Résumé de la décision
Dans cette affaire, plusieurs sociétés ont contesté un arrêté du 8 septembre 2015, qui a fixé à 1 milligramme le seuil en-deçà duquel la mélatonine serait exonérée de la réglementation applicable aux substances vénéneuses. Les requérantes ont demandé l'annulation de cet arrêté, souhaitant que le seuil soit fixé à 2 milligrammes. La décision du tribunal a annulé l'arrêté en question, en se fondant sur le motif que celui-ci constituait une "règle technique" au sens de la directive 98/34/CE, en raison de l'absence de notification à la Commission européenne. En conséquence, un dédommagement de 1 000 euros a été accordé à chacune des sociétés requérantes.
Arguments pertinents
1. Sur le statut de la mélatonine : Le tribunal souligne que la mélatonine est classée comme une substance vénéneuse, et selon l'article L. 5132-1 du code de la santé publique, sous certaines conditions, des exemptions peuvent être accordées pour des médicaments contenant des substances vénéneuses à des doses très faibles. L'arrêté attaqué a exonéré les produits contenant jusqu'à 1 milligramme de mélatonine, alors que les sociétés requérantes soutiennent que ce seuil aurait dû être fixé à 2 milligrammes.
2. Sur la notification à la Commission européenne : La cour a relevé que l'arrêté de classification de la mélatonine du 23 septembre 2011 n’avait pas été notifié en tant que règle technique à la Commission. Cette non-notification a conduit à la conclusion que l’arrêté constituait une règle technique, comme le définit Directive 98/34/CE : "les Etats membres communiquent immédiatement à la Commission tout projet de règle technique".
3. Conclusion sur l'annulation : En raison de la violation des obligations de notification, le tribunal a déclaré que les sociétés requérantes avaient le droit d'obtenir l'annulation de l'arrêté attaqué, et ce sans avoir à examiner les autres moyens de la requête.
Interprétations et citations légales
1. Interprétation de la Directive 98/34/CE : Selon l'article 1er de cette directive, une "règle technique" inclut toutes les exigences dont l'observation est obligatoire, ayant un impact sur la commercialisation de produits. Le tribunal a souligné que l'arrêté attaqué imposait des obligations concernant la délivrance en pharmacie, ce qui en fait une règle technique.
- Directive 98/34/CE - Article 1er, point 11 : Il "définit une 'règle technique' comme 'une spécification technique ou autre exigence (...), dont l'observation est obligatoire de jure ou de facto'" pour la commercialisation de produits.
2. Exonération des substances vénéneuses : La distinction entre les seuils de dosage a été explicitement abordée. L'article R. 5132-2, qui permet des exonérations pour les "médicaments destinés à la médecine humaine", a été un point clé.
- Code de la santé publique - Article L. 5132-1, 4° : "Sont comprises comme substances vénéneuses : (...) Les substances inscrites sur la liste I et la liste II".
3. Droits des requérants : Le tribunal a constaté que par la non-notification de l'arrêté à la Commission, une violation des droits des requérants, entraînant l'annulation de l'arrêté en question.
- Code de la justice administrative - Article L. 761-1 : Le tribunal a ordonné que l'État paie à chaque société requérante une somme de 1 000 euros pour couvrir les frais.
Cette approche permet de saisir l'importance des procédures réglementaires et de notification au sein de la législation européenne et nationale, ainsi que leurs impacts sur le droit à l'accès des acteurs du marché.