Ils soutiennent que :
- la condition d'urgence est satisfaite en ce que la fermeture de la galerie marchande leur crée un préjudice économique dès lors que, en premier lieu, alors même que l'hypermarché, qui relève des commerces alimentaires, reste ouvert, il perd la clientèle que lui apportait la fréquentation des boutiques de la galerie marchande, en deuxième lieu, la SAS Agneaux distribution se trouve en grande difficulté pour réclamer aux preneurs le paiement des différents loyers puisque ces derniers ne peuvent réaliser aucun chiffre d'affaires et, en dernier lieu, le GIE Centre commercial Odyssée se trouve pour la même raison en difficulté concernant l'acquittement des charges d'entretien par les différents preneurs ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité des dispositions attaquées car les dispositions litigieuses sont entachées d'une erreur d'appréciation en ce que en intégrant dans le calcul de la surface commerciale utile des surfaces, telles que les réserves, qui ne sont pas affectées à l'accueil du public, elles ne sont ni adaptées ni nécessaires à l'objectif poursuivi de protection de la santé publique.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, et notamment son préambule ;
- le code de santé publique ;
- la loi n° 2021-160 du 15 février 2021 ;
- le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 ;
- le décret n° 2021-99 du 30 janvier 2021 ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation de requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire, à la date à laquelle le juge des référés se prononce.
3. Aux termes de l'article L. 3131-12 du code de la santé publique, issu de la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 : " L'état d'urgence sanitaire peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain ainsi que du territoire des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution et de la Nouvelle-Calédonie en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population ". L'article L. 3131-13 du même code précise que : " L'état d'urgence sanitaire est déclaré par décret en conseil des ministres pris sur le rapport du ministre chargé de la santé. Ce décret motivé détermine la ou les circonscriptions territoriales à l'intérieur desquelles il entre en vigueur et reçoit application. Les données scientifiques disponibles sur la situation sanitaire qui ont motivé la décision sont rendues publiques. / (...) ". Aux termes du I de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique : " Dans les circonscriptions territoriales où l'état d'urgence sanitaire est déclaré, le Premier ministre peut, par décret réglementaire pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, aux seules fins de garantir la santé publique : (...) 5° Ordonner la fermeture provisoire et réglementer l'ouverture, y compris les conditions d'accès et de présence, d'une ou plusieurs catégories d'établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion, en garantissant l'accès des personnes aux biens et services de première nécessité ; (...) 10° En tant que de besoin, prendre par décret toute autre mesure réglementaire limitant la liberté d'entreprendre, dans la seule finalité de mettre fin à la catastrophe sanitaire mentionnée à l'article L. 3131-12 du présent code ". Ces mesures doivent être " strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il y est mis fin sans délai lorsqu'elles ne sont plus nécessaires ".
4. Par un décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020, pris sur le fondement des articles L. 3131-12 et L. 3131-13 du code de la santé publique, le Président de la République a déclaré l'état d'urgence sanitaire à compter du 17 octobre sur l'ensemble du territoire national. Les 16 et 29 octobre 2020, le Premier ministre a pris, sur le fondement de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique, deux décrets prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de Covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire. Aux termes de l'article 2 du décret n° 2021-99 du 30 janvier 2021 modifiant les décrets des 16 et 29 octobre 2020 : " II.- Par dérogation au I, les magasins de vente et centres commerciaux, comportant un ou plusieurs bâtiments dont la surface commerciale utile cumulée calculée dans les conditions du II bis est supérieure ou égale à vingt mille mètres carrés, ne peuvent accueillir du public ". Aux termes du II bis de cet article : " La surface mentionnée au premier alinéa du II est calculée dans les conditions suivantes : " 1° La surface commerciale utile est la surface totale comprenant les surfaces de vente, les bureaux et les réserves, sans déduction de trémie ou poteau et calculée entre les axes des murs mitoyens avec les parties privatives, et les nus extérieurs des murs mitoyens avec les parties communes. La surface est prise en compte indépendamment des interdictions d'accès au public ". Les sociétés requérantes demandent la suspension de ces dispositions en tant qu'elles intègrent les surfaces de réserves pour déterminer le seuil de vingt mille mètres carrés de " surface commerciale utile " à partir duquel les magasins de vente et centres commerciaux ne peuvent accueillir du public.
5. La société Agneaux Distribution exploite un centre commercial comprenant un hypermarché et une galerie marchande sur le territoire de la commune d'Agneaux (Manche), dont la surface commerciale utile au sens des dispositions citées au point précédent est supérieure à 20 000 m². Si elle fait valoir que la fermeture des commerces ne relevant ni de l'alimentation de détail ni de la pharmacie d'officine résultant de l'application de ces dispositions lui cause un préjudice économique dans la mesure où, d'une part, elle a un impact défavorable sur la fréquentation de l'hypermarché et où, d'autre part, elle met en péril le recouvrement des loyers qui lui sont dus par les commerces concernés par la mesure de fermeture, elle ne produit que des éléments comptables lacunaires qui ne permettent pas d'établir que la mesure qu'elle conteste porterait à ses intérêts financiers, pas davantage qu'à ceux du groupement Centre commercial Odyssée, une atteinte suffisamment grave et immédiate pour caractériser une urgence justifiant que l'exécution en soit suspendue sans attendre le jugement de la requête au fond. Il suit de là que la requête ne peut qu'être rejetée selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative.
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de la société Agneaux Distribution et autre est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la Société Agneaux distribution, première requérante dénommée.