1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Cécile Isidoro, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la société Compagnie Frey ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Compagnie Financière Frey, devenue Compagnie Frey, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale a notamment procédé sur le fondement de l'article 57 du code général des impôts à la réintégration dans le bénéfice imposable de l'exercice clos en 2007 d'une somme de 8 219 000 euros correspondant à deux versements effectués au bénéfice de la société de droit luxembourgeois Montebello Finances, sa filiale dont elle détient 99,99 % du capital, et de la société de droit luxembourgeois Mayora, détenue à hauteur de 99,99 % de son capital par la société Montebello Finances. Par un jugement du 16 juillet 2015, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de ces sommes. La société Compagnie Frey demande l'annulation de l'arrêt du 1er juin 2017 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté sa requête portant sur ces impositions.
2. Aux termes du premier alinéa de l'article 57 du code général des impôts applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Pour l'établissement de l'impôt sur le revenu dû par les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France, les bénéfices indirectement transférés à ces dernières, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux résultats accusés par les comptabilités. Il est procédé de même à l'égard des entreprises qui sont sous la dépendance d'une entreprise ou d'un groupe possédant également le contrôle d'entreprises situées hors de France (...) ". Ces dispositions instituent, dès lors que l'administration établit l'existence d'un lien de dépendance et d'une pratique entrant dans leurs prévisions, une présomption de transfert indirect de bénéfices qui ne peut utilement être combattue par l'entreprise imposable en France que si celle-ci apporte la preuve que les avantages qu'elle a consentis ont été justifiés par l'obtention de contreparties.
3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société, qui est une société holding spécialisée dans la gestion d'actifs immobiliers commerciaux et la distribution des produits de luxe dans le domaine des vins et champagnes, a souhaité diversifier son activité en faisant l'acquisition par l'intermédiaire de filiales des titres de la société Loris B...SA (LASA) détenus, pour près de 75 % du capital, par MmeB.... En application d'un protocole d'accord signé le 16 janvier 2003, Mme B...a cédé, le 7 mars 2003, une partie de ses actions à la société luxembourgeoise Montebello Finances, filiale de la société Compagnie Financière Frey, et a apporté l'autre partie à la société Mayora, filiale luxembourgeoise de la société Montebello Finances, contre l'acquisition de 49 % du capital de cette société. En vertu de ce protocole, la société requérante s'engageait à racheter les parts de Mme B...dans le capital de la société Mayora dix-huit mois après l'apport, au prix de 12 millions d'euros. Par un jugement du 1er février 2005, le tribunal de commerce de Paris, saisi par MmeA..., a ordonné à la société Compagnie Financière Frey de procéder au rachat des titres de la société Mayora détenus par MmeB..., à la suite de son apport, pour le prix convenu, malgré la contestation, soumise à arbitrage de ce prix par la société Compagnie Financière Frey. Cette obligation de rachat a été exécutée par la société Compagnie Financière Frey le 10 juin 2005 qui a ensuite cédé les parts de la société Mayora qu'elle avait acquises à la société Montebello le 29 juillet 2005 pour le même prix de 12 millions d'euros. Par transaction du 13 octobre 2005, la société Compagnie Financière Frey a obtenu de Mme B...la cession gratuite des titres de la société B...qui étaient encore détenus par elle-même et des membres de sa famille. Par décision du 18 octobre 2005, le conseil d'administration de la société Compagnie Financière Frey a autorisé l'octroi d'une garantie sur le prix de revente des actions de la société LASA au bénéfice de ses filiale et sous-filiale, qui détenaient désormais 99,99 % des actions de la société LASA, se réservant le bénéfice de l'éventuelle plus-value qui serait retirée de la vente de titres. La convention de garantie a été signée le 22 décembre 2005. Constatant que la cession des titres par les filiales à un groupe néerlandais le 4 octobre 2006 s'était soldée par une moins-value, la société Compagnie Financière Frey a versé en décembre 2007 aux sociétés luxembourgeoises la somme globale de 8,219 millions d'euros correspondant à la différence entre le prix garanti et le prix de cession.
