- le décret contesté porte une atteinte grave et manifestement illégale au principe constitutionnel d'inamovibilité des magistrats du siège, protégé par l'article 64 de la Constitution, et à l'article 6 §1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que le décret contesté procède à une modification de son affectation et des ses attributions, sans qu'aucune sanction de déplacement d'office n'ait été prononcée par le Conseil supérieur de la magistrature.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son article 64 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature ;
- le code de justice administrative ;
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut rejeter une requête par une ordonnance motivée, sans instruction contradictoire ni audience publique, lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. Aux termes de l'article 1-I de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature : " Le corps judiciaire comprend : / 1° Les magistrats du siège et du parquet de la Cour de cassation, des cours d'appel et des tribunaux de première instance ainsi que les magistrats du cadre de l'administration centrale du ministère de la justice ; (...)/ 2° Les magistrats du siège et du parquet placés respectivement auprès du premier président et du procureur général d'une cour d'appel et ayant qualité pour exercer les fonctions du grade auquel ils appartiennent à la cour d'appel à laquelle ils sont rattachés et dans l'ensemble des tribunaux de première instance du ressort de ladite cour ;.... " . L'article 45 de cette ordonnance prévoit : " Les sanctions disciplinaires applicables aux magistrats sont : / 1° Le blâme avec inscription au dossier ; / 2° Le déplacement d'office ; / 3° Le retrait de certaines fonctions ; / 3° bis L'interdiction d'être nommé ou désigné dans des fonctions de juge unique pendant une durée maximum de cinq ans ; / 4° L'abaissement d'échelon ; / 4° bis L'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximum d'un an, avec privation totale ou partielle du traitement ; / 5° La rétrogradation ; / 6° La mise à la retraite d'office ou l'admission à cesser ses fonctions lorsque le magistrat n'a pas le droit à une pension de retraite ; / 7° La révocation ".
3. Il ressort des pièces du dossier que le Conseil supérieur de la magistrature, statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège, a prononcé, le 19 décembre 2014, la sanction de la rétrogradation à l'encontre de M. A... , conseiller à la cour d'appel de Versailles. Cette sanction est devenue définitive à la suite du rejet par le Conseil d'Etat, par une décision du 11 mai 2016, du pourvoi formé par M. A... à son encontre. Par un décret du 23 février 2017, le Président de la République a, au vu de l'avis conforme émis le 2 février 2017 par le Conseil supérieur de la magistrature, nommé M. A... juge placé auprès du premier président de la cour d'appel de Versailles. M. A... a saisi le juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'une demande tendant à la suspension du décret du 23 février 2017. Par une ordonnance n° 408405 en date du 23 mars 2017, le juge des référés a rejeté sa demande pour défaut d'urgence. Il demande la suspension du même décret, cette fois sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative.
4. L'usage par le juge des référés des pouvoirs qu'il tient des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative est subordonné à la condition qu'une urgence particulière rende nécessaire l'intervention dans les quarante-huit heures d'une mesure de sauvegarde d'une liberté fondamentale. Pour justifier l'urgence qui s'attacherait à la suspension du décret contesté, M. A... soutient que l'exécution de celui-ci porte une atteinte grave à ses conditions d'existence, compte tenu de l'importante baisse de rémunération qui en découle pour lui et de l'impossibilité dans laquelle il se trouve de faire face à ses charges fixes mensuelles. L'intéressé fait également valoir que la sanction de rétrogradation prononcée le 19 décembre 2014 n'emporte aucune conséquence financière en l'absence de nomination et d'installation dans un nouveau poste. Toutefois, il résulte de l'instruction que le décret contesté a été pris en conséquence de la décision disciplinaire du 19 décembre 2014, afin de placer M. A... dans des fonctions correspondant à son nouveau grade. Par suite, la baisse des revenus du requérant trouve son origine dans la sanction de rétrogradation prononcée le 19 décembre 2014, soit plus de deux ans avant l'intervention du décret contesté. Il appartenait à M. A... de prendre, pendant ce délai, les dispositions nécessaires pour s'adapter aux conséquences de celle-ci. Dans ces conditions, la requête de M. A... ne justifie d'aucune situation d'urgence qui rendrait nécessaire l'intervention, dans de brefs délais, d'une mesure de la nature de celles qui peuvent être ordonnées sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative.
5. Il résulte de ce qui précède que la requête de M. A... ne peut qu'être rejetée selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative.
------------------
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... et au garde des sceaux, ministre de la justice.