Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 10 décembre 2015, MmeA..., représentée par la Selafa Cabinet Cassel, avocats, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;
3° d'enjoindre au président du centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Île-de-France de lui accorder le bénéfice d'un congé bonifié pour se rendre en Guadeloupe du 19 décembre 2014 au 19 février 2015 ou, à défaut, de réexaminer sa demande, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a considéré qu'elle n'avait pas conservé le centre de ses intérêts moraux et matériels en Guadeloupe ; en effet, elle y est née et y a effectué toute sa scolarité avant de s'établir en métropole en 2000 ; de plus, ses parents résident toujours en Guadeloupe où elle-même détient des avoirs bancaires, où se trouvent également les biens immobiliers familiaux et où elle s'est rendue périodiquement depuis 2000 pour y retrouver sa famille ; par ailleurs, elle a déjà bénéficié d'un congé bonifié en 2011, ce qui constitue un autre élément d'appréciation en sa faveur ; enfin, la circonstance qu'elle ait effectué ses études supérieures, puis exercé son activité professionnelle en métropole ne saurait être retenue à son encontre dès lors que sa venue en métropole a été dictée par les carences universitaires et économiques prévalant en Guadeloupe ; ainsi, en estimant qu'elle n'avait pas conservé le centre de ses intérêts moraux et matériels en Guadeloupe, le président du centre interdépartemental de gestion a entaché la décision attaquée d'une erreur d'appréciation.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 78-399 du 20 mars 1978 ;
- le décret n° 88-168 du 15 février 1988 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. d'Haëm ;
- et les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public.
1. Considérant que, par une décision du 28 avril 2014, le président du centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Île-de-France a rejeté la demande de congé bonifié formulée le 15 novembre 2013 par Mme B...A..., assistante territoriale socio-éducative principale recrutée par ce centre de gestion en 2009, pour se rendre en Guadeloupe du 19 décembre 2014 au 19 février 2015, au motif que l'intéressée n'établissait pas que le centre de ses intérêts matériels et moraux se trouvait dans ce département d'outre-mer ; que Mme A...relève appel du jugement du 16 octobre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 15 février 1988 susvisé pris pour l'application des dispositions du deuxième alinéa du 1° de l'article 57 de la loi susvisée du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Sous réserve des dispositions du présent décret, le régime de congé dont bénéficient les fonctionnaires territoriaux originaires des départements d'outre-mer (...) exerçant en métropole est défini par les dispositions des articles 1er à 11 du décret du 20 mars 1978 susvisé, qui s'appliquent aux fonctionnaires mentionnés au b de l'article 1er dudit décret. " ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 20 mars 1978 susvisé relatif, pour les départements d'outre-mer, à la prise en charge des frais de voyage de congés bonifiés accordés aux magistrats et fonctionnaires civils de l'Etat : " Les dispositions du présent décret s'appliquent (...) aux fonctionnaires relevant du statut général des fonctionnaires de l'Etat qui exercent leurs fonctions : / (...) b) Sur le territoire européen de la France si leur lieu de résidence habituelle est situé dans un département d'outre-mer. " ; qu'aux termes de l'article 3 du même décret : " Le lieu de résidence habituelle est le territoire européen de la France ou le département d'outre-mer où se trouve le centre des intérêts moraux et matériels de l'intéressé. " ; qu'enfin, aux termes de l'article 4 dudit décret : " Les personnels mentionnés à l'article 1er peuvent bénéficier, dans les conditions déterminées par le présent décret, de la prise en charge par l'Etat des frais d'un voyage de congé, dit Congé bonifié (...). " ;
3. Considérant, en premier lieu, que la localisation, en application des dispositions précitées, du centre des intérêts matériels et moraux du fonctionnaire doit être appréciée à la date de la décision prise sur chaque demande d'octroi du congé bonifié ; que, par suite, la circonstance que Mme A...a bénéficié d'un congé bonifié en 2011 est sans incidence sur la légalité de la décision en litige ;
