Elle soutient que :
- la condition d'urgence est satisfaite et qu'il existe un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté contesté ;
- les dispositions des 2ème et 3ème alinéas du paragraphe 4.4.3. de l'annexe I de l'arrêté attaqué sont inintelligibles, ce qui met les professionnels du diagnostic en situation d'incertitude et les expose à des interprétations arbitraires ; elles méconnaissent l'objectif à valeur constitutionnelle d'intelligibilité de la loi ;
- l'inaccessibilité à titre gratuit, pour les professionnels du diagnostic immobilier, des normes rendues d'application obligatoire porte préjudice à ceux-ci au regard du coût pour les acquérir et de l'asymétrie d'information qui en résulte, limitant leur capacité d'action pour obtenir une mise en conformité de l'arrêté ; les restrictions d'accès par l'Association française de normalisation aux normes NF EN ISO/CEI 17024 et NF EN ISO/CEI 17065, ainsi qu'aux normes NF EN ISO/CEI 17000, NF EN ISO/CEI 17020, NF EN ISO/CEI 17021 et NF EN ISO/CEI 17025, méconnaissent l'article 17 du décret du 16 juin 2009 relatif à la normalisation et l'objectif à valeur constitutionnelle d'accessibilité de la loi ;
- l'éviction des partenaires sociaux, notamment l'absence de discussion avec elle, porte atteinte aux intérêts qu'elle défend et à sa crédibilité ainsi qu'à celle de la profession et l'a privée de la possibilité de se faire entendre ; elle est contraire aux obligations d'information et d'association des parties concernées découlant de la directive (UE) 2018/958 du Parlement européen et du Conseil du 28 juin 2018 relative à un contrôle de proportionnalité avant l'adoption d'une nouvelle réglementation de professions ;
- le fait d'imposer des formations et examens " immuables " représente pour les professionnels un stress et une dépense financière inutiles et est dégradant, causant aux intéressés un préjudice moral et financier ; les dispositions des paragraphes 4.3 et 4.5.1 de l'annexe I de l'arrêté contesté, en ce qu'elles sont inutiles, sont prohibées par la jurisprudence et la réglementation européennes et portent atteinte à la dignité des travailleurs garantie par l'article 31 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- l'instauration d'une " veille documentaire " peut entraîner la suspension ou le retrait de la certification des professionnels du diagnostic ; certains des points contrôlés portent sur des éléments ne relevant pas de la norme NF EN ISO/CEI 17024 et n'ont pas lieu d'être, voire sont discriminatoires ; une telle obligation, qui constitue la police d'un régime d'autorisation, ne pouvait être prévue que par le législateur ;
- la réussite au " contrôle sur ouvrage ", instauré par l'arrêté contesté, conditionne la certification des professionnels ; en imposant que le professionnel soit en activité, ce dispositif de contrôle est discriminatoire, ne respecte ni l'article L. 271-6 du code de la construction et de l'habitation ni la norme NF EN ISO/CEI 17024, fait abusivement obstacle à la liberté de travailler garantie par l'article 15 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et est inéquitable ;
- le coût financier excessif de la certification fait baisser l'attractivité du métier, rend plus difficile le recrutement de candidats qualifiés et précarise les professionnels en activité ; il constitue une restriction d'accès à la certification pour raisons financières, prohibée par la norme NF EN ISO/CEI 17024, et n'est ni raisonnable ni proportionné au regard de la jurisprudence européenne.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la directive (UE) 2018/958 du Parlement européen et du Conseil du 28 juin 2018 ;
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le décret n° 2009-697 du 16 juin 2009 ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce.
