Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 11 janvier 2016, le préfet des Pyrénées-Atlantiques demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 8 décembre 2015 en toutes ses dispositions et de rejeter la requête de MmeA....
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Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la directive n° 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005 modifiée ;
- la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 10 décembre 1984 ;
- la convention de New York relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florence Madelaigue,
- et les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C...D...épouseA..., de nationalité russe, est entrée en France irrégulièrement le 28 mai 2014 avec son époux et a sollicité le 12 juin 2014 son admission au séjour au titre de l'asile. Sa demande d'asile a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 21 novembre 2014, rejet confirmé par la Cour nationale du droit d'asile par décision du 15 mai 2015. Par arrêté du 29 juillet 2015, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a pris à son encontre une décision portant refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français et d'une décision fixant le pays de destination. Le préfet des Pyrénées-Atlantiques demande l'annulation du jugement n° 1502074 du 8 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Pau a annulé son arrêté du 15 mai 2015 et a mis à sa charge la somme de 500 euros au titre de l'aide juridictionnelle.
2. Aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile (...) ". Aux termes de l'article R. 733-32 dudit code : " Le secrétaire général de la cour notifie la décision de la cour au requérant par lettre recommandée avec demande d'avis de réception dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 213-3. (...) " . L'article R. 213-3 du même code dispose que : " L'autorité administrative compétente pour prendre la décision mentionnée à l'article R. 213-2 de refuser l'entrée en France à un étranger demandant à bénéficier du droit d'asile est le ministre chargé de l'immigration. / L'étranger est informé du caractère positif ou négatif de cette décision dans une langue dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend... ".
3. Il résulte de ces dispositions que l'étranger qui demande l'asile a le droit de séjourner sur le territoire national à ce titre jusqu'à ce que la décision rejetant sa demande lui ait été notifiée régulièrement par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé devant elle, par la Cour nationale du droit d'asile. En l'absence d'une telle notification, l'autorité administrative ne peut regarder l'étranger à qui l'asile a été refusé comme ne bénéficiant plus de son droit provisoire au séjour ou comme se maintenant irrégulièrement sur le territoire. En cas de contestation sur ce point, il appartient à l'autorité administrative de justifier que la décision de la Cour nationale du droit d'asile a été régulièrement notifiée à l'intéressé, le cas échéant en sollicitant la communication de la copie de l'avis de réception auprès de la cour.
4. Par les pièces qu'il produit à l'appui de la requête d'appel, le préfet des Pyrénées-Atlantiques justifie que la décision du 15 mai 2015 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a rejeté le recours que Mme A...avait formé contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 21 novembre 2014 rejetant sa demande d'asile, a été notifiée à l'intéressée le 9 juin 2015, comme en atteste la signature apposée sur l'accusé de réception. En outre, le préfet indique sans être contredit sur ce point que la notification comprenait une fiche jointe systématiquement par la cour à ses décisions et indiquant en plusieurs langues, dont le russe qui est la langue parlée par la requérante, le sens de sa décision : en l'espèce, " la Cour nationale du droit d'asile a décidé de rejeter votre recours ". La décision de la Cour nationale du droit d'asile doit donc être regardée comme ayant été notifiée régulièrement à Mme A...le 9 juin 2015.
5. Il résulte de ce qui précède qu'à la date de l'arrêté attaqué, pris le 29 juillet 2015, Mme A... ne disposait plus du droit de se maintenir en France. C'est dès lors à tort que les premiers juges ont estimé que tel n'était pas le cas pour annuler l'arrêté attaqué.
6. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A...devant le tribunal administratif de Pau.
Sur le refus de séjour :
7. La décision attaquée, qui n'avait pas à reprendre en détail les données propres à la situation personnelle de MmeA..., énonce de manière suffisamment précise, au regard des exigences de l'article 3 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, les éléments de droit comme de fait qui fondent le refus de séjour. Ainsi, le préfet a suffisamment motivé sa décision de refus de séjour.
8. Aux termes de l'article R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " L'étranger qui, n'étant pas déjà admis à résider en France, sollicite son admission au séjour au titre de l'asile en application de l'article L. 741-1 présente à l'appui de sa demande : 1° Les indications relatives à son état civil ... 2° Les documents mentionnés dans l'arrêté prévu par l'article R. 211-1 ... 3° Quatre photographies ... 4° L'indication de l'adresse où il est possible de lui faire parvenir toute correspondance pendant la durée de validité de l'autorisation provisoire de séjour délivrée sur le fondement de l'article R. 742-1 ... L'indication des pièces à fournir par l'étranger qui sollicite son admission au séjour au titre de l'asile en application du présent article est portée à sa connaissance par les services de la préfecture. Ces derniers remettent alors à l'étranger un document d'information sur ses droits et sur les obligations qu'il doit respecter eu égard aux conditions d'accueil des demandeurs d'asile, ainsi que sur les organisations qui assurent une assistance juridique spécifique et celles susceptibles de l'aider ou de l'informer sur les conditions d'accueil dont il peut bénéficier, y compris les soins médicaux. Cette information se fait dans une langue dont il est raisonnable de penser que le demandeur d'asile la comprend " ;
9. En vertu des dispositions de l'article R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France, édictées afin d'assurer la transposition en droit français des objectifs fixés par l'article 10 de la directive 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005 relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les Etats membres, l'étranger présent sur le territoire français qui, n'étant pas déjà admis à séjourner en France, sollicite son admission au séjour au titre de l'asile, est informé par les services de la préfecture des pièces à fournir en vue de cette admission et se voit remettre un document d'information sur ses droits et obligations, ainsi que sur les organisations susceptibles de lui procurer une assistance juridique, de l'aider ou de l'informer sur les conditions d'accueil offertes aux demandeurs d'asile, cette information devant être faite dans une langue dont il est raisonnable de penser que l'intéressé la comprend.
