Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 10 décembre 2019 et 30 décembre 2020, M. B..., représenté par Me Coll, avocat, demande à la cour :
1° d'annuler le jugement du tribunal administratif de Versailles ;
2° d'annuler la délibération en date du 24 novembre 2017 du conseil municipal de Torfou approuvant le plan local d'urbanisme de la commune ;
3° de mettre à la charge de la commune de Torfou le versement de la somme de 3 600 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il justifie d'un intérêt pour agir ;
- la délibération attaquée est entachée d'un vice de procédure au regard des dispositions de l'article L.300-2 du code de l'urbanisme, dès lors que les modalités de la concertation déterminées dans la délibération du 4 décembre 2014 n'ont pas été respectées et que cette dernière délibération n'a pas fixé ces modalités de manière suffisamment précise ;
- le dossier d'enquête publique était incomplet au regard des articles L. 123-10 et R. 123-8 du code de l'environnement, dès lors qu'il ne comportait pas d'annexes, d'avis des personnes publiques associées et de notice ;
- la délibération litigieuse est irrégulière au regard des dispositions des articles L. 2121-13 et L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, dès lors que les conseillers municipaux n'ont pas disposé des informations nécessaires leur permettant de délibérer en connaissance de cause et aussi dès lors que la commune ne justifie ni les avoir préalablement suffisamment informés, ni les avoir régulièrement convoqués ;
- elle est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation et de détournement de pouvoir en ce qui concerne le classement en zone constructible de certaines des parcelles ayant appartenu à sa famille, issues de remembrements, et plus particulièrement de la parcelle AB175 constituée des parcelles AB157 et ZD55, notamment en raison d'une fraude au cadastre.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. D...,
- les conclusions de Mme Margerit, rapporteur public,
- et les observations de Me A... pour la commune de Torfou.
Considérant ce qui suit :
1. Par délibération du 4 décembre 2014, le conseil municipal de la commune de Torfou a décidé de procéder à l'élaboration de son plan local d'urbanisme. A l'issue de la concertation, le conseil municipal en a tiré le bilan par délibération du 15 décembre 2016. Par arrêté du 19 avril 2017, le maire a décidé la mise en oeuvre d'une enquête publique, laquelle s'est tenue entre le 9 mai et le 10 juin 2017, aboutissant à un avis favorable du commissaire enquêteur du 4 juillet 2017. Par délibération du 24 novembre 2017, le conseil municipal a adopté son plan local d'urbanisme. M. B... relève appel du jugement n° 1800565 du 14 octobre 2019, par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande d'annulation de cette délibération.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune de Torfou :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 123-6 du code de l'urbanisme, " (...) le plan local d'urbanisme est élaboré à l'initiative et sous la responsabilité de la commune, le cas échéant en collaboration avec l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont elle est membre. La délibération qui prescrit l'élaboration du plan local d'urbanisme et précise les objectifs poursuivis ainsi que les modalités de concertation, conformément à l'article L. 300-2, est notifiée au préfet, au président du conseil régional, au président du conseil général et, le cas échéant, au président de l'établissement public prévu à l'article L. 122-4, ainsi qu'au président de l'autorité compétente en matière d'organisation des transports urbains et, si ce n'est pas la même personne, à celui de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de programme local de l'habitat dont la commune est membre, au syndicat d'agglomération nouvelle et aux représentants des organismes mentionnés à l'article L. 121-4. ( ...) ". Et aux termes de l'article L. 300-2 du même code, " I. - Font l'objet d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées : 1° L'élaboration ou la révision du schéma de cohérence territoriale ou du plan local d'urbanisme ; (...) II. Les objectifs poursuivis et les modalités de la concertation sont précisés par : (...) 2° L'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement public (...). Les modalités de la concertation permettent, pendant une durée suffisante et selon des moyens adaptés au regard de l'importance et des caractéristiques du projet, au public d'accéder aux informations relatives au projet et aux avis requis par les dispositions législatives ou réglementaires applicables et de formuler des observations et propositions qui sont enregistrées et conservées par l'autorité compétente. (...). III. - A l'issue de la concertation, l'autorité mentionnée au II en arrête le bilan. Lorsque le projet fait l'objet d'une enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement, le bilan de la concertation est joint au dossier de l'enquête (...) IV. _ Les documents d'urbanisme et les opérations mentionnées aux I, II et III bis ne sont pas illégaux du seul fait des vices susceptibles d'entacher la concertation, dès lors que les modalités définies au présent article et par la décision ou la délibération prévue au II ont été respectées. Les autorisations d'occuper ou d'utiliser le sol ne sont pas illégales du seul fait des vices susceptibles d'entacher cette délibération ou les modalités de son exécution ".
