Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 27 janvier 2016, M.C..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 10 décembre 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Haute-Vienne du 10 juillet 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour, ou à défaut, une autorisation provisoire de séjour dès la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de condamner l'Etat à verser la somme de 2 000 euros à Me D...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, ainsi que la somme de 13 euros correspondant à un droit de plaidoirie, en application des dispositions de l'article 43 de la même loi.
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Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-958 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la modification des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridictionnelle ;
- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B...a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.C..., ressortissant algérien né le 25 février 1949, est entré régulièrement en France le 27 avril 2013 muni d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour. Il a bénéficié d'un certificat de résidence algérien en raison de son état de santé valable du 29 avril au 28 octobre 2014 dont il a demandé le renouvellement le 29 septembre 2014. Par un arrêté du 10 juillet 2015, le préfet de la Haute-Vienne a refusé de renouveler son titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé s'il ne satisfait pas à cette obligation. M. C...relève appel du jugement du 10 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Le requérant soutient que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité dès lors que les premiers juges n'auraient pas répondu au moyen tiré de l'irrégularité de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, dépourvu de toute précision sur la possibilité de bénéficier effectivement d'un traitement approprié à son état de santé en Algérie. Toutefois, en indiquant au point 5 du jugement, qu'aucune disposition n'impose au médecin de l'agence régionale de santé de se prononcer sur l'effectivité de l'accès aux soins d'un ressortissant algérien dans son pays d'origine, le tribunal administratif a suffisamment répondu à ce moyen et n'a donc pas entaché son jugement d'irrégularité.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision du 10 juillet 2015 portant refus de titre de séjour :
3. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...). Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 7) Au ressortissant algérien résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants algériens, le certificat de résidence prévue au 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien est délivré : " au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...) ". Selon l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé : " le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ".
4. En premier lieu, il résulte de ces stipulations et dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui en fait la demande au titre de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent, mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.
5. Si M. C... soutient que l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé est irrégulier dès lors qu'il ne s'est pas prononcé sur la possibilité pour lui d'accéder effectivement au traitement requis par son état de santé en Algérie, cet avis a été émis dans les conditions fixées par les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et par l'arrêté du 9 novembre 2011 pris pour son application, applicables aux ressortissants algériens. Ces dispositions n'imposent pas au médecin de l'agence régionale de santé de se prononcer sur la capacité de l'étranger de nationalité algérienne d'accéder effectivement aux soins dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis du médecin de l'agence régional de santé doit être écarté.
6. En deuxième lieu, si M. C... soutient que le préfet ne pouvait se fonder sur un avis du médecin de l'agence régionale de santé rendu antérieurement au dépôt de la demande de renouvellement du titre de séjour, il ne résulte pas de l'instruction que l'intéressé aurait fait part d'éléments nouveaux, relatifs à son état de santé ou à l'offre de soins disponible dans son pays, de nature à entacher cet avis de caducité. En tout état de cause, il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que le préfet s'est également fondé sur un avis rendu par ce médecin en date du 15 mai 2015, délivré moins de deux mois avant la décision attaquée.
7. En troisième lieu, si M. C... soutient qu'il existe un délai trop important entre la date de sa demande de renouvellement de son titre de séjour et l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 15 mai 2015, il n'invoque la méconnaissance d'aucune disposition ou principe particuliers et n'allègue pas que ce retard l'aurait privé d'une garantie. Par suite, ce moyen doit être écarté.
8. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. C...a été hospitalisé à plusieurs reprises au centre hospitalier universitaire (CHU) de Limoges et y est suivi en radiothérapie et oto-rhino-laryngologie pour les suites médicales de 1'intervention chirurgicale subie en 2012 en Algérie pour un cancer du larynx. Par deux avis des 28 août 2014 et 12 mai 2015, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il existait un traitement approprié pour cette prise en charge dans son pays d'origine. M.C..., qui ne conteste pas l'existence d'un traitement approprié pour sa prise en charge médicale en Algérie, fait valoir qu'il ne peut y avoir effectivement accès au motif que l'hôpital d'Alger dans lequel il devrait être soigné se situe à plus de trois cents kilomètres de son domicile alors qu'il ne peut se déplacer seul, ne dispose pas du matériel médical nécessaire afin d'assurer son suivi et ne peut honorer tous les rendez-vous. S'il ressort des attestations circonstanciées produites par le requérant que, lors de l'opération qu'il a subie en Algérie, sa famille a dû elle-même acheter en France du matériel médical nécessaire à l'opération et que les rendez-vous médicaux qui lui ont été donnés n'ont pas tous pu être régulièrement honorés, il ressort des pièces du dossier que son état de santé ne nécessite plus qu'un suivi clinique régulier tous les trois ou quatre mois durant deux ans puis tous les six mois pendant cinq ans en alternance avec le service d'oto-rhino-laryngologie et de radiothérapie. Par ailleurs, il existe plusieurs établissements dans les spécialités requises pour la prise en charge médicale de 1'intéressé plus proches de son lieu de résidence que celui d'Alger. Il ne ressort pas des autres pièces du dossier et notamment des documents médicaux produits que M. C...n'aurait aucun accès effectif au traitement approprié à la prise en charge de sa pathologie en Algérie. Dès lors, M. C...n'est pas fondé à soutenir que le préfet, auquel incombait cet examen, ne s'est pas assuré qu'il pouvait bénéficier dans son pays d'origine d'un accès effectif aux soins requis par son état de santé. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 6 de l'accord franco-algérien doit ainsi être écarté, tout comme celui tiré de l'erreur manifeste qu'aurait commise le préfet dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle, alors au surplus que M. C...est entré récemment en France à l'âge de 64 ans, qu'il n'établit pas ne plus avoir d'attaches familiales ou personnelles en Algérie et qu'il ne justifie d'aucune autre circonstance qui imposerait son maintien sur le territoire français.
En ce qui concerne la décision du 10 juillet 2015 portant obligation de quitter le territoire français :
9. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de séjour, ne peut qu'être écarté.
10. En second lieu, M. C...reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance et tirés de ce que le préfet se serait estimé lié par sa décision de refus de titre de séjour en l'obligeant à quitter le territoire français et de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu de rejeter ces moyens par adoption des motifs pertinemment retenus par le tribunal administratif de Limoges.
En ce qui concerne la décision du 10 juillet 2015 fixant le pays de destination :
11. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.
12. En second lieu, M. C...reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance et tirés du défaut de motivation et de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu de rejeter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges.
13. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction de même que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et celles tendant au remboursement du droit de plaidoirie sont rejetées.
DECIDE
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
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N° 16BX00356