2° Sous le n° 398497, par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 4 avril et le 28 juin 2016, le syndicat " Finances centrales écoles " SPACEF CFDT, demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 4 février 2016 portant nomination de M. B...A...en qualité de commissaire à l'information stratégique et à la sécurité économiques à l'administration centrale du ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule ;
- le code de la défense ;
- la loi n° 68-678 du 26 juillet 1968 ;
- la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 ;
- le décret n° 73-276 du 14 mars 1973 ;
- le décret n° 85-779 du 24 juillet 1985 ;
- le décret n° 97-464 du 9 mai 1997 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Philippe Mochon, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray, avocat du syndicat " Finances centrales écoles " SPACEF CFDT.
1. Considérant que le syndicat " Finances centrales écoles " SPACEF CFDT demande, sous le n° 398327, l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 29 janvier 2016 instituant un commissaire à l'information stratégique et à la sécurité économiques et portant création d'un service à compétence nationale dénommé " service de l'information stratégique et de la sécurité économiques ", et, sous le n° 398497, l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 4 février 2017 portant nomination de M. B...A...en qualité de commissaire à l'information stratégique et à la sécurité économiques ; que ces deux requêtes présentent à juger des question semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
En ce qui concerne le décret du 29 janvier 2016 instituant un commissaire à l'information stratégique et à la sécurité économiques et portant création d'un service à compétence nationale dénommé " service de l'information stratégique et de la sécurité économiques " :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-3 du code de la défense : " Le ministre chargé de l'économie est responsable de la préparation et de l'exécution de la politique de sécurité économique. (...) " ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 9 mai 1997 modifié relatif à la création et à l'organisation des services à compétence nationale : " Les services à compétence nationale peuvent se voir confier des fonctions de gestion, d'études techniques ou de formation, des activités de production de biens ou de prestation de services, ainsi que toute autre mission à caractère opérationnel, présentant un caractère national et correspondant aux attributions du ministre sous l'autorité duquel ils sont placés " ; qu'aux termes de l'article 2 du même décret : " Les services à compétence nationale rattachés directement au ministre dont ils relèvent sont créés par décret. / Les services à compétence nationale rattachés à un directeur d'administration centrale, à un chef de service ou à un sous-directeur sont créés par arrêté du ministre dont ils relèvent. Toutefois, ils sont créés par décret lorsqu'ils exercent des compétences par délégation du ministre. / Le décret ou l'arrêté qui porte création du service à compétence nationale fixe les missions et l'organisation générale de celui-ci " ;
4. Considérant qu'il résulte des termes mêmes du décret attaqué que le service à compétence nationale qu'il institue, créé au sein du ministère chargé de l'économie et rattaché au directeur général des entreprises, est placé sous l'autorité du ministre chargé de l'économie ; que la nature des missions confiées à ce service, qui consistent à centraliser des informations stratégiques en matière économique industrielle et scientifique, à concourir à l'élaboration de la position du Gouvernement en matière d'investissements étrangers, à veiller à l'application de la loi du 26 juillet 1968 relative à la communication de documents et renseignements d'ordre économique, commercial, industriel, financier ou technique à des personnes physiques ou morales étrangères, et à veiller à la cohérence des travaux des ministères économiques et financiers dans les domaines relevant de sa compétence n'excèdent pas, contrairement à ce qui est soutenu, compte tenu notamment des termes rappelés ci-dessus de l'article L. 1142-3 du code de la défense, les attributions du ministre chargé de l'économie ; que le syndicat requérant n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que le décret attaqué serait illégal pour ne pas avoir été soumis à la consultation du Conseil d'Etat alors qu'il dérogerait aux dispositions précitées du décret du 9 mai 1997, qui est un décret en Conseil d'Etat ;
5. Considérant qu'il ne résulte pas davantage de la circonstance que le commissaire à l'information stratégique et à la sécurité économiques, qui dirige le service à compétence nationale, assure également le secrétariat du comité directeur, créé par l'article 5 du décret attaqué, lequel est chargé de proposer au Premier ministre les orientations en matière d'information stratégique et de sécurité économique et comprend les représentants des ministères concernés, que le décret attaqué déroge aux dispositions rappelées ci-dessus du décret du 19 mai 1997 ni à aucune autre disposition qui aurait imposé la consultation du Conseil d'Etat ;