3. Pour procéder au diagnostic technique prévu par l'article L. 271-6 du code de la construction et de l'habitation en cas de vente de tout ou partie d'un immeuble bâti, l'article R. 271-1 du même code prévoit qu'il " est recouru soit à une personne physique dont les compétences ont été certifiées par un organisme accrédité dans le domaine de la construction, soit à une personne morale employant des salariés ou constituée de personnes physiques qui disposent des compétences certifiées dans les mêmes conditions ", et renvoie à des arrêtés des ministres chargés du logement, de la santé et de l'industrie le soin d'en préciser les modalités d'application. Par un arrêté du 2 juillet 2018, les ministres compétents ont fixé les critères de certification des opérateurs de diagnostic technique immobilier dans les domaines du plomb, de l'amiante, des termites, du gaz, de la performance énergétique et de l'installation intérieure d'électricité et des organismes de formation, ainsi que les critères d'accréditation des organismes de certification et des organismes de formation des opérateurs de diagnostic immobilier. Par une décision n°s 423261, 423897, 423951, 423347 du 7 juillet 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé cet arrêté au motif qu'il rendait d'application obligatoire les normes NF EN ISO/CEI 17024 et NF EN ISO/CEI 17065 sans qu'elles soient gratuitement accessibles, en méconnaissance des exigences posées par l'article 17 du décret du 16 juin 2009 relatif à la normalisation. Il a toutefois différé l'effet de l'annulation jusqu'au 1er janvier 2022. L'association " Les diagnostiqueurs indépendants " demande, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'arrêté du 24 décembre 2021 définissant les critères de certification des opérateurs de diagnostic technique et des organismes de formation et d'accréditation des organismes de certification, qui, relevant que les deux normes précédemment mentionnées seront rendues gratuites à compter de 2022, a notamment pour objet de maintenir les dispositifs de certification prévus par l'arrêté du 2 juillet 2018.
4. Pour justifier de la condition d'urgence, l'organisation requérante fait valoir, de façon générale, le préjudice découlant des potentiels frais d'acquisition de normes utiles pour les professionnels du diagnostic immobilier et des coûts liés au processus de certification, de renouvellement de celle-ci et de contrôle des compétences et soutient qu'ils feraient baisser l'attractivité du métier, rendraient plus difficile le recrutement de candidats qualifiés et précariseraient les professionnels en activité. Toutefois, elle n'apporte pas d'élément suffisamment précis permettant d'apprécier l'impact pour les personnes concernées de l'application de l'arrêté contesté, au-delà de ce qui résultait des précédents arrêtés que celui-ci abroge et qui étaient relatifs à la certification des compétences des personnes physiques dans six domaines du diagnostic immobilier. Les éléments avancés par la requérante ne permettent pas davantage de justifier d'une atteinte suffisamment grave et immédiate aux intérêts qu'elle représente, alors que, d'une part, l'arrêté litigieux a pour objet de maintenir le dispositif de certification s'appliquant depuis plusieurs mois, en assurant, à la suite de la prise d'effet de l'annulation de l'arrêté du 2 juillet 2018, une solution de continuité pour la profession de diagnostiqueur immobilier, pour les organismes de formation et pour le marché immobilier et que, d'autre part, les effets dénoncés s'étalent sur plusieurs années, au cours d'un cycle de certification dont la durée est portée de 5 à 7 ans. La circonstance que la mise en œuvre des procédures de " surveillance documentaire " et de " contrôle sur ouvrage " prévues par l'arrêté litigieux emporte des risques de prononcé de mesures de suspension ou de retrait de certification, alors que de telles mesures étaient déjà envisagées par les règles antérieures, n'est pas non plus de nature à elle seule à constituer une situation d'urgence. Il en va de même du préjudice moral et financier qui résulterait de l'obligation, qualifiée de " dégradante ", de se soumettre à des formations et examens " immuables ", qui occasionneraient pour les professionnels concernés un stress et une dépense financière inutiles.
5. Par ailleurs, la seule invocation d'une incertitude quant à l'interprétation des dispositions de l'arrêté attaqué, relatives aux opérations de surveillance, qui, au demeurant, ne souffrent pas d'imprécisions telles qu'elles en seraient inintelligibles, n'est pas constitutive d'une situation d'urgence. Il en va de même de la mise en cause d'une asymétrie d'information au détriment des professionnels qui verraient limiter leur capacité d'action pour obtenir une mise en conformité de l'arrêté, ainsi que de l'" éviction des partenaires sociaux " et des atteintes en découlant pour la crédibilité de la requérante et de la profession et la possibilité de se faire entendre.
6. Enfin, la circonstance que des moyens tirés de la méconnaissance du droit de l'Union européenne sont invoqués ne suffit pas à elle seule à caractériser une situation d'urgence justifiant, par elle-même, la suspension de la décision contestée.
Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner l'existence d'un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté attaqué, que la condition d'urgence ne peut être regardée comme remplie. Il y a lieu, par suite, de rejeter la requête de l'association " Les diagnostiqueurs indépendants ", y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
------------------
Article 1er : La requête de l'association " Les diagnostiqueurs indépendants " est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à l'association " Les diagnostiqueurs indépendants ".
Copie en sera adressée à la ministre de la transition écologique, à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, au ministre de l'économie, des finances et de la relance et au ministre des solidarités et de la santé.
Fait à Paris, le 11 mars 2022
Signé : Anne Courrèges