Elle soutient que :
- le juge des référés a entaché son ordonnance d'une erreur de droit en ce qu'il n'a pas tiré les conséquences légales de ce que, par la même ordonnance, il avait ordonné la suspension de l'obligation de quitter le territoire français et de l'interdiction de retour sur le territoire français ;
- la condition d'urgence est remplie dès lors qu'il lui est impossible de participer à l'éducation et à la prise en charge de son jeune fils résidant à Mayotte ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale, d'une part, à son droit à une vie privée et familiale, d'autre part, à l'intérêt supérieur de son enfant et, enfin, à son droit à un recours juridictionnel effectif dès lors que l'arrêté a été exécuté avant que le juge des référés, saisi antérieurement à son éloignement, n'ait pu se prononcer sur sa requête.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 juillet 2019, le ministre de l'intérieur déclare s'en remettre à la sagesse du Conseil d'Etat.
Par un mémoire en intervention, enregistré le 4 juillet 2019, le Groupe d'information et de soutien des immigré-e-s (GISTI) demande au Conseil d'Etat de faire droit aux conclusions de la requête.
Par un mémoire en intervention, enregistré le 10 juillet 2019, l'association La Cimade demande au Conseil d'Etat de faire droit aux conclusions de la requête.
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, Mme B..., le GISTI et La Cimade et, d'autre part, le ministre de l'intérieur ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du jeudi 11 juillet 2019 à 10 heures au cours de laquelle ont été entendus :
- Me Pinatel, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de Mme B... ;
- les représentantes du ministre de l'intérieur ;
- les représentantes du GISTI ;
- les représentants de La Cimade ;
et à l'issue de laquelle le juge des référés a différé la clôture de l'instruction au 16 juillet 2019 à 18 heures ;
Vu, enregistré le 12 juillet 2019, le nouveau mémoire présenté par le ministre de l'intérieur. Il conclut au non-lieu à statuer sur les conclusions présentées par MmeB... ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 16 juillet 2019, par lequel Mme B... conclut au non-lieu à statuer dès lors qu'elle a été rapatriée le 14 juillet et que, convoquée en préfecture le 15 juillet, elle s'est vu remettre un récépissé de demande de titre de séjour l'autorisant à travailler.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
Sur les interventions en demande :
1. Le Groupe d'information et de soutien des immigré-e-s (le GISTI) et l'association " La Cimade ", qui interviennent au soutien des conclusions de la requête, justifient, eu égard à leur objet statutaire et à la nature du litige, d'un intérêt suffisant pour intervenir dans la présente instance. Leurs interventions sont, par suite, recevables.
Sur la requête d'appel de MmeB... :
2. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ".
3. Aux termes de l'article L. 514-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour la mise en oeuvre du présent titre, sont applicables (...) à Mayotte (...) les dispositions suivantes : / (...) 3° L'obligation de quitter le territoire français ne peut faire l'objet d'une exécution d'office, si l'étranger a saisi le tribunal administratif d'une demande sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, avant que le juge des référés ait informé les parties de la tenue ou non d'une audience publique en application du deuxième alinéa de l'article L. 522-1 du même code, ni, si les parties ont été informées d'une telle audience, avant que le juge ait statué sur la demande. "
4. MmeB..., ressortissante comorienne, soutient être arrivée à Mayotte en 2010 et résider auprès de son compagnon, de nationalité française et de leur fils également de nationalité française. Par arrêté du 15 juin 2019, le préfet de Mayotte lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé l'Union des Comores comme pays de destination et a interdit son retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Placée en rétention administrative, elle a été éloignée à destination de l'Union des Comores dès le 16 juin à 12 heures, alors même que l'obligation de quitter le territoire français litigieuse ne pouvait, en application des dispositions du 3° de l'article L. 514-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, faire l'objet d'une exécution d'office, dès lors qu'elle avait antérieurement saisi le tribunal administratif d'une demande sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative et que le juge des référés n'avait pas, à cette date, informé les parties de la tenue, ou non, d'une audience publique.
5. Par une ordonnance du 18 juin 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a jugé que Mme B...était fondée à soutenir que l'arrêté du préfet de Mayotte, en tant qu'il lui faisait obligation de quitter sans délai le territoire français et lui interdisait de revenir sur le territoire français pendant une durée d'un an, portait une atteinte grave et manifestement illégale à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Dès lors, il en a suspendu, dans cette mesure, l'exécution. En revanche, il a rejeté les conclusions de Mme B... tendant à ce qu'il soit enjoint à l'Etat d'organiser, dans les meilleurs délais, son retour à Mayotte. Mme B...relève appel de cette ordonnance en tant qu'elle a rejeté ces dernières conclusions.
6. Postérieurement à l'introduction de la requête de MmeB..., l'administration a organisé son retour à Mayotte, le 14 juillet, puis, à l'issue d'un rendez-vous à la préfecture le 15 juillet, lui a délivré un récépissé de demande de titre de séjour l'autorisant provisoirement à y résider. Dans ces conditions, les conclusions d'appel de Mme B...tendant à ce que le juge des référés du Conseil d'Etat fasse usage des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 521-2 du code de justice administrative en vue de mettre fin à l'illégalité grave et manifeste constatée par le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte sont devenues sans objet. Dès lors, il n'y a plus lieu d'y statuer.
7. Dans les circonstances de l'espèce, s'il n'y pas lieu d'admettre provisoirement Mme B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle, il y a lieu, en revanche, de faire droit aux conclusions qu'elle a présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de ces dispositions.
O R D O N N E :
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Article 1er : Les interventions du GISTI et de La Cimade sont admises.
Article 2 : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la a requête de Mme B... tendant à l'annulation partielle de l'ordonnance du 18 juin 2019 du juge des référés du tribunal administratif de Mayotte.
Article 3 : L'Etat versera une somme de 3000 euros à Mme B...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme A...B..., au ministre de l'intérieur, au Groupe d'information et de soutien des immigré-e-s (le GISTI) et à l'association " La Cimade ".