1°) d'annuler l'arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d'appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 85-1148 du 24 octobre 1985 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Baptiste de Froment, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Julie Burguburu, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de M.B....
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B...a été recruté sur un contrat à durée indéterminée en qualité d'ingénieur et affecté au bureau de l'informatique de la direction des services judiciaires du ministère de la justice. La décision de licenciement pour insuffisance professionnelle prise à son encontre en 1991 a été annulée par le tribunal administratif de Paris, par un jugement du 6 février 1996. Après sa réintégration dans le service, M. B...a fait l'objet d'une décision de mutation d'office en 1997, cette décision ayant été annulée par un jugement du tribunal administratif de Versailles du 27 mai 2004. L'administration a indemnisé M. B...des conséquences de son éviction irrégulière entre le 4 février 1992 et le 23 septembre 1996, en lui attribuant une somme de 171 252 euros comprenant les traitements qu'il aurait dû percevoir durant cette période sur la base d'un indice majoré de 643, diminuée des cotisations sociales, de l'indemnité de licenciement perçue, et des allocations-chômage versées à l'intéressé durant son éviction, avec intérêts. M. B...a contesté ce montant en réclamant une indemnisation complémentaire à hauteur de 900 000 euros, ainsi que le versement d'une somme de 150 000 euros à son fils alors mineur. Le garde des sceaux, ministre de la justice a rejeté cette demande par une décision du 18 mai 2012. Par un jugement du 12 décembre 2013, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. B...tendant à l'annulation de cette dernière décision. M. B...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 20 septembre 2016 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, réformant le jugement sur ce point, a condamné l'Etat à verser à M. B...un complément d'indemnisation de 10 000 euros au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence.
Sur la réparation due au titre de l'éviction illégale du service :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction issue de la loi du 30 juillet 1987, alors applicable : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 du titre Ier du statut général, des agents contractuels peuvent être recrutés dans les cas suivants : 1° Lorsqu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes ; 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A ..., lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient ... Les agents ainsi recrutés sont engagés par des contrats d'une durée maximale de trois ans qui ne peuvent être renouvelés que par reconduction expresse ". En jugeant que les agents non titulaires ne bénéficiant pas d'une carrière, M. B...ne pouvait invoquer l'existence d'une perte de progression indiciaire liée à l'ancienneté et en écartant l'existence d'un préjudice de ce chef, la cour n'a pas entaché son arrêt d'une erreur de droit et dénaturation.
3. En deuxième lieu, l'article 10 du décret du 24 octobre 1985 relatif à la rémunération des personnels civils et militaires de l'Etat, des personnels des collectivités territoriales et des personnels des établissements publics d'hospitalisation institue un supplément familial de traitement, bénéficiant notamment aux agents dont la rémunération est fixée par référence aux traitements des fonctionnaires, au titre des enfants dont ils assument la charge effective et permanente. La notion de charge effective et permanente de l'enfant, au sens de ces dispositions, s'entend de la direction tant matérielle que morale de l'enfant. La cour s'est livrée à une appréciation souveraine des pièces du dossier, qui n'est pas entachée de dénaturation, en relevant que M. B...n'établissait pas avoir assumé la charge effective et permanente de ses enfants pour la période litigieuse, au vu des seules cartes " famille nombreuse " de la SNCF produites devant elle.
4. En troisième lieu, c'est par une appréciation souveraine des faits de l'espèce, exempte de dénaturation, que la cour a évalué à 10 000 euros la réparation due à M. B... au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence.
5. En quatrième lieu, il résulte des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique qu'un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre. Les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité sont ainsi indemnisables. Pour l'évaluation du montant de l'indemnité due, doit être prise en compte la perte du traitement ainsi que celle des primes et indemnités dont l'intéressé avait, pour la période en cause, une chance sérieuse de bénéficier, à l'exception de celles qui, eu égard à leur nature, à leur objet et aux conditions dans lesquelles elles sont versées, sont seulement destinées à compenser des frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions.
6. La cour n'a pas commis d'erreur de droit au regard des principes ci-dessus rappelés en jugeant que M. B...ne pouvait prétendre au versement d'une somme représentative du " boni indemnitaire annuel ", qui est dépourvue de fondement légal.
7. En revanche, en jugeant que M. B...ne pouvait prétendre au versement d'une somme représentative de l'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires en l'absence de preuve de travaux supplémentaires effectifs, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit au regard des règles rappelées au point 5.
Sur la réparation due au titre de la mutation d'office illégale :
8. La cour n'a pas dénaturé les faits de l'espèce en estimant que la décision du 12 mai 1997 prononçant la mutation d'office de M. B...n'avait pas été prise pour un motif étranger à l'intérêt du service.
9. Il résulte de tout ce qui précède que l'arrêt attaqué doit être annulé, en tant seulement qu'il a rejeté les conclusions de M. B...tendant à la réparation du préjudice correspondant à la privation de l'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires résultant de son éviction illégale.
Sur les frais liés au litige :
10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 20 septembre 2016 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. B...tendant au versement d'une indemnité complémentaire au titre de la perte de l'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires.
Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Paris.
Article 3 : L'Etat versera à M. B...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et à la garde des sceaux, ministre de la justice.