Résumé de la décision
La société Jade a contesté la conformité à la Constitution de l'article 1763 du code général des impôts, qui impose une amende pour défaut de déclaration des documents fiscaux par la société mère d'un groupe. La question a été transmise au Conseil d'État, qui a examiné si cette disposition était conforme aux principes de proportionnalité et d'individualisation des peines garantis par l'article 8 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789. En fin de compte, le Conseil d'État a décidé qu'il n'y avait pas lieu de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel, estimant que les arguments formés par Jade ne présentaient pas un caractère sérieux.
Arguments pertinents
1. Proportionnalité et individualisation des peines : La société Jade a soutenu que l'amende prévue par l'article contesté était contraire aux principes de proportionnalité et d'individualisation des peines. Cependant, le Conseil a affirmé que "la loi a elle-même assuré, par des taux non disproportionnés, la modulation des peines en fonction de la gravité des comportements réprimés", ce qui démontre que la législation prend en compte la nature de l'infraction et la gravité des manquements déclaratifs.
2. Lutte contre la fraude fiscale : Le Conseil a souligné que les obligations déclaratives imposées à la société mère visent à permettre à l'administration fiscale de exercer un contrôle sur le respect des règles fiscales et la comptabilisation des opérations intra-groupes, en précisant que cela "poursuit ainsi un but de lutte contre la fraude fiscale qui constitue un objectif de valeur constitutionnelle".
3. Contrôle judiciaire : Le Conseil d'État a rappelé que "pour chaque sanction prononcée, le juge décide, après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués", ce qui renforce l'idée que les droits des contribuables sont respectés et qu'il y a une possibilité d'individualiser les sanctions selon les circonstances spécifiques de chaque cas.
Interprétations et citations légales
1. Code général des impôts - Article 1763 : Cet article établit les amendes liées au défaut de production ou aux déclarations inexactes. Les dispositions précisent que "l'amende s'applique au seul exercice au titre duquel l'infraction est mise en évidence" et que "le taux est ramené à 1 % lorsque les sommes correspondantes sont réellement déductibles". Cela souligne une approche flexible et proportionnée quant à l'imposition des sanctions.
2. Objet de la réglementation : Plus largement, l'article 223 Q du code général des impôts pose les conditions dans lesquelles la société mère doit soumettre un état des rectifications. Ce n'est pas seulement une obligation mais un mécanisme permettant de garantir que les données financières sont fiables et qu'elles reflètent adéquatement la réalité économique du groupe.
3. Principes constitutionnels : Le Conseil a explicitement mentionné le principe de lutte contre la fraude fiscale comme "un objectif de valeur constitutionnelle", ce qui signifie que le législateur a le droit d'imposer des sanctions adaptées pour garantir le respect des obligations fiscales et dissuader les comportements frauduleux.
En conclusion, le Conseil d'État a considéré que il n'y avait pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel, estimant que les arguments avancés par la société Jade ne revêtaient pas de caractère sérieux au regard des principes de droit invoqués.