Résumé de la décision :
Mme A..., ressortissante tunisienne, a obtenu la nationalité française par décret du 20 octobre 2017 en déclarant être célibataire. Cependant, après une enquête, il a été révélé qu'elle s'était mariée le 22 juillet 2017, soit après sa naturalisation. En réponse à cette information, le Premier ministre a rapporté son décret de naturalisation le 14 avril 2020 en fondant ce retrait sur le mensonge concernant sa situation familiale. Mme A... a contesté cette décision en demandant son annulation pour excès de pouvoir. Le Conseil d'État a confirmé la légalité du rapport de naturalisation, considérant que Mme A... avait volontairement dissimulé son mariage et que le délai de deux ans pour rapporter le décret n'avait pas été dépassé.
Arguments pertinents :
1. Délai de rapport du décret : Le Conseil d'État a établi que le délai de deux ans pour rapporter un décret de naturalisation court à partir de la découverte de la fraude, c'est-à-dire le moment où la réalité de la situation familiale a été portée à la connaissance des autorités. En l'occurrence, ce délai avait commencé à courir le 16 avril 2018 lorsque le ministre chargé des naturalisations a été informé du mariage de Mme A.... Cela signifie que le rapport du décret en avril 2020 était donc valide et dans le cadre légal.
2. Dispositions sur la résidence : Le Conseil d'État a rappelé que, selon le Code civil - Article 21-16, une personne ne peut être naturalisée si elle n'établit pas sa résidence en France au moment de la naturalisation. Mme A... a dissimulé son mariage avec un ressortissant tunisien vivant à l'étranger qui pourrait influencer l'appréciation de sa résidence. Le jugement a considéré qu’elle avait agi de manière à tromper l’administration sur sa situation personnelle et familiale.
3. Respect de la vie familiale : La Cour a également rejeté l'argument selon lequel le décret portant rapport de naturalisation porterait atteinte à la vie familiale de Mme A..., évoquant que le rapport d’un décret de naturalisation n’affecte pas les liens familiaux ou le droit de demeure des personnes concernées dans le territoire français.
Interprétations et citations légales :
- Code civil - Article 27-2 : Cet article stipule que les décrets portant acquisition de la nationalité peuvent être rapportés dans un délai de deux ans à condition que le requérant ne satisfasse pas aux conditions légales ou si celui-ci a obtenu la nationalité par fraude. Ainsi, en rapportant le décret de Mme A..., le ministre a respecté cette disposition.
- _"Les décrets portant acquisition, naturalisation ou réintégration peuvent être rapportés sur avis conforme du Conseil d'Etat dans le délai de deux ans à compter de leur publication au Journal officiel si le requérant ne satisfait pas aux conditions légales [ou] si la décision a été obtenue par mensonge ou fraude..."_
- Code civil - Article 21-16 : Cet article précise que pour qu'un individu soit naturalisé, il doit avoir sa résidence en France au moment de la signature du décret. La dissimulation d’un mariage à l’étranger peut être considérée comme un manquement à cet article qui pourrait influencer la reconnaissance du centre d’intérêts en France.
- _"Nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment de la signature du décret de naturalisation."_
Ainsi, le Conseil d'État a conclu, à travers ces articles et raisonner sur le caractère intentionnel de la dissimulation, que Mme A... n’avait pas le droit d’exiger l'annulation du décret rapportant sa naturalisation.