2°) de rejeter la demande de première instance.
Il soutient que :
- cette ordonnance est insuffisamment motivée, faute de se prononcer sur l'application des dispositions du 3. de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique ;
- elle est entachée d'erreur de droit et de contradiction de motifs en ce qu'après avoir relevé que les faits à l'origine de la décision de fermeture étaient constitutifs d'une infraction, elle se fonde sur le 2. de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique et non sur le 3. de cet article ;
- à supposer que la mesure de fermeture n'ait pu être prise sur le fondement
du 3. de l'article L. 3332-15, il y a lieu de lui substituer la base légale du 1. de cet article, qui pouvait également la fonder légalement ;
- la mesure prise était nécessaire dans son principe et son quantum n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le décret n°2004-374 du 29 avril 2004 ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée. Il appartient au juge des référés saisi en appel de porter son appréciation sur ce point au regard de l'ensemble des pièces du dossier, et notamment des éléments recueillis par le juge de première instance dans le cadre de la procédure écrite et orale qu'il a diligentée.
2. Aux termes de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique : " 1. La fermeture des débits de boissons et des restaurants peut être ordonnée par le représentant de l'État dans le département pour une durée n'excédant pas six mois, à la suite d'infractions aux lois et règlements relatifs à ces établissements (...) / 2. En cas d'atteinte à l'ordre public, à la santé, à la tranquillité ou à la moralité publiques, la fermeture peut être ordonnée par le représentant de l'État dans le département pour une durée n'excédant pas deux mois (...) /
3. Lorsque la fermeture est motivée par des actes criminels ou délictueux prévus par les dispositions pénales en vigueur, à l'exception des infractions visées au 1, la fermeture peut être prononcée pour six mois. Dans ce cas, la fermeture entraîne l'annulation du permis d'exploitation visé à l'article L. 3332-1-1. / 4. Les crimes et délits ou les atteintes à l'ordre public pouvant justifier les fermetures prévues au 2 et au 3 doivent être en relation avec la fréquentation de l'établissement ou ses conditions d'exploitation. / 5. Les mesures prises en application du présent article sont soumises aux dispositions du code des relations entre le public et l'administration (...) ". La compétence, conférée par ces dispositions au représentant de l'Etat dans le département, est exercée dans les Bouches-du-Rhône par le préfet de police des Bouches-du-Rhône en vertu de l'article 78-3 du décret du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements.
3. Les mesures de fermeture d'un débit de boisson ou restaurant prises au titre des dispositions de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique ont pour objet, quel que soit, au sein de cet article, le fondement légal qu'elles retiennent, de prévenir la répétition ou la poursuite de désordres liés au fonctionnement de l'établissement et présentent le caractère de mesures de police administrative. L'existence d'une atteinte à l'ordre public de nature à justifier la fermeture d'un établissement s'apprécie objectivement, ce dont il résulte que la condition, posée par les dispositions précitées pour les fermetures prévues au 2. et 3. de cet article, tenant à ce qu'une telle atteinte soit en relation avec la fréquentation de cet établissement, peut être regardée comme remplie indépendamment du comportement des responsables de cet établissement. Il appartient aux autorités de l'Etat d'assurer la préservation de l'ordre public et sa conciliation avec les libertés fondamentales, notamment, s'agissant des mesures en cause, avec la liberté du commerce et de l'industrie.
4. Il résulte de l'instruction menée par le juge des référés du tribunal administratif de Marseille que, le 15 décembre 2018, un client connu de l'établissement " Tabac du Pont de l'Arc ", situé à Aix-en-Provence, y ayant consommé des boissons alcoolisées qui lui avaient été servies alors qu'il présentait des signes d'ébriété, a, au moment de la fermeture de l'établissement vers 20 heures 30, chuté dans l'escalier de service, situé à l'arrière du bâtiment et non éclairé, en l'empruntant pour sortir. Deux personnes travaillant dans l'établissement l'y ayant découvert, l'une d'entre elles aurait traîné son corps inanimé sur la voie publique en demandant à sa collègue, qui appelait les secours, de ne pas parler du lieu de découverte de l'intéressé. Ce dernier, admis en urgence au centre hospitalier, y est par la suite décédé des suites de ses blessures avec, selon le prélèvement alors effectué, un taux élevé d'alcool dans le sang. Par un arrêté du 19 avril 2019, le préfet de police des Bouches-du-Rhône a, sur le fondement des dispositions du 3. de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique, prononcé la fermeture administrative pour une durée de six mois de l'établissement, exploité par Mme A...B..., aux motifs, d'une part, de la survenance de ces faits, relatés par un rapport de police établi le 19 février 2019 et, d'autre part, que, selon ce rapport, des auditions menées les jours suivant les faits avaient montré que le personnel de l'établissement servait parfois les clients jusqu'à l'ivresse. Pour suspendre la mesure de fermeture en tant qu'elle excède deux mois, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a, après avoir jugé que les faits survenus le 15 décembre 2018 justifiaient la mesure de fermeture administrative litigieuse, toutefois estimé que la fixation au-delà de deux mois de la durée nécessaire au but, rappelé au point précédent, poursuivi par cette mesure de police, portait une atteinte manifestement disproportionnée à la liberté du commerce et de l'industrie au regard de l'ensemble des circonstances de l'espèce, en particulier, en premier lieu, du caractère isolé de l'accident, en dépit de sa gravité non contestée, en deuxième lieu, du caractère non établi de l'habitude de l'établissement de servir de l'alcool à des personnes manifestant des signes d'ébriété, enfin,
de l'absence, confirmée à l'audience par les représentants du préfet de police des
Bouches-du-Rhône, de toute mesure de police administrative antérieure visant l'établissement, exploité depuis près de quarante-cinq ans et qui n'avait jamais fait l'objet ne serait-ce que d'un avertissement.
5. Au soutien de son appel, le ministre de l'intérieur ne conteste pas l'urgence et n'apporte aucun élément nouveau. Il se borne, pour contester le bien-fondé de l'appréciation ainsi portée par le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, dont l'ordonnance est, contrairement à ce qu'il soutient, suffisamment motivée, à rappeler, d'une part, que les faits survenus le 15 décembre 2018 justifient la mesure de fermeture administrative prononcée, d'autre part, sa large marge d'appréciation quant à la durée de la suspension. Il est manifeste qu'il n'apporte, ainsi, aucun élément de nature à remettre en cause, en l'état de l'instruction, l'ordonnance qu'il attaque. Son appel ne peut en conséquence qu'être rejeté selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du même code.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête du ministre de l'intérieur est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à Mme A...B....