6. Considérant que si le syndicat requérant soutient que le décret attaqué aurait dû être soumis à la consultation du Conseil d'Etat eu égard à l'importance des enjeux de protection des intérêts économiques et de sécurité, y compris en termes de traitements de données à caractère personnel, il ne résulte d'aucune disposition ni d'aucun principe que la consultation du Conseil d'Etat soit obligatoire par ce seul motif ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait illégal pour ne pas avoir été adopté après consultation du Conseil d'Etat ne peut qu'être écarté;
8. Considérant qu'en rattachant le service à compétence nationale qu'il institue au directeur général des entreprises et en renvoyant à une convention entre ce directeur général et le commissaire à l'information stratégique et à la sécurité économiques la détermination des modalités de gestion des moyens et des personnels du service, l'auteur du décret attaqué, à qui il appartenait de préciser le rattachement du service à un ministre, à un directeur d'administration centrale, à un chef de service ou à un sous-directeur, n'a méconnu ni l'étendue de sa compétence ni aucune règle ni aucun principe ;
En ce qui concerne le décret du 4 février 2017 portant nomination de M. B... A...en qualité de commissaire à l'information stratégique et à la sécurité économiques :
9. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique : " I. - Adressent également au président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique une déclaration de situation patrimoniale et une déclaration d'intérêts, établies dans les conditions prévues aux quatre premiers alinéas du I et aux II et III de l'article 4, dans les deux mois qui suivent leur entrée en fonctions : / (...) 7° Toute autre personne exerçant un emploi ou des fonctions à la décision du Gouvernement pour lesquels elle a été nommée en conseil des ministres. / Les déclarations d'intérêts des personnes mentionnées aux 4° à 7° sont également adressées au président de l'autorité indépendante ou à l'autorité hiérarchique. / Toute modification substantielle de la situation patrimoniale ou des intérêts détenus donne lieu, dans un délai de deux mois, à une déclaration dans les mêmes formes (...) " ;
10. Considérant que ces dispositions n'imposent la transmission des déclarations qu'elles prévoient que dans les deux mois suivant l'entrée en fonctions des personnes concernées ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait illégal en ce qu'il ne justifie pas de l'accomplissement des obligations qu'elles instituent ne peut qu'être écarté ;
11. Considérant, en deuxième lieu, que, si le requérant soutient qu'il n'est pas justifié de la régularité de la situation de M. A...au regard tant du décret du 14 mars 1973 relatif au statut particulier du corps de l'inspection générale des finances que du décret du 24 juillet 1985 fixant les emplois supérieurs pour lesquels la nomination est laissée à la décision du gouvernement, il n'assortit ce moyen d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien fondé ;
12. Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de ce que le décret portant nomination du commissaire à l'information stratégique et à la sécurité économiques devrait être annulé par voie de conséquence de l'annulation du décret instituant ce commissaire et le service à compétence nationale placé sous sa direction ne peut, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, qu'être écarté ;
13. Considérant, en quatrième lieu, que, si le syndicat requérant invoque la méconnaissance de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, il ne ressort pas des pièces du dossier que la désignation de M. B...A...en qualité de commissaire à l'information stratégique et à la sécurité économiques soit entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation des capacités requises pour l'exercice des fonctions dans lesquelles il est nommé ;
14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le syndicat " Finances centrales écoles " SPACEF CFDT n'est pas fondé à demander l'annulation ni du décret instituant un commissaire à l'information stratégique et à la sécurité économiques et portant création d'un service à compétence nationale dénommé " service de l'information stratégique et de la sécurité économiques ", ni du décret portant nomination de ce commissaire ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par suite, également être rejetées ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les requêtes du syndicat " Finances centrales écoles " SPACEF CFDT sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat " Finances centrales écoles " SPACEF CFDT, au Premier ministre et au ministre de l'économie et des finances.