Elles soutiennent que :
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que, en premier lieu, les dispositions contestées sont d'application immédiate, en deuxième lieu, leur entrée en vigueur intervient au milieu de la saison touristique, seule période où elles peuvent réaliser un chiffre d'affaires significatif et, en dernier lieu, elles ne disposent pas d'un téléphone pouvant recevoir l'application gouvernementale et ne peuvent pas, dans un bref délai, s'en procurer un eu égard notamment au prix d'un téléphone adapté ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à plusieurs libertés fondamentales ;
- le décret contesté méconnaît la liberté de conscience, la Charte de l'environnement et les droits des enfants dès lors que la production et l'utilisation des téléphones nécessaires à l'utilisation de l'application mobile pour le contrôle des justificatifs sanitaires ne respecte pas les objectifs de développement durable et l'interdiction du travail des enfants ;
- le décret litigieux méconnaît l'article 8 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 en ce qu'il rend obligatoire la preuve du contrôle du " passe sanitaire " par un téléphone dit intelligent ;
- les dispositions contestées portent atteinte à la liberté individuelle de toute personne de ne pas utiliser une technologie qu'elle désapprouve ;
- la généralisation des contrôles au moyen d'une application mobile méconnaît la liberté du commerce et de l'industrie dès lors que les entreprises avec un faible chiffre d'affaires ne peuvent se procurer un téléphone mobile ou un autre dispositif présentant les mêmes fonctionnalités.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, et notamment son Préambule ;
- la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire ;
- la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire ;
- le décret n° 2021-1059 du 7 août 2021 modifiant le décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 prescrivant les mesures générales nécessaires à la gestion de la sortie de crise sanitaire ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du même code : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. Aux termes du II de l'article 1er de la loi du 31 mai 2021, modifiée par la loi du 5 août 2021, " A compter du 2 juin 2021 et jusqu'au 15 novembre 2021 inclus, le Premier ministre peut, par décret pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, dans l'intérêt de la santé publique et aux seules fins de lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19 : 1° Imposer aux personnes âgées d'au moins douze ans souhaitant se déplacer à destination ou en provenance du territoire hexagonal, de la Corse ou de l'une des collectivités mentionnées à l'article 72-3 de la Constitution, ainsi qu'aux personnels intervenant dans les services de transport concernés, de présenter le résultat d'un examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19, un justificatif de statut vaccinal concernant la covid-19 ou un certificat de rétablissement à la suite d'une contamination par la covid-19 ; / 2° Subordonner à la présentation soit du résultat d'un examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19, soit d'un justificatif de statut vaccinal concernant la covid-19, soit d'un certificat de rétablissement à la suite d'une contamination par la covid-19 l'accès à certains lieux, établissements, services ou évènements où sont exercées les activités suivantes : / a) Les activités de loisirs ; / b) Les activités de restauration commerciale ou de débit de boissons, à l'exception de la restauration collective, de la vente à emporter de plats préparés et de la restauration professionnelle routière et ferroviaire ; / c) Les foires, séminaires et salons professionnels ; / d) Sauf en cas d'urgence, les services et établissements de santé, sociaux et médico-sociaux, pour les seules personnes accompagnant ou rendant visite aux personnes accueillies dans ces services et établissements ainsi que pour celles qui y sont accueillies pour des soins programmés. La personne qui justifie remplir les conditions prévues au présent 2° ne peut se voir imposer d'autres restrictions d'accès liées à l'épidémie de covid-19 pour rendre visite à une personne accueillie et ne peut se voir refuser l'accès à ces services et établissements que pour des motifs tirés des règles de fonctionnement et de sécurité de l'établissement ou du service, y compris de sécurité sanitaire ; / e) Les déplacements de longue distance par transports publics interrégionaux au sein de l'un des territoires mentionnés au 1° du présent A, sauf en cas d'urgence faisant obstacle à l'obtention du justificatif requis ; / f) Sur décision motivée du représentant de l'Etat dans le département, lorsque leurs caractéristiques et la gravité des risques de contamination le justifient, les grands magasins et centres commerciaux, au-delà d'un seuil défini par décret, et dans des conditions garantissant l'accès des personnes aux biens et services de première nécessité ainsi, le cas échéant, qu'aux moyens de transport. / Cette réglementation est rendue applicable au public et, à compter du 30 août 2021, aux personnes qui interviennent dans ces lieux, établissements, services ou évènements lorsque la gravité des risques de contamination en lien avec l'exercice des activités qui y sont pratiquées le justifie, au regard notamment de la densité de population observée ou prévue. / Cette réglementation est applicable aux mineurs de plus de douze ans à compter du 30 septembre 2021. / (...) B.