Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 3 mars 2016, Mme A...B..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges en date du 18 juin 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 16 janvier 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour et de travail ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande et, dans l'attente de la décision, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de travail dans le délai de trois mois ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat deux sommes de 1 920 et 2 200 euros à verser à son conseil, lequel renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Paul-André Braud a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeB..., ressortissante algérienne née en 1985, est entrée en France le 6 juin 2011 munie d'un visa de court séjour. Le 16 février 2012, elle a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence en se prévalant de sa vie privée et familiale. Le préfet de la Haute-Vienne a rejeté cette demande et a fait obligation à Mme B...de quitter le territoire français par un arrêté en date du 20 février 2013, dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Limoges du 27 juin 2013 puis par un arrêt de la cour de céans du 18 mars 2014. Le 7 mai 2014, Mme B...a de nouveau sollicité la délivrance d'un certificat de résidence, toujours sur le fondement de la vie privée et familiale. Par un arrêté en date du 6 janvier 2015, le préfet de la Haute-Vienne a abrogé le rejet implicite de sa demande, a rejeté expressément cette dernière, a fait obligation à Mme B...de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme B...relève appel du jugement du tribunal administratif de Limoges en date du 18 juin 2015 rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 janvier 2015.
Sur la légalité de l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 6 janvier 2015 :
En ce qui concerne le refus de certificat de résidence :
2. En premier lieu, Mme B...soutient qu'en indiquant dans l'arrêté litigieux qu'elle n'établissait pas être dépourvue de toute attache familiale en Algérie et qu'elle n'apportait aucune information médicale concernant sa fille, le préfet de la Haute-Vienne aurait commis des erreurs de fait. S'agissant des attaches familiales en Algérie, il ressort des pièces du dossier, et notamment de la fiche familiale d'état-civil, que Mme B...a sept frères et soeurs. Dès lors, en se bornant à indiquer que ses parents et l'une de ses soeurs résident en France, Mme B...ne peut être regardée comme établissant être dépourvue d'attaches familiales en Algérie. S'agissant de l'état de santé de sa fille, l'arrêté se borne à indiquer que la requérante n'apporte aucune information d'ordre médical de nature à contredire l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé le 28 août 2012. Or les seuls documents médicaux produits postérieurs à cet avis sont deux convocations pour des consultations datées des 5 et 12 janvier 2015 ne comportant aucune information sur l'état de santé de l'enfant. Mme B...ne démontre donc pas les erreurs de fait alléguées.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Selon l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 5°) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. ". Pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
4. Mme B...se prévaut de ses efforts d'intégration, dont témoigneraient son apprentissage du français et ses actions en tant que bénévole, de la présence en France de ses parents, titulaires de certificats de résidence en qualité d'étranger malade et d'accompagnant de malade, de l'une de ses soeurs, de nationalité française et de neveux et nièces, et enfin de la circonstance qu'elle assiste son père qui est gravement malade. Cependant, pour les raisons énoncées au point 2, Mme B...n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 26 ans. En outre, elle n'établit pas être la seule personne à même d'assister son père alors que l'épouse de celui-ci vit à ses côtés et que la soeur de Mme B... réside dans la même ville. Dans ces circonstances, et eu égard aux conditions de son séjour en France, le refus litigieux n'a pas porté au droit de Mme B...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été opposé. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien et, en tout état de cause, de l'article 23 du pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, doivent être écartés.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 ". Si l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature et la durée de validité des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, il n'a toutefois pas entendu écarter, sauf stipulations incompatibles expresses, l'application des dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers en ce qui concerne la délivrance, le renouvellement ou le refus de titres de séjour, dès lors que ces ressortissants algériens se trouvent dans une situation entrant à la fois dans les prévisions de l'accord et dans celles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet n'est toutefois tenu, en vertu de l'article R. 312-2 du même code, de saisir cette commission que lorsque l'étranger remplit effectivement les conditions prévues par les articles susmentionnés ou, dans le cas d'un ressortissant algérien, par les stipulations de l'accord franco-algérien ayant le même objet.
6. Il résulte de ce qui a été mentionné au point 4 que Mme B...n'était pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement des stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, équivalentes aux dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, invoquées par la requérante. Par suite, le moyen tiré du défaut de consultation de la commission du titre de séjour doit être écarté.
7. En quatrième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.
8. Mme B...soutient qu'en cas de retour en Algérie, elle sera nécessairement séparée de sa fille en raison de l'exécution d'une condamnation à deux mois de prison ferme pour non présentation d'enfant par un jugement du tribunal de Mostaganem du 17 mai 2012. Cependant, le refus de certificat de résidence en litige n'implique pas par lui-même le retour de l'intéressée en Algérie. Si la requérante soutient également qu'il est dans l'intérêt de sa fille qu'elle puisse obtenir un certificat de résidence l'autorisant à travailler afin qu'elle puisse subvenir aux besoins de l'enfant, elle n'établit ni même n'allègue être dans l'impossibilité de travailler dans un autre pays que la France. Ainsi, dans ces circonstances et alors qu'il n'est ni établi ni même allégué que sa fille serait dans l'impossibilité de l'accompagner, le refus de certificat de résidence opposé n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi :
9. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que les décisions lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi seraient privées de base légale du fait de l'illégalité du refus de certificat de résidence.
10. En second lieu, pour les motifs énoncés aux points 4 et 8, le préfet de la Haute-Vienne n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur la situation de l'intéressée des décisions obligeant Mme B...à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi.
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 6 janvier 2015. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
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No 16BX00842