3. Tout d'abord, la délibération prescrivant l'adoption ou la révision du plan local d'urbanisme qui porte, d'une part, sur les objectifs, au moins dans leurs grandes lignes, poursuivis par la commune en projetant d'élaborer ou de réviser ce document d'urbanisme et, d'autre part, sur les modalités de la concertation avec les habitants et les associations locales, est susceptible de recours devant le juge de l'excès de pouvoir. Il en résulte que le moyen tiré de l'illégalité de cette délibération ne peut, eu égard à l'objet et à la portée de celle-ci, être utilement invoqué contre la délibération approuvant le plan local d'urbanisme. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la délibération du 4 décembre 2014 du conseil municipal de Torfou ne définirait pas avec précision les modalités de la concertation et serait de ce fait illégale est inopérant et ne peut donc être utilement invoqué à l'encontre de la délibération du 24 novembre 2017 approuvant le plan local d'urbanisme de la commune. Par suite, alors qu'au surplus cette délibération fixait avec suffisamment de précision les modalités de la concertation, le moyen doit être écarté.
4. Ensuite, la délibération du 4 décembre 2014 prévoyait différentes modalités de concertation, à savoir la mise à disposition d'un dossier d'étude aux heures d'ouverture en mairie, avec un registre pour recueillir les observations, la diffusion dans tous les foyers de notes d'information, l'information des habitants par le bulletin municipal, la constitution d'un groupe de travail composé d'élus et d'habitants et l'organisation d'au moins une réunion publique. Or, il ressort des pièces du dossier que la collectivité a diffusé des informations relatives au plan local d'urbanisme au habitants dans des bulletins municipaux et cela dès le mois de décembre 2014, ainsi que sur le site internet de la ville. Elle justifie également avoir tenu un registre ayant donné lieu à des remarques d'habitants, enregistrées entre le 17 janvier 2015 et le 4 décembre 2016 et avoir tenu un dossier d'étude à disposition du public lors de permanences du commissaire-enquêteur. Enfin, la collectivité a, par ailleurs, créé une commission communale à laquelle les habitants de la commune ont été invités à participer et qui s'est réunie les 11 avril, 30 mai, 27 juin, 5 septembre, 3 octobre et 7 novembre 2015 et démontre avoir organisé une réunion publique d'information le 16 avril 2016. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que les modalités de la concertation n'auraient pas été respectées, dès lors que le public n'aurait pu s'exprimer et n'aurait pas été bénéficiaire des informations afférentes au projet, ou d'un accès à celles-ci.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 123-10 du code de l'urbanisme, " Le projet de plan local d'urbanisme arrêté est soumis à enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement par le président de l'établissement public de coopération intercommunale ou, dans le cas prévu par le deuxième alinéa de l'article L. 123-6, le maire. Le dossier soumis à l'enquête comprend, en annexe, les avis recueillis en application des articles L. 121-5, L. 123-8, L. 123-9, et, le cas échéant, du premier alinéa de l'article L. 123-6. Après l'enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement, les avis qui ont été joints au dossier, les observations du public et le rapport du commissaire ou de la commission d'enquête sont présentés lors d'une conférence intercommunale rassemblant les maires des communes membres de l'établissement public de coopération intercommunale. (...) ". Et aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'environnement, " Le dossier soumis à l'enquête publique comprend les pièces et avis exigés par les législations et réglementations applicables au projet, plan ou programme. Le dossier comprend au moins : (...) ; 2° En l'absence d'étude d'impact ou d'évaluation environnementale, une note de présentation précisant les coordonnées du maître d'ouvrage ou du responsable du projet, plan ou programme, l'objet de l'enquête, les caractéristiques les plus importantes du projet, plan ou programme et présentant un résumé des principales raisons pour lesquelles, notamment du point de vue de l'environnement, le projet, plan ou programme soumis à enquête a été retenu ; 3° La mention des textes qui régissent l'enquête publique en cause et l'indication de la façon dont cette enquête s'insère dans la procédure administrative relative au projet, plan ou programme considéré, ainsi que la ou les décisions pouvant être adoptées au terme de l'enquête et les autorités compétentes pour prendre la décision d'autorisation ou d'approbation (...) ".