10. Eu égard à l'objet de ce document d'information, sa remise doit intervenir au début de la procédure d'examen des demandes d'asiles, ainsi que le prévoit l'article R. 741-2 du code précité, pour permettre aux intéressés de présenter utilement leur demande aux autorités compétentes, dans le respect notamment des délais prévus. Si le défaut de remise de ce document à ce stade est de nature à faire obstacle au déclenchement du délai de vingt et un jours prévu par l'article R. 723-1 du même code pour saisir l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, il ne peut, en revanche, être utilement invoqué à l'appui d'un recours mettant en cause la légalité de la décision par laquelle le préfet statue, en fin de procédure, après intervention de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et, le cas échéant, après celle de la Cour nationale du droit d'asile, sur le séjour en France au titre de l'asile ou à un autre titre. Par suite, le moyen tiré par Mme A...de ce qu'elle n'aurait pas bénéficié, dans une langue qu'elle comprenait, de l'information prévue à l'article R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et à l'article 10 de la directive n° 2005/85 du 1er décembre 2005 doit dès lors être écarté comme inopérant.
11. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. /2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé morale, ou à la protection des droits et liberté d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ". Mme A...est arrivée en France en mai 2014 avec son époux. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis la Cour nationale du droit d'asile ont refusé de leur reconnaître la qualité de réfugié. Il ressort des pièces du dossier qu'en dépit de la naissance de son fils en France, Mme A...n'y a pas le centre de ses intérêts privés et familiaux et peut reconstituer sa vie familiale en Russie. Dans ces conditions, le préfet des Pyrénées-Atlantiques, en ayant refusé de lui délivrer un titre de séjour, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Par suite, ce refus ne méconnaît ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
12. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". La décision refusant un titre de séjour à Mme A... n'oblige pas la requérante à se séparer de son enfant qui peut suivre ses parents en Russie. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
13. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que Mme A... ne peut exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour à l'appui de sa contestation de la légalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.
14. Il ressort des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la motivation d'une décision portant obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus ou du retrait de titre de séjour, dont elle découle nécessairement et n'implique par conséquent pas de motivation spécifique pour respecter les exigences de motivation. Ainsi qu'il a été dit, la motivation du refus de séjour opposé à Mme A... est conforme aux prescriptions de la loi du 11 juillet 1979. Le préfet a visé les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui l'habilite à assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français. Il s'ensuit que la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée.
15. Il ressort des pièces du dossier que MmeA..., qui a déposé une demande d'asile tendant à son maintien en France, ne pouvait ignorer qu'en cas de refus, elle pouvait faire l'objet d'une mesure d'éloignement. Elle a eu la possibilité tout au long de l'instruction de sa demande de faire valoir tout élément utile susceptible d'influer sur la reconnaissance d'un droit au séjour en France ainsi que sur la prise à son encontre d'une mesure d'éloignement et sur ses modalités d'exécution. Il ne ressort pas des pièces du dossier que MmeA..., qui se borne à soutenir que son droit d'être entendu a été méconnu, sans autre précision, disposait d'informations pertinentes tenant à sa situation personnelle, qu'elle a été empêchée de porter à la connaissance de l'administration avant que ne soit prise la mesure d'éloignement et qui, si elles avaient pu être communiquées à temps, auraient été de nature à faire obstacle à la décision l'obligeant à quitter le territoire français. Par suite, Mme A...ne peut être regardée comme ayant été privée du droit d'être entendue qu'elle tient d'un principe général du droit de l'Union européenne.
16. Mme M. A...ne démontre pas qu'elle ne pourrait retourner vivre en Russie avec son époux et leur enfant. Le préfet n'a ainsi pas méconnu les stipulations précitées de l'article 3 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
17. Enfin le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 11 du présent arrêt.
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
18. La décision contestée, qui vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et relève que Mme A...a été déboutée de sa demande d'asile et n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, est suffisamment motivée en tant qu'elle fixe le pays de renvoi.
19. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet des Pyrénées-Atlantiques se serait cru lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile pour fixer le pays de renvoi de Mme A....
20. Il convient d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant par les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 12 et 16 du présent arrêt.
21. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. "
22. MmeA..., dont la demande d'admission au statut de réfugié a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile, soutient qu'elle encourrait des risques pour sa vie en cas de retour en Russie en raison de la situation au Daghestan. Toutefois, elle n'apporte aucun élément probant de nature à établir la réalité de risques personnels de traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni aux stipulations de l'article 3-1 de la convention du 10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants qu'elle encourrait en cas de retour en Russie. Par suite, la décision fixant la Russie comme pays de renvoi n'a méconnu ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les stipulations de l'article 3-1 de la convention du 10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Et par suite, les conclusions de Mme A... tendant à son assignation à résidence compte tenu de ses risques en cas de retour dans son pays d'origine ne peuvent en tout état de cause qu'être écartées.
23. Enfin, Mme A...ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article 7 de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 au soutien de son moyen tiré de son droit d'être entendue dès lors qu'à la date de l'arrêté attaqué cette directive avait été transposée en droit interne.
24. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet des Pyrénées-Atlantiques est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a annulé l'arrêté du 29 juillet 2015 et a condamné l'Etat au versement de la somme de 500 euros au titre des frais de procès.
DECIDE
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Pau du 8 décembre 2015 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif de Pau est rejetée.
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N° 16BX00082