- la condition d'urgence est remplie, dès lors que le décret contesté porte une atteinte grave et immédiate à la liberté, pour les personnes précédemment nommées greffier de tribunal de commerce mais ne remplissant pas la condition de diplôme prévue au 6° de l'article R. 742-1 du code de commerce, d'exercer la profession de greffier de tribunal de commerce ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité du décret litigieux ;
- le décret méconnaît le principe d'égalité et la liberté d'entreprendre dès lors qu'il ne permet pas la nomination de personnes précédemment nommées greffier de tribunal de commerce qui ne remplissent pas la condition de diplôme énoncée au 6° de l'article R. 742-1 du code de commerce.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 août 2017, la garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête. Elle soutient que la condition d'urgence n'est pas remplie et qu'aucun des moyens soulevés par M. B...n'est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité du décret contesté.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 août 2017, le Premier ministre déclare s'associer aux observations présentées par la garde des sceaux, ministre de la justice.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule ;
- le code de commerce ;
- la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 ;
- l'ordonnance n° 2016-57 du 29 janvier 2016 ;
- le décret n° 87-601 du 29 juillet 1987 ;
- le décret n° 99-108 du 6 décembre 1999 ;
- le code de justice administrative.
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. B..., d'autre part, la garde des sceaux, ministre de la justice ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du 25 août 2017 à 15 heures au cours de laquelle ont été entendus :
- Me Meier, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocate de M. B... ;
- les représentants de la garde des sceaux, ministre de la justice ;
et à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". La condition d'urgence à laquelle est subordonnée le prononcé d'une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision administrative contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre.
2. Aux termes du IV. de l'article 61 de la loi du 6 août 2015 : " Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi pour améliorer, par la voie du concours, en fixant les conditions financières de cette mesure, le recrutement des greffiers de tribunaux de commerce. ". Aux termes de l'article L. 742-1 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 29 janvier 2016 modifiant les conditions d'accès à la profession de greffier de tribunal de commerce : " Les conditions d'accès à la profession des greffiers des tribunaux de commerce sont fixées par décret en Conseil d'Etat. / Elles comprennent notamment un concours, un stage et un entretien de validation de stage, sous réserve des dispenses prévues par ce décret. ".
3. Dans sa rédaction issue de l'article 3 du décret contesté, l'article R. 742-1 du code de commerce précise en ses 1° à 8° les conditions que doivent remplir les personnes qui souhaitent être nommées greffiers de tribunal de commerce, le 7° prévoyant la réussite au concours d'accès la profession et le 8° prévoyant la validation du stage de formation. M. B...doit être regardé, dans le dernier état de ses écritures et eu égard aux précisions fournies au cours de l'audience publique, comme demandant la suspension de l'exécution de l'article 16 du décret contesté en ce que, par des dispositions codifiées au 3° de l'article R. 742-18 du code de commerce, il réserve le bénéfice de la dispense du concours d'accès et de la validation du stage aux " personnes précédemment nommées greffier de tribunal de commerce, sous réserve qu'elles remplissent toujours les conditions prévues aux 1° et 6° de l'article R. 742-1 ".
4. Pour caractériser l'urgence qu'il y aurait à prononcer la suspension demandée, M. B...affirme que les dispositions contestées de l'article 16 du décret litigieux l'empêchent d'être à nouveau nommé greffier de tribunal de commerce, dès lors que, bien qu'ayant exercé cette profession de 1994 à 2010, il a été nommé pour la première fois à une époque où la réglementation, issue du décret du 29 juillet 1987 relatif aux conditions d'accès à la profession de greffier de tribunal de commerce, imposait seulement la détention d'une licence en droit, alors que le 6° de l'article R. 742-1 du code de commerce exige désormais la détention d'un " diplôme validant la première année de master en droit ou de l'un des titres ou diplômes reconnus équivalents " pour l'exercice de cette profession. Toutefois, en dispensant du concours d'accès et de la validation du stage les personnes précédemment nommées greffier de tribunal de commerce, sous réserve qu'elles remplissent " toujours ", notamment, la condition de diplôme prévue au 6° de l'article R. 742-1, les dispositions contestées ne sauraient avoir pour effet ou pour objet d'exclure de ces dispenses les personnes qui, telles que M.B..., ont été précédemment nommées à une époque où la réglementation imposait seulement la détention d'une licence en droit. Au demeurant, M. B...a déjà été renommé greffier de tribunal de commerce de Nevers par un arrêté du 31 août 2005, alors que le décret du 6 décembre 1999 susvisé avait remplacé la condition tenant à la détention d'une licence en droit par celle tenant à la détention d'une maîtrise en droit. Par suite, les dispositions contestées de l'article 16 du décret litigieux ne sauraient être regardées, en tout état de cause, comme emportant sur la situation de M. B...des conséquences suffisamment graves et immédiates pour caractériser une situation d'urgence. Dès lors que l'une des conditions à laquelle est subordonné l'exercice, par le juge des référés, des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 521-1 du code de justice administrative n'est pas remplie, la requête de M. B...ne peut qu'être rejetée.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A...B...et à la garde des sceaux, ministre de la justice.