6. M. B... fait grief au dossier d'enquête publique de ne pas avoir comporté d'annexes, d'avis des personnes publiques associées et de notice explicative. Toutefois, il ressort du rapport d'enquête publique que ce dossier était composé, d'une part, des pièces administratives, à savoir la décision du président du tribunal administratif de Versailles en date du 17 mars 2017 désignant le commissaire enquêteur, l'arrêté du maire de Torfou prescrivant l'enquête publique et ses modalités en date du 19 avril 2017, le porté à la connaissance des personnes publiques associées, la délibération n° 2016-28 en date du 15 décembre 2016 tirant le bilan de la concertation et décidant d'arrêter le projet de plan local d'urbanisme, la délibération n° 2016-27 du 15 décembre 2016 décidant d'appliquer au plan local d'urbanisme de Torfou en cours d'élaboration le contenu modernisé du plan local d'urbanisme, le dossier des annonces parues dans les journaux et, d'autre part, d'un dossier technique composé de pièces techniques, à savoir le rapport de présentation, le PADD, les OAP, les documents graphiques du règlement, ainsi que les documents contenant les réponses apportées par la mairie aux observations des personnes publiques associées. En outre, ces derniers documents de réponses étaient, ainsi que les avis des personnes publiques associées, mentionnés en annexe, et également consultables, par ce biais, sur le site de la commune. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le dossier d'enquête publique ne comportait pas d'annexes et les avis des personnes publiques associées. En outre, l'absence de note de présentation n'a pas été, dans les circonstances de l'espèce, de nature à influer sur l'information et la consultation du public eu égard aux informations contenues dans les dossier administratif et technique. Par suite, le moyen doit être écarté.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales, " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est adressée par écrit, au domicile des conseillers municipaux ou, s'ils en font la demande, envoyée à une autre adresse ou transmise de manière dématérialisée ". Aux termes de l'article L. 2121-11 du même code, " Dans les communes de moins de 3 500 habitants, la convocation est adressée trois jours francs au moins avant celui de la réunion. En cas d'urgence, le délai peut être abrégé par le maire, sans pouvoir être toutefois inférieur à un jour franc. Le maire en rend compte dès l'ouverture de la séance au conseil municipal qui se prononce sur l'urgence et peut décider le renvoi de la discussion, pour tout ou partie, à l'ordre du jour d'une séance ultérieure. " et aux termes de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales, " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération. ".
8. M. B... soutient que la délibération litigieuse est irrégulière au regard des dispositions des articles L. 2121-13 et L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, dès lors que les conseillers municipaux n'ont pas disposé des informations nécessaires leur permettant de délibérer en connaissance de cause, que la commune ne justifie ni les avoir préalablement suffisamment informés, ni de la régularité des convocations des élus. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que les élus communaux ont été régulièrement convoqués les 9 et 10 novembre, pour le conseil municipal du 24 novembre, en ayant accès aux documents relatifs au plan local d'urbanisme. En outre, ceux-ci ont déjà débattu sur ce plan local d'urbanisme, lors des conseils municipaux des 24 mars, 19 mai et 15 décembre 2016 et ont également participé à la commission communale et à la réunion publique qui s'est tenue le 10 février 2016. Par suite, le moyen doit être écarté.
9. En quatrième lieu, il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
10. M. B... conteste le classement en zone constructible de certaines des parcelles ayant appartenu à sa famille, issues de remembrements, et plus particulièrement de la parcelle AB175 constituée des parcelles AB157 et ZD55. Il fait valoir que la commune aurait commis une fraude au cadastre, qui avait permis la délivrance de permis de construire sur ce secteur et qu'ainsi le plan local d'urbanisme viserait à masquer ces irrégularités en favorisant le mitage. Toutefois le cadastre est un document administratif qui vise à recenser et à identifier les immeubles en vue de l'établissement des bases des impôts locaux et n'a, ainsi, pas vocation à garantir un droit de propriété ou avoir une incidence sur les règles d'urbanisme. Ainsi, si M. B... soutient que ce classement procèderait d'une fraude ou d'une erreur au cadastre, cette circonstance, au demeurant non établie, est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée. En outre, il ressort des pièces du dossier que la parcelle litigieuse qui n'était, au demeurant, pas classée en zone naturelle mais en zone à urbaniser, accueille une maison d'habitation d'une surface hors d'oeuvre de 140 m² autorisée par un permis de construire délivré le 18 juin 1999 et qui a fait lui-même suite à une autorisation de lotir accordée en 1994 et mise en oeuvre en 1996. Dans ces conditions, l'autorité administrative pouvait, sans commettre d'erreur de droit, ni d'erreur manifeste d'appréciation, classer la parcelle litigieuse en zone UB, dès lors qu'elle était déjà urbanisée. Par ailleurs, M. B... ne démontre pas que le classement de cette seule parcelle favoriserait le mitage. Enfin, il ne résulte d'aucune pièce du dossier que ce classement résulterait d'un détournement de pouvoir. Dans ces conditions, ces moyens doivent être écartés.
11. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté ses conclusions à fin d'annulation.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
13. La commune de Torfou n'étant pas la partie perdante, les conclusions de M. B... tendant à mettre à sa charge une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme de 1 000 euros en application de ces dispositions.
Sur les conclusions de la commune de Torfou relatives à l'amende pour recours abusif :
14. Aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros ". La faculté prévue par ces dispositions constituant un pouvoir du juge, les conclusions de la commune de Torfou tendant à ce que M. B... soit condamné à une telle amende ne sont pas recevables.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera à la commune de Torfou la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Torfou sur le fondement de l'article R. 741-12 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 19VE04269