Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 3 février 2016, MmeA..., représentée par Me Levy, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 10 septembre 2015 ;
3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa situation après l'avoir soumise à la commission du titre de séjour, dans le délai de trois mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;
4° de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme A...soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour a été prise par un auteur incompétent ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle a été prise au terme d'une procédure irrégulière au regard de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;
- elle a été prise en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;
- elle a été prise en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision faisant obligation de quitter le territoire est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle a été prise en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de destination a été prise par un auteur incompétent ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;
- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis médicaux rendus par les agences régionales de santé en application des dispositions de l'article R. 313--22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Campoy a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que MmeA..., ressortissante brésilienne née le
2 octobre 1963, est entrée irrégulièrement en France le 18 février 2010 ; que le 5 mai 2014, elle a sollicité du préfet de la Seine-Saint-Denis, la délivrance d'un titre de séjour afin de recevoir des soins médicaux sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté attaqué du
10 septembre 2015, le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel l'intéressée était susceptible d'être éloignée à l'expiration de ce délai ; que Mme A...relève appel du jugement du 21 janvier 2016 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le signataire de l'arrêté attaqué bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 31 janvier 2014, régulièrement publiée au bulletin d'informations administratives le même jour, à l'effet, notamment, de signer les décisions de refus de séjour, les obligations de quitter le territoire français et les décisions d'éloignement ; que dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée manque en fait ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté attaqué vise les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions applicables en l'espèce du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il mentionne l'avis du médecin de l'agence régionale de santé d'Ile-de-France relatif à l'état de santé de Mme A...; qu'il relève que l'intéressée ne fait pas état de circonstances exceptionnelles l'empêchant d'avoir accès aux soins dans son pays d'origine ; qu'il rajoute que celle-ci est célibataire et ne se prévaut d'aucune attache familiale en France ; qu'il est, par suite, suffisamment motivé ;
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du 11°de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : " A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...). La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant :/ - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ;/ - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ;/ - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ;/ - la durée prévisible du traitement./ Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays./ Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. (...) " ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision portant refus de séjour litigieuse a été prise après que le médecin de l'agence régionale de santé (ARS)
d'Ile-de-France ait émis, le 26 septembre 2014, un avis indiquant, d'une part, que si l'état de santé de l'intéressée nécessitait une prise en charge médicale et que le défaut de cette prise en charge pouvait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, un traitement approprié à sa pathologie existait dans son pays d'origine, et, d'autre part, que son état de santé lui permettait de voyager sans risque vers son pays d'origine ; que ni l'article 4 de l'arrêté du
9 novembre 2011, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n'imposait au médecin de l'ARS d'émettre une appréciation sur la situation sanitaire générale du pays d'origine de l'intéressée ;
6. Considérant que s'il ressort des pièces du dossier et notamment d'un certificat médical établi en 2014 que la requérante est atteinte d'une pathologie pulmonaire nécessitant une prise en charge médicale importante et souffre d'une insuffisance respiratoire chronique nécessitant un traitement médical permanent, ces différents éléments ne suffisent pas à remettre en cause l'avis du médecin de l'ARS en tant que celui-ci estime que la requérante pouvait disposer d'un traitement approprié à sa pathologie dans son pays d'origine ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis se serait cru lié par cet avis ; qu'ainsi, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que le préfet a méconnu les dispositions du 11°de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de l'admettre au séjour en qualité d'étranger malade ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision attaquée serait entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de Mme A...;
8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit " A l'étranger (...) dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; " ; qu'aux termes du 1. de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) " ;
9. Considérant que Mme A...déclare être entrée en France le 30 mai 2000 et y résider depuis cette date de façon habituelle et continue avec un compagnon de nationalité française depuis le mois de décembre 2000 ; que les différentes justificatifs qu'elle produit n'attestent cependant, dans le meilleur des cas, que d'une présence ponctuelle en France durant l'ensemble de la période concernée ; que seule sa déclaration de revenu de l'année 2014, les courriers de transmission des attestations de bénéfice de l'aide médicale d'Etat ainsi qu'une facture d'électricité établie en mai 2015 mentionnent son nom avec celui de son concubin à une adresse commune ; que les différentes attestations non circonstanciées qu'elle produit ou qui émanent de son compagnon ne suffisent pas à établir l'ancienneté de leur relation de concubinage ; que la requérante ne conteste pas que son fils, majeur, vit toujours au Brésil ; que, dans ces conditions, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que la décision litigieuse porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du 1. de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
10. Considérant, en quatrième et dernier lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour, lorsqu'il envisage de refuser un titre mentionné à cet article, que du cas des étrangers qui remplissent effectivement l'ensemble des conditions de procédure et de fond auxquelles est subordonnée la délivrance d'un tel titre, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent des articles auxquels les dispositions de l'article L. 312-2 renvoient ; que la requérante ne remplit pas les conditions de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11°, ni du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ne justifie pas d'une durée de séjour supérieure à dix ans ; qu'ainsi, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de statuer sur sa demande en vertu des dispositions susmentionnées ;
En ce qui concerne la décision faisant obligation de quitter le territoire français :
11. Considérant qu'aucun des moyens soulevés par Mme A...n'étant de nature à entraîner l'annulation de la décision du préfet lui refusant un titre de séjour, la requérante n'est pas fondée à se prévaloir de l'illégalité de cette décision à l'encontre de celle par laquelle cette même autorité lui a fait obligation de quitter le territoire français ;
12. Considérant qu'il y a lieu de rejeter le moyen tiré de la violation des stipulations du 1. de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi qu'en tout état de cause, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par les mêmes motifs que ceux retenus au point 8 ci-dessus ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
13. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;
14. Considérant que si Mme A...invoque son état de santé, il ne ressort pas des pièces du dossier que le traitement approprié à sa pathologie ne serait pas disponible dans son pays d'origine ; qu'ainsi elle n'est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination aurait été prise en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté litigieux ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter ses conclusions présentée à fins d'injonction et astreinte, ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
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N° 16VE00341