4. Considérant, en second lieu, qu'il résulte des dispositions précitées que, pour apprécier la localisation du centre des intérêts moraux et matériels d'un fonctionnaire, il peut être tenu compte de son lieu de naissance, du lieu où se trouvent sa résidence et celle des membres de sa famille, du lieu où le fonctionnaire est soit propriétaire ou locataire de biens fonciers, soit titulaire de comptes bancaires, de comptes d'épargne ou de comptes postaux, ainsi que d'autres éléments d'appréciation parmi lesquels le lieu du domicile avant l'entrée dans la fonction publique de l'agent, celui où il a réalisé sa scolarité ou ses études, la volonté manifestée par l'agent à l'occasion de ses demandes de mutation et de ses affectations ou la localisation du centre des intérêts moraux et matériels de son conjoint ou partenaire au sein d'un pacte civil de solidarité ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeA..., née le 3 février 1982 en Guadeloupe, est arrivée en métropole le 26 août 2000 et y a effectué ses études supérieures ainsi que l'ensemble de son parcours professionnel, l'intéressée ayant été recrutée en 2004, pour une durée d'un an, par le conseil général des Yvelines en qualité d'assistante territoriale socio-éducative non titulaire, cet engagement ayant été reconduit en 2005, 2006 et 2007, puis, en 2007, en qualité d'assistante territoriale socio-éducative stagiaire et, enfin, titularisée en 2008, avant d'être recrutée en 2009, par voie de mutation, par le centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Île-de-France au sein du service des assistants sociaux et des psychologues du travail ; qu'en 2012, Mme A...a bénéficié d'un avancement au grade d'assistant socio-éducatif principal ; qu'en outre, si l'intéressée a indiqué, dans sa demande de congé bonifié en date du 15 novembre 2013, qu'elle envisageait de solliciter une demande de mutation en Guadeloupe, elle n'a jamais effectué une telle demande avant l'intervention de la décision attaquée en date du 28 avril 2014 et, de plus, s'est présentée, le 10 septembre 2013, au concours interne d'attaché d'administrations parisiennes dont les postes ouverts sont uniquement situés dans la capitale ; que, par ailleurs, la requérante, qui paie l'impôt sur le revenu et est inscrite sur les listes électorales en métropole, s'y est mariée le 31 mai 2008 et a d'ailleurs eu un enfant né le 22 septembre 2014 à Poissy (Yvelines) ; qu'enfin, l'intéressée ne conteste pas sérieusement le fait, relevé par le centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Île-de-France, qu'elle ne s'est rendue, depuis 2004, qu'à trois reprises en Guadeloupe où, au demeurant, elle ne dispose d'aucun bien foncier dont elle serait propriétaire ou locataire ; qu'au surplus, Mme A...ne fournit aucune explication sur le fait que, lors de l'instruction de sa demande de congé bonifié, elle a refusé de fournir l'intégralité du livret de famille de ses parents et le moindre renseignement sur sa fratrie ; que, par suite, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, et alors même que l'intéressée est née en Guadeloupe et y a suivi sa scolarité primaire et secondaire, que ses parents y résident toujours et y possèdent des biens immobiliers et qu'elle allègue y posséder des avoirs bancaires, l'attestation bancaire du mois de novembre 2013 qu'elle fournit et relatif à un compte de dépôt et un livret A ne mentionnant pourtant aucune somme, Mme A...ne saurait être regardée comme ayant conservé en Guadeloupe le centre de ses intérêts moraux et matériels ; qu'elle doit, au contraire, être regardée comme ayant, au sens des dispositions précitées, sa résidence habituelle en métropole ; que, dès lors, en lui refusant, par la décision attaquée du 28 avril 2014, le bénéfice d'un congé bonifié, le président du centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Île-de-France n'a pas commis d'erreur d'appréciation ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Île-de-France, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme A...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de Mme A...une somme de 500 euros à verser au centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Île-de-France sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
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N° 15VE03777