Résumé de la décision
Dans cette affaire, l'Alliance générale contre le racisme et le respect de l'identité française et chrétienne (AGRIF) ainsi que plusieurs autres requérants ont demandé la suspension de dispositions du décret n° 2021-1059 du 7 août 2021 qui établissent l'obligation de présenter un "passe sanitaire" pour accéder à des services et établissements de santé. Ils soutiennent que cela porte atteinte à la liberté de culte, notamment en empêchant les ministres du culte de remplir leurs missions auprès de personnes vulnérables. Cependant, le juge des référés a rejeté la requête, considérant que les moyens avancés par les requérants ne démontraient pas une atteinte manifestement illégale à des libertés fondamentales.
Arguments pertinents
1. Intérêt à agir et condition d'urgence : Les requérants soutiennent avoir un intérêt à agir en raison de leur statut d'associations cultuelles et de ministres du culte. Ils affirment également que la condition d'urgence est satisfaite puisque le décret a des conséquences immédiates sur leur capacité à exercer leur foi, notamment à l’égard des malades et des mourants.
2. Atteinte à la liberté de religion : Les requérants affirment que le décret crée une situation où les ministres du culte ne peuvent pas intervenir auprès de patients dans des situations urgentes, ce qui constitue une atteinte disproportionnée à la liberté de religion. Par exemple, ils soulignent que les aumôniers, souvent en nombre insuffisant, doivent parfois faire appel à des ministres externes n’ayant pas de "passe sanitaire".
3. Disproportionnalité des mesures : Ils soutiennent que le décret est manifestement disproportionné car, d'une part, il impose des restrictions aux ministres du culte alors que certains patients peuvent être dispensés de la présentation du "passe sanitaire". Les requérants citent que des professionnels de santé peuvent exercer leurs fonctions sans ce passe lorsqu'ils justifient d'un certificat de contre-indication vaccinale.
Interprétations et citations légales
1. Conditions d'intervention du juge des référés : L'article L. 521-2 du Code de justice administrative permet au juge des référés de suspendre une mesure s'il est saisi d'une demande justifiée par l'urgence et si celle-ci porte atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Le juge a noté que "la condition d'urgence n'est pas remplie", car les requérants ne démontrent pas que l'accès au "passe sanitaire" est impossible pour certains ministres du culte.
2. Évaluation de la légalité des atteintes : Les arguments des requérants reposaient sur l'hypothèse que certaines personnes ne pouvaient pas accéder à la vaccination ou aux tests nécessaires pour obtenir le "passe sanitaire". Néanmoins, le juge a conclu qu’ "il ne peut être sérieusement soutenu que les dispositions critiquées... porteraient une atteinte manifestement illégale aux libertés fondamentales".
3. Rejet des conclusions pour indemnisation : Le juge a également rejeté la demande de versement d’une somme d'argent par l’État, conformément à l'article L. 761-1 du Code de justice administrative, qui stipule que l'État ne peut être condamné aux dépens si ce n'est pas la partie perdante.
En conclusion, la décision du juge des référés se fonde sur une évaluation stricte des conditions d'urgence et de légalité, écartant les arguments des requérants concernant l'atteinte à la liberté de culte sous l'angle de l'accessibilité du "passe sanitaire". Les dispositions ont ainsi été jugées proportionnelles aux risques liés à la santé publique.