Résumé de la décision
La décision porte sur une requête de l'association française des usagers des banques (AFUB) visant à annuler un décret qui a abaissé le plafond de paiement en espèces de 3 000 euros à 1 000 euros, conformément à l'article L. 112-6 du code monétaire et financier. Le Conseil d'État a rejeté la requête, considérant que les dispositions contestées ne méconnaissaient pas la Constitution ou le principe de la liberté contractuelle et qu'elles poursuivaient un objectif d'intérêt général.
Arguments pertinents
1. Conformité constitutionnelle : Le Conseil d'État a souligné que la conformité des dispositions législatives à la Constitution ne pouvait pas être contestée en dehors de la procédure prévue par l'article 61-1 de la Constitution. En ce sens, il a rejeté le moyen tiré de la méconnaissance de la liberté contractuelle, affirmant que l'interdiction des paiements en espèces au-delà d'un certain seuil découle directement des dispositions de l'article L. 112-6 du code monétaire et financier.
> "La conformité des dispositions législatives à la Constitution ne saurait être contestée... [et] le principe d'une interdiction du paiement en espèces des dettes supérieures à un montant fixé par décret... résulte des termes mêmes de l'article L. 112-6."
2. Limitation de l'application des articles pénaux : Le Conseil a également noté que l'association requérante ne pouvait se prévaloir des dispositions de l'article R. 642-3 du code pénal, qui concerne le refus de recevoir des pièces de monnaie, étant donné le contexte et le fondement législatif du décret attaqué.
3. Objectif d'intérêt général : La décision a confirmé que les dispositions de l'article L. 112-6 poursuivent l'objectif d'intérêt général de prévenir la fraude et le blanchiment d'argent. L'abaissement du plafond est justifié par la nécessité de renforcer la traçabilité des paiements, même si cela accroît la dépendance aux institutions bancaires.
> "Les dispositions de l'article L. 112-6 du code monétaire et financier poursuivent l'objectif d'intérêt général de prévenir les fraudes et le blanchiment d'argent..."
Interprétations et citations légales
Les articles de loi examinés dans la décision montrent clairement les préoccupations du législateur face aux enjeux de sécurité financière et de lutte contre le blanchiment d'argent.
- Code monétaire et financier - Article L. 112-6 : Cet article établit le cadre général pour l'interdiction des paiements en espèces au-delà d'un seuil fixé par décret. Il souligne la prise en compte du domicile fiscal du débiteur et les implications professionnelles des transactions.
- Code monétaire et financier - Article D. 112-3 : Cet article, dans sa version antérieure à la modification, précisait les seuils applicables, à savoir 3 000 euros pour les résidents et 15 000 euros pour les non-résidents. Le décret contesté a abaissé le seuil à 1 000 euros.
La décision met en lumière les tensions entre la liberté d'entreprendre et les impératifs régulatoires, tout en insistant sur la nécessité d'une régulation pour prévenir des comportements pouvant nuire à l'intégrité du système financier. L'équilibre entre les droits des usagers et les objectifs de sécurité juridique et économique est au cœur de cette analyse.