Résumé de la décision
Dans la présente affaire, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) demandait au Conseil d'État de reconsidérer sa décision du 17 février 2016, qui avait annulé l'arrêté du 27 mars 2015 déterminant le taux de taxe sur les produits phytopharmaceutiques, à la suite d'une action introduite par l'association des utilisateurs et distributeurs de l'agrochimie européenne (Audace). L'ANSES formait tierce opposition à cette décision et sollicitait un sursis à exécution. Toutefois, le Conseil d'État a déclaré la requête de l'ANSES irrecevable, invoquant que celle-ci avait été représentée dans l'instance par le ministre de l'agriculture, et a considéré que les conclusions à fin de sursis à exécution n'avaient plus lieu d'être. En conséquence, une somme de 3 000 euros a été mise à la charge de l'ANSES au titre des frais de justice à verser à Audace.
Arguments pertinents
Les arguments centraux de la décision se concentrent sur la recevabilité de la tierce opposition et le statut de l'ANSES lors de l'instance concernée. Le Conseil d'État a affirmé que :
1. Présence de l'intérêt concordant : L'ANSES ne pourrait pas former tierce opposition car, étant un établissement public sous la tutelle du ministre de l'agriculture, ses intérêts avaient été défendus par ce ministre lors de l'instance précédente. Le Conseil d'État a précisé qu'« l'ANSES doit être regardée comme ayant été représentée par le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt dans cette instance ».
2. Irrecevabilité des interventions : Étant donné que l'ANSES n'a pas été lésée dans l'instance qu'elle conteste, sa requête en tierce opposition a été rejetée, entraînant l'irrecevabilité de l'intervention de l'Union des industries de la protection des plantes.
3. Absence de sursis à exécution : Puisque la tierce opposition a été déclarée irrecevable, les conclusions de l'ANSES visant un sursis à exécution ont été considérées comme étant devenues sans objet.
Interprétations et citations légales
Cette décision repose sur plusieurs textes de loi, dont les interprétations mettent en lumière la relation entre l'ANSES et le ministre de l'agriculture ainsi que les droits procéduraux des différentes parties impliquées :
- Code de justice administrative - Article R. 832-1 : Cet article stipule que « toute personne qui n'a été ni appelée, ni représentée dans l'instance peut former tierce opposition à une décision du Conseil d'Etat rendue en matière contentieuse ». Cela se réfère à la possibilité de contester une décision en invoquant un intérêt préjudiciable.
- Code rural et de la pêche maritime - Article L. 253-8-1 et L. 253-8-2 : Ces articles sont centraux car ils établissent le cadre légal de la phytopharmacovigilance et des taxes afférentes, justifiant l’interaction entre l'ANSES et le ministère.
Le Conseil d'État a souligné que l'ANSES, en tant qu'établissement public, était en effet représentée par son ministère de tutelle dans l'instance initiale, ce qui lui a enlevé toute légitimité à former tierce opposition. La décision démontre l'importance de la représentation légale des établissements publics dans le cadre des litiges administratifs.
En conclusion, cette décision souligne que la représentation adéquate dans un litige peut priver une entité de son droit à former tierce opposition, restreignant ainsi ses options de recours en cas de préjudice allégué.