Résumé de la décision
Le 15 mars 2020, des élections municipales ont eu lieu dans la commune d'Oisy (Aisne), où M. K... I... et M. K... F... étaient candidats. Après un dépouillement des votes, M. I... a été déclaré élu avec 117 voix, tandis que M. F... a obtenu 102 voix. M. F... a contesté les résultats devant le tribunal administratif d'Amiens, qui a validé sa demande d'annulation des opérations électorales par un jugement du 15 septembre 2020. M. I... a alors interjeté appel, soutenant que la contestation de M. F... était tardive. Le Conseil d'État a rejeté l'appel de M. I..., confirmant que le tribunal administratif n'avait pas commis d'erreur de droit en annulant les élections.Arguments pertinents
1. Tardiveté de la protestation : M. I... soutenait que la protestation de M. F... était tardive selon l'article R. 119 du code électoral. Cependant, le Conseil d'État a précisé que la contestation avait été enregistrée le 23 mars 2020, avant la prise de fonction des conseillers élus : "Les réclamations [...] doivent être déposées, à peine d'irrecevabilité, au plus tard à dix-huit heures le cinquième jour qui suit l'élection". Étant donné que seule une partie des sièges a été pourvue, la prise de fonction devait attendre le second tour.2. Conditions de validité des opérations électorales : Le Conseil d'État a reconnu que des tracts dénigrant M. F... avaient été distribués seulement deux jours avant l'élection, entravant sa capacité à répondre, ce qui justifiait l'annulation des opérations électorales : "Des tracts [...] ont été distribués [...] excluant la possibilité d'y répondre utilement".
Interprétations et citations légales
Les interprétations des textes juridiques dans cette décision se fondent sur la juxtaposition entre le cadre des élections municipales et les dispositions exceptionnelles introduites en raison de la pandémie de COVID-19.1. Code électoral - Article R. 119 : Ce texte régit les délais de dépôt des réclamations concernant les opérations électorales. Le Conseil a stipulé que ces délais étaient modifiés par la législation exceptionnelle en raison de la situation sanitaire, permettant une contestation jusqu'au lendemain de la prise de fonction des conseillers élus.
2. Ordonnance n° 2020-306 - Article 3 : L'ordonnance a permis de modifier les délais de contestation pour les élections du 15 mars 2020. Elle précise que les réclamations peuvent être formées jusqu'à "dix-huit heures le cinquième jour qui suit la date de prise de fonction", établissant ainsi une dérogation aux délais traditionnels.
3. Loi du 23 mars 2020 - Articles 11 et 19 : Cette loi a habilité le Gouvernement à adapter les délais en raison de la crise sanitaire. Les articles cités permettent d'établir des délais spécifiques pour les élections dans les communes de moins de 1 000 habitants, clarifiant ainsi les conditions dans lesquelles les conseillers peuvent entrer en fonction.
En somme, le Conseil d'État a pris en compte les modifications législatives spécifiques introduites par la crise sanitaire pour trancher la question de la tardiveté de la protestation et a également considéré l'impact des actions de campagne sur la validité des élections, établissant ainsi une jurisprudence significative sur la gestion des opérations électorales en période de crise.