Procédure devant la Cour :
Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 6 novembre 2017
et 15 mars 2018, M.B..., représenté par Me Lamine, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement, ensemble l'arrêté contesté du 13 septembre 2016 ;
2° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 20 euros par jour de retard ;
3° de mettre à la charge de l'Etat le versement, au profit de Me Lamine, d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
M. B...soutient que :
- le refus de titre contesté est insuffisamment motivé quant au refus de délivrance d'un titre " salarié " par application de l'article 3 de l'accord franco-marocain ou à titre de régularisation et est, en outre, entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- en n'examinant pas le bien-fondé de sa demande de titre " salarié " sur le fondement du pouvoir général de régularisation du préfet, fondement qu'ils ont eux-mêmes substitué à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et en se bornant à évoquer, sur ce point, sa situation personnelle et familiale, les premiers juges ont entaché le jugement attaqué d'une insuffisance de motivation et d'une contradiction de motifs ;
- contrairement à ce qu'ont retenu l'administration et les premiers juges, il se prévalait de motifs exceptionnels justifiant la régularisation de son séjour par la délivrance d'un titre " salarié " ;
- le refus de titre contesté, sur le volet " salarié ", méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le refus de titre contesté, sur le volet " vie privée et familiale ", méconnaît l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Toutain a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.B..., ressortissant marocain né le 1er janvier 1983, a sollicité son admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêté du 13 septembre 2016, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande, a fait obligation à l'intéressé de quitter le territoire français, dans un délai de départ volontaire de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à la frontière à l'expiration de ce délai ; que, par jugement n° 1610109 du 7 mars 2017, dont M. B...relève appel, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'après avoir rappelé les motifs de droit pour lesquels le préfet de la Seine-Saint-Denis ne pouvait, par son arrêté du 13 septembre 2016, rejeter la demande de régularisation par le travail présentée par M. B...en se fondant sur les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui sont, s'agissant de la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ", inapplicables aux ressortissants marocains, puis avoir substitué d'office à ces dispositions le pouvoir général de régularisation dont dispose, même sans texte, l'autorité administrative, le jugement attaqué précise, à son point 6, les motifs de fait, propres à la situation professionnelle du requérant, sur lesquels le Tribunal administratif de Montreuil s'est appuyé pour confirmer, sur ce dernier fondement, la légalité du refus de titre contesté ; qu'ainsi, et contrairement à ce que soutient M. B..., ce jugement est suffisamment motivé et n'est entaché d'aucune contradiction de motifs ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier et, en particulier, de la demande de titre présentée par M. B...le 30 mars 2016, que ce dernier avait uniquement sollicité son admission exceptionnelle au séjour, et non la délivrance d'une carte portant la mention " salarié " sur le fondement spécifique de l'article 3 de l'accord
franco-marocain du 9 octobre 1987 ; que, même si l'arrêté contesté du 13 septembre 2016 vise notamment ces dernières stipulations, le préfet de la Seine-Saint-Denis ne peut être regardé comme ayant, ce faisant, entendu en examiner d'office l'application au cas d'espèce ; que, par ailleurs, cet arrêté indique, avec une précision suffisante, les motifs de droit et de fait sur lesquels le préfet s'est fondé pour rejeter la demande de régularisation par le travail dont le requérant l'avait saisi ; que ce dernier n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que le refus de titre contesté serait insuffisamment motivé ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'eu égard aux termes de l'arrêté contesté du 13 septembre 2016, dont les motifs de fait comportent divers éléments propres à la situation personnelle, familiale et professionnelle de M.B..., manque en fait le moyen tiré de ce que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'aurait pas procédé à l'examen particulier de la situation de l'intéressé ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 9 de l'accord
franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) " ; que l'article 3 du même accord stipule que : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention "salarié" (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir (...) " ; que, portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée ; que, dès lors que l'article 3 de l'accord
franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord ; que, toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié ;
6. Considérant, d'une part, qu'eu égard aux motifs exposés au point 5, M. B...ne peut utilement soutenir qu'en refusant de lui délivrer, à titre de régularisation, une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant, d'autre part, qu'à l'appui de sa demande de régularisation en qualité de salarié, M. B...se prévaut de ce qu'il réside habituellement en France depuis le mois de mai 2013, soit depuis plus de trois ans à la date de l'arrêté contesté du 13 septembre 2016, et de ce qu'il est employé, depuis mai 2015, comme plombier au sein de la société Bâtiments Prestations Services, emploi pour lequel il avait obtenu au Maroc, en 2001, un certificat de qualification professionnelle ; que, toutefois, ces circonstances ne permettent pas à elles seules, compte tenu notamment du caractère encore récent du séjour du requérant sur le territoire, d'établir que le refus de régularisation contesté serait, en son volet " salarié ", entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
8. Considérant qu'aux termes, d'une part, de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes, d'autre part, de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ;
9. Considérant que, si M. B...se prévaut de ce qu'il réside habituellement en France depuis le mois de mai 2013, soit depuis plus de trois ans à la date de l'arrêté contesté du 13 septembre 2016, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, âgé de 33 ans à la même date, est célibataire et sans enfant ; que, par ailleurs, il n'établit, ni même n'allègue, que d'autres membres de sa famille séjourneraient régulièrement sur le territoire français ; qu'enfin, il n'est pas contesté que le requérant conserve des attaches personnelles et familiales au Maroc, pays dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de 30 ans et où réside notamment sa mère ; que, dans ces conditions, en refusant de délivrer à M.B..., à titre de régularisation, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", le préfet de la Seine-Saint-Denis ne peut être regardé comme ayant porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis par cette mesure ; que doivent, dès lors, être écartés les moyens tirés de ce que le refus de titre contesté méconnaîtrait les stipulations précitées de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et de ce que cette décision serait, en outre, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté contesté du 13 septembre 2016 ; qu'en conséquence, ne peuvent qu'être également rejetées les conclusions, présentées par le requérant devant la Cour, aux fins d'injonction, d'astreinte et d'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
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N° 17VE03253