Résumé de la décision
Dans cette affaire, l'association Ligue pour la protection des oiseaux a demandé l'annulation du refus implicite du Premier ministre de prendre un décret en Conseil d'Etat, qui devait établir la liste des habitats naturels à protéger, conformément à l'article L. 411-2 du code de l'environnement. Le Conseil d'Etat a décidé d'annuler cette décision implicite, soulignant que le Premier ministre avait l'obligation de prendre ce décret dans un délai raisonnable. En conséquence, il a ordonné au Gouvernement de procéder à l'édiction de ce décret dans un délai de six mois, sous astreinte de 500 euros par jour de retard. Les autres conclusions de l'association concernant les frais liés au litige ont été rejetées.
Arguments pertinents
1. Obligation réglementaire du Premier ministre : Le Conseil d'Etat a affirmé que le Premier ministre a une obligation d'agir dans un délai raisonnable pour exécuter les lois, stipulant que « l'exercice du pouvoir réglementaire [...] comporte non seulement le droit, mais aussi l'obligation de prendre dans un délai raisonnable les mesures qu'implique nécessairement l'application de la loi » (Considérant 2).
2. Indispensabilité du décret : Le jugement a mis en avant que l'article L. 411-2 du code de l'environnement nécessite un décret pour la protection des habitats naturels : « les dispositions relatives à la protection des habitats naturels ne peuvent recevoir application sans que le décret [...] soit pris » (Considérant 4).
3. Dépassement du délai raisonnable : Le Conseil a établi que le délai raisonnable pour l’adoption du décret était dépassé, entrainant l’annulation de la décision implicite de refus. Cette décision a été justifiée par l’absence d’action du Premier ministre malgré l’existence d’un besoin urgent de mise en place des régulations (Considérant 5).
Interprétations et citations légales
1. Article L. 411-1 et L. 411-2 du Code de l'environnement : Ces articles établissent le cadre légal pour la préservation des habitats naturels. L’article L. 411-1 introduit le régime de protection des sites et des espèces, tandis que l’article L. 411-2 précise que : « Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles sont fixées la liste limitative des habitats naturels [...] » (Code de l'environnement - Article L. 411-2). Cette formulation souligne la nécessité d'un décret pour que les dispositions prennent effet.
2. Article 21 de la Constitution : Le Conseil d'Etat s'appuie aussi sur les responsabilités constitutionnelles, en rappelant que le Premier ministre est chargé d'assurer l'exécution des lois. Cette obligation est essentielle pour justifier l'action demandée : « Le Premier ministre " assure l'exécution des lois " et " exerce le pouvoir réglementaire" » (Constitution - Article 21).
3. Articles L. 911-1 et L. 911-3 du Code de justice administrative : Ces articles, qui prévoient la possibilité pour la juridiction d’ordonner des mesures d'exécution et d'imposer des astreintes, ont été appliqués pour décider de l’injonction prescrite à l'égard du Gouvernement : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public [...] prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction [...] prescrit, par la même décision, cette mesure [...] » (Code de justice administrative - Article L. 911-1).
En conclusion, cette décision du Conseil d'Etat prend racine dans l'obligation du Gouvernement de respecter et d'agir selon les lois en vigueur, particulièrement en ce qui concerne la protection de l'environnement, tout en établissant un cadre strict pour l'édiction nécessaire des décrets réglementaires.