4. En premier lieu, s'agissant de l'avantage financier, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à supposer que l'acquisition de ces titres de la société LASA ait été décidée par la société requérante et pour son compte, il est constant que ce sont les filiale et sous-filiale de cette société qui ont procédé à cette acquisition et ont inscrit ces titres à leur actif. Dès lors, en jugeant qu'en s'engageant à garantir le prix de cession de ces titres, alors qu'elle n'en était pas détentrice, et en prenant en charge les moins-values réalisées par les filiales lors de leur revente, la société requérante avait accordé à chacune de ces deux sociétés un avantage financier, la cour, qui n'avait pas, compte tenu de la nature particulière de cet avantage, à rechercher, en recourant à une méthode comparative, si son octroi différait de façon significative de la garantie qui aurait été accordée entre des entreprises indépendantes dans les conditions du marché, a suffisamment motivé son arrêt et n'a ni commis d'erreur de droit ni inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis. La cour, qui n'a pas dénaturé les termes de jugement du tribunal de commerce, n'a pas davantage commis d'erreur de droit ni inexactement qualifié les faits en jugeant que la circonstance que les sommes en litige ont été versées en exécution de la convention de garantie du 22 décembre 2005, dont elle a souverainement apprécié les clauses, et qui a été conclue alors que la société Compagnie Financière Frey savait que la somme versée pour détenir les titres LASA correspondait à un prix surévalué, était sans incidence sur leur qualification d'avantage financier. Par suite, le moyen tiré de ce que la cour aurait dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en omettant de prendre en compte l'ensemble des éléments de la convention du 22 décembre 2005 et les actes auxquels celle-ci se référait doit être écarté. Enfin, la cour, qui a fait peser sur l'administration fiscale la charge d'établir l'octroi par la société d'un avantage à sa filiale et à sa sous-filiale, n'a pas commis d'erreur de droit au regard des règles de dévolution de la charge de la preuve. Elle n'a pas omis de répondre à des moyens qui étaient inopérants, compte tenu de son office, tirés de la dénaturation par le tribunal administratif du jugement du tribunal de commerce et d'une erreur de calcul commise par le tribunal administratif.
5. En deuxième lieu, s'agissant de l'existence de contreparties, d'une part, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Compagnie Frey n'a pas entendu se prévaloir d'un intérêt commercial au versement des avantages financiers en litige et n'a pas soutenu que la situation financière de sa filiale et de sa sous-filiale justifiait une intervention de sa part sous la forme d'une aide financière. D'autre part, il ressort des écritures de la société qu'elle soutenait ne pas avoir souhaité s'engager elle-même dans un nouveau secteur d'activité en raison de sa stratégie d'investissement et avoir demandé à sa filiale et à sa sous-filiale d'acquérir les titres de la société LASA et qu'elle faisait valoir qu'en conséquence, l'opération avait été réalisée pour elle et pour son propre compte et qu'il était de sa responsabilité d'indemniser les filiales de la perte qu'elles avaient subie. La cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la circonstance que les titres de la société LASA aient été acquis à la demande et pour le compte de la société Compagnie Financière Frey par sa filiale et sa sous-filiale à un prix dont il était connu qu'il était surévalué était sans incidence pour apprécier si la société requérante avait eu un intérêt propre, distinct de l'intérêt de groupe, à verser à ces sociétés une aide. La cour, qui a suffisamment motivé son arrêt et ne s'est pas méprise sur la portée des écritures qui lui étaient soumises, n'a pas inexactement qualifié les faits en en déduisant qu'ils n'étaient pas de nature à justifier qu'il était de l'intérêt propre de la société d'indemniser les deux sociétés luxembourgeoises des pertes constatées lors de la cession de ces titres, alors même que la société a été constamment au coeur des différentes actions et négociations conduites pour le transfert de ces titres au sein du groupe, et en jugeant que ne justifiant pas de l'existence de contrepartie à l'avantage accordé, la société n'établissait pas que les avantages financiers ne constituaient pas un transfert indirect de bénéfices à des entreprises situées hors de France au sens de l'article 57 du code général des impôts.
6. Il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque. Ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la société Compagnie Frey est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Compagnie Frey et au ministre de l'action et des comptes publics.