Résumé de la décision
La décision concerne un litige fiscal opposant la société Emerald Shores LLC, une société américaine de type limited liability company, à l'administration fiscale française. Cette société avait mis gratuitement à disposition de ses associés une villa à Saint-Jean-Cap-Ferrat durant les années 2004 et 2005. L'administration avait imposé cette société à l'impôt sur les sociétés sur la base de loyers estimés. La cour administrative d'appel de Marseille, dans son arrêt du 4 novembre 2014, avait rejeté l'appel de l'administration, confirmant un jugement de décharge des impositions. Cependant, le Conseil d’État a annulé cet arrêt, jugeant que la cour avait commis une erreur de droit en qualifiant la société de non-commerciale.
Arguments pertinents
1. Nature juridique de la société : La cour a retenu que le régime fiscal des limited liability companies aux États-Unis correspond à celui d’un partenariat et non à une société commerciale, impliquant ainsi un traitement fiscal spécifique en France.
Citation pertinente : "la société Emerald Shores ne peut être regardée comme commerciale du seul fait de sa forme sociale et soumise à ce titre à l'impôt sur les sociétés en France."
2. Identification selon le droit français : Le juge se doit de procéder à une assimilation de la société de droit étranger à une structure de droit français afin de déterminer le régime fiscal applicable. En l'espèce, la cour n'avait pas tiré les conséquences juridiques pertinentes des caractéristiques de la société Emerald Shores LLC.
Citation pertinente : "Il appartient au juge de l'impôt [...] d'identifier d'abord, au regard de l'ensemble des caractéristiques de cette société et du droit qui en régit la constitution et le fonctionnement, le type de société de droit français auquel la société de droit étranger est assimilable."
Interprétations et citations légales
1. Code général des impôts - Article 206 : Cet article stipule que certaines sociétés, y compris les sociétés à responsabilité limitée, sont passibles de l'impôt sur les sociétés. Cela invite à considérer la nature commerciale ou non de la structure soumise à l’impôt.
Citation directe : "sont passibles de l'impôt sur les sociétés, quel que soit leur objet, les sociétés anonymes, les sociétés en commandite par actions, les sociétés à responsabilité limitée n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes..."
2. Rôle du juge fiscal : Le Conseil d’État clarifie que la responsabilité du juge fiscal est d'examiner non seulement la forme juridique mais également la nature de l'activité économique de la société pour statuer sur son assujettissement fiscal.
Citation directe : "il lui revient ensuite de déterminer le régime applicable à l'opération litigieuse au regard de la loi fiscale française."
En résumé, la décision soulève des questions cruciales sur la qualification d'une société de droit étranger au regard du droit fiscal français et sur l'application correcte des principes juridiques liés à l'imposition des sociétés. Le Conseil d’État a réaffirmé le rôle essentiel de l'analyse juridique dans l'évaluation des structures internationales.