglomération du Val d'Orge, et par la SORGEM au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.
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N° 15VE00839