-La présentation du résultat d'un examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19, d'un justificatif de statut vaccinal concernant la covid-19 ou d'un certificat de rétablissement à la suite d'une contamination par la covid-19 dans les cas prévus au A du présent II peut se faire sous format papier ou numérique. / La présentation des documents prévus au premier alinéa du présent B par les personnes mentionnées au 1° du A du présent II est réalisée sous une forme permettant seulement aux personnes ou aux services autorisés à en assurer le contrôle de connaître les données strictement nécessaires à l'exercice de leur contrôle. / La présentation des documents prévus au premier alinéa du présent B par les personnes mentionnées au 2° du A du présent II est réalisée sous une forme ne permettant pas aux personnes ou aux services autorisés à en assurer le contrôle d'en connaître la nature et ne s'accompagne d'une présentation de documents officiels d'identité que lorsque ceux-ci sont exigés par des agents des forces de l'ordre./ (...) D. (...) Lorsque l'exploitant d'un lieu ou d'un établissement ou le professionnel responsable d'un évènement ne contrôle pas la détention, par les personnes qui souhaitent y accéder, des documents mentionnés au 2° du A du présent II, il est mis en demeure par l'autorité administrative, sauf en cas d'urgence ou d'évènement ponctuel, de se conformer aux obligations qui sont applicables à l'accès au lieu, établissement ou évènement concerné. La mise en demeure indique les manquements constatés et fixe un délai, qui ne peut être supérieur à vingt-quatre heures ouvrées, à l'expiration duquel l'exploitant d'un lieu ou établissement ou le professionnel responsable d'un évènement doit se conformer auxdites obligations. Si la mise en demeure est infructueuse, l'autorité administrative peut ordonner la fermeture administrative du lieu, établissement ou évènement concerné pour une durée maximale de sept jours. La mesure de fermeture administrative mentionnée au présent alinéa est levée si l'exploitant du lieu ou établissement ou le professionnel responsable de l'évènement apporte la preuve de la mise en place des dispositions lui permettant de se conformer auxdites obligations. Si un manquement mentionné au présent alinéa est constaté à plus de trois reprises au cours d'une période de quarante-cinq jours, il est puni d'un an d'emprisonnement et de 9 000 € d'amende. " Aux termes du III de l'article 2.3 du décret du 1er juin 2021 dans sa rédaction issue du décret du 7 août 2021, " La lecture des justificatifs par les personnes mentionnées au II est réalisée au moyen d'une application mobile dénommée " TousAntiCovid Vérif ", mise en œuvre par le ministre chargé de la santé (direction générale de la santé). Elle permet à ces personnes de lire les nom, prénoms et date de naissance A... la personne concernée par le justificatif, ainsi qu'un résultat positif ou négatif de détention d'un justificatif conforme, établi conformément aux dispositions de l'article 2-2 ". La SARL Le Poirier-au-Loup, qui exploite une activité de restauration et Mme C..., sa gérante, demandent au Conseil d'Etat, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, de suspendre l'application des dispositions précitées du III de l'article 2.3 du décret du 1er juin 2021 modifié et d'enjoindre au Premier ministre, s'il l'estime nécessaire, de prévoir des modalités de contrôle du " passe sanitaire " ne nécessitant pas l'usage d'une application sur téléphone mobile.
3. En premier lieu, les requérantes ne peuvent utilement soutenir que l'obligation faite par les dispositions litigieuses aux personnes tenues de contrôler les justificatifs sanitaires auxquelles la loi subordonne notamment l'accès aux activités de restauration de réaliser ce contrôle au moyen d'une application mobile nécessitant un appareil connecté à internet en mesure de lire un QR Code méconnaîtrait par elle-même la Charte de l'environnement et les droits des enfants au motif que la production et l'utilisation de ces objets, dont la commercialisation en France est légalement autorisée, ne respecterait pas les objectifs de développement durable et l'interdiction du travail des enfants.
4. En deuxième lieu, si l'obligation, assortie d'une sanction pénale, de réaliser ces contrôles et de le faire au moyen d'une application mobile impose effectivement aux personnes tenues d'opérer ces contrôles l'usage d'un téléphone mobile ou d'un autre dispositif présentant les mêmes fonctionnalités et qu'une telle obligation porte atteinte à la liberté individuelle de toute personne de ne pas utiliser une technologie qu'elle désapprouve, cette atteinte, justifiée par la nécessité de contrôler les justificatifs dans des conditions garantissant à la fois la confidentialité des données médicales et leur authenticité, n'apparaît pas manifestement illégale.
5. En troisième lieu, les requérantes, qui n'établissent pas être dans l'impossibilité financière d'obtenir un appareil disposant des fonctionnalités requises pour contrôler les justificatifs de leurs clients, appareil dont le coût n'est au demeurant pas susceptible de mettre en péril une activité commerciale, aussi peu lucrative soit-elle, ne sont pas fondées à soutenir qu'en prévoyant la réalisation des contrôles au moyen d'une application mobile, les dispositions litigieuses porteraient une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté du commerce et de l'industrie.
6. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la requête de la SARL Le Poirier-au-Loup et de Mme C... ne peut, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la condition d'urgence, qu'être rejetée selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
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Article 1er : la requête de la SARL Le Poirier-au-Loup et de Mme B... C... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la SARL Le Poirier-au-Loup et à Mme B... C....