Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 28 octobre 2016, M.C..., représenté par Me Levy, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de réexaminer sa demande après l'avoir soumise à la commission du titre de séjour dans un délai de trois mois à compter de la décision à intervenir ;
4° de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Sur la légalité externe de la décision de refus de titre et de l'obligation de quitter le territoire français :
- le signataire de la décision était incompétent ;
- la décision est insuffisamment motivée ;
- les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont méconnues : inexistence de l'avis médical, contenu de 1'avis médical, et incompétence du signataire de l'avis médical ;
- la commission du titre de séjour, prévue à l'article L.312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile devait être saisie ;
Sur la légalité interne de la décision de refus de titre :
- la décision est entachée d'une erreur de droit quant à l'application de l'article
L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 313-11 7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur la légalité interne de l'obligation de quitter le territoire :
- l'exception d'illégalité de la décision du refus de séjour ;
- la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 313-11 7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur la légalité externe de la décision fixant le pays de destination :
- l'incompétence du signataire de la décision ;
- l'insuffisante motivation de la décision ;
Sur la légalité interne de la décision fixant le pays de destination
- la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience dans la présente instance.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Rollet-Perraud a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.C..., ressortissant de la République du Congo né le 25 mars 1975, relève appel du jugement en date du 13 octobre 2016 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du
30 novembre 2015 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;
2. Considérant que Mme B...A..., directrice de l'immigration et de l'intégration à la préfecture de l'Essonne, a reçu, par arrêté préfectoral du 31 août 2015 régulièrement publié au recueil des actes administratifs n°084 du même jour, délégation de signature aux fins de signer les décisions contestées ;
Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
3. Considérant que la décision litigieuse précise les considérations de fait et de droit qui la fondent, permettant à l'intéressé d'en contester utilement les motifs ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du refus de titre de séjour manque en fait ;
4. Considérant que le préfet de l'Essonne a produit en première instance puis en appel l'avis du médecin de l'agence régionale de santé d'Ile-de-France du 6 juillet 2015 ; que cet avis a été signé par le docteur Christiane Bruel, médecin de l'agence qui a reçu délégation pour ce faire par une décision du 22 décembre 2014 du directeur général de l'agence régionale de santé
d'Ile-de-France ; que cet avis comporte les mentions requises par les dispositions du 4 de l'article de l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ;
6. Considérant que M. C...fait valoir que son état de santé justifie la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que, pour prendre la décision attaquée, le préfet de l'Essonne s'est notamment fondé sur l'avis émis le 6 juillet 2015 par le médecin de l'agence régionale de santé d'Ile-de-France, selon lequel si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale, le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner de conséquence d'une exceptionnelle gravité et le traitement approprié à la prise en charge du patient existe dans son pays d'origine ; que l'intéressé produit des certificats médicaux indiquant qu'il souffre d'un syndrome post traumatique à la suite de l'amputation de sa jambe droite secondaire à une blessure par arme à feu lors de la guerre civile dans son pays et qu'il a besoin d'une prise en charge constituée d'une psychothérapie et d'un traitement médicamenteux non en vigueur dans son pays d'origine et dont le défaut l'exposerait à des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que toutefois, ces certificats ne sont pas suffisamment précis et circonstanciés pour remettre en cause l'appréciation ultérieurement émise par le médecin de l'agence régionale de santé s'agissant des conséquences attachées à une absence de soins ; que par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;
7. Considérant qu'il résulte des articles L. 312-1 et L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la commission du titre de séjour instituée dans chaque département est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à ces articles auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; que, dès lors qu'ainsi qu'il a été dit, M. C...ne remplissait pas les conditions lui permettant de bénéficier de plein droit de la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de l'Essonne n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;
8. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
9. Considérant que M. C...se prévaut de sa vie privée et familiale en France ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier que ses deux enfants mineurs, ses quatre soeurs et ses deux frères résident dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 38 ans ; que par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Essonne aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs la décision litigieuse ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
10. Considérant qu'au vu des éléments qui viennent d'être exposés, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Essonne aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du refus de titre de séjour sur la situation personnelle de M. C...doit être écarté ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) " ;
12. Considérant, ainsi qu'il a été dit au point 3, que la décision de refus de titre de séjour comporte les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement ; que, par ailleurs, le préfet de l'Essonne ayant visé l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permet d'assortir un refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire, et M. C...se trouvant dans le cas prévu au 3° du I de cet article, l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre n'avait pas à faire l'objet d'une motivation spécifique en fait ; que, dès lors, ladite décision est suffisamment motivée ;
13. Considérant que dès lors que les moyens d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour sont écartés, MC..., n'est pas fondé à invoquer son illégalité, par voie d'exception, à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
14. Considérant, enfin, que pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 9, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
15. Considérant que le requérant, qui a demandé un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qui ne soutient ni même n'allègue avoir fait état, à cette occasion, de risques de persécutions auxquelles il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine, n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant notamment le pays dont il a la nationalité comme pays de renvoi, qui vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne serait pas suffisamment motivée ;
16. Considérant que le requérant se prévaut de risques de traitements inhumains et dégradants ; que toutefois, l'intéressé, dont la demande d'admission au statut de réfugié a d'ailleurs été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 17 juillet 2014, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 2 février 2015, se borne à produire un extrait des écritures établies dans le cadre de sa demande d'asile ainsi qu'un mémoire rédigé en vue d'un dépôt de plainte auprès des juridictions internationales ; que ces documents ne permettent pas d'établir la réalité des risques qu'il prétend encourir personnellement en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que doivent également être rejetées, en conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
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N° 16VE03156