Par une requête enregistrée le 25 juillet 2014, M. et MmeC..., représentés par Me B..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 16 mai 2014 en tant qu'il a rejeté leur demande de décharge ;
2°) de les décharger des impositions litigieuses et des pénalités y afférentes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. et Mme C...soutiennent que :
- Mme C...a reçu en 2005 trois chèques provenant d'une assurance vie, ce qui constitue des sommes non imposables, et dont les intérêts sont imposés en Espagne ;
- l'administration a additionné ligne à ligne des sommes qui n'étaient pour la plupart que des mouvements de compte à compte ;
- hormis les sommes visées par l'attestation de la banque BBVA provenant de revenus de l'étranger, les autres sommes ne constituent pas des revenus ;
- les revenus provenant de l'étranger ont été imposés en Espagne ainsi qu'en atteste la banque BBVA ;
- alors que la somme réclamée par l'administration était de 169 514 euros, l'administration a prélevé une somme totale de 219 313,43 euros sur leurs salaires et sur leurs comptes, les spoliant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 décembre 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Le ministre des finances et des comptes publics soutient que :
- les conclusions relatives au recouvrement ne sont pas recevables, faute pour les requérants d'avoir lié le contentieux ;
- les moyens soulevés par M. et Mme C...ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 18 novembre 2015 la clôture d'instruction a été fixée au 8 décembre 2015, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Par une ordonnance du 21 mars 2016, l'instruction a été rouverte, en application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller,
- les conclusions de M. Besse, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant M. et MmeC....
1. Considérant que M. et Mme C...ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle ayant porté sur les années 2005, 2006 et 2007 ; que l'activité professionnelle de voyance de Mme C...a par ailleurs fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour la même période ; qu'à l'issue de ces procédures, M. et Mme C...se sont vu notifier une proposition de rectification concernant, au titre des années 2006 et 2007, d'une part, selon la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, des rehaussements concernant des revenus d'origine indéterminée et, d'autre part, selon la procédure contradictoire, des rehaussements concernant d'autres chefs de redressements ; que M. et Mme C...n'ayant pas présenté d'observations dans le délai qui leur était imparti, les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales correspondantes assorties de pénalités, ont été mises en recouvrement le 31 mai 2010 ; que M. et MmeC... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2006 et 2007 résultant des revenus d'origine indéterminée, ainsi que des pénalités y afférentes, de prononcer la suspension immédiate des poursuites effectuées à leur encontre pour le paiement des cotisations précitées et d'enjoindre la mainlevée de toutes procédures en cours ; que M. et Mme C...doivent être regardés comme relevant appel du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 16 mai 2014 en tant qu'il a rejeté leur demande tendant à la décharge des impositions litigieuses et des pénalités y afférentes ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 69 du même livre : " Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16. " ; que par courrier du 16 juillet 2009, l'administration a demandé à M. et Mme C...d'apporter des justifications sur l'origine et la nature des crédits bancaires injustifiés figurant en 2006 et en 2007 sur cinq comptes bancaires détenus par Mme C...en Espagne à hauteur de 184 553 euros pour l'année 2006 et de 127 070 euros pour l'année 2007 ; que M. et Mme C...n'ayant pas répondu à cette demande de justifications, ils ont été régulièrement taxés d'office, en application de l'article L. 69 du même livre, à raison de revenus d'origine indéterminée, pour les sommes portées au crédit de ces cinq comptes bancaires ; que, par suite, il leur appartient d'établir l'exagération des bases imposables retenues par l'administration, conformément aux dispositions du troisième alinéa de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales et de l'article L. 193 du même livre ;
Sur les crédits provenant de virements entre comptes bancaires :
3. Considérant que pour contester l'imposition litigieuse, M. et Mme C...soutiennent notamment que l'administration s'est contentée d'additionner ligne à ligne des sommes qui n'étaient pour la plupart que des mouvements de compte à compte ; qu'ils ont produit à ce titre une attestation de la banque BBVA dans laquelle ils détiennent les cinq comptes bancaires espagnols visés par la procédure de demande de justifications aux termes de laquelle dix crédits, identifiés dans ladite attestation, pour lesquels l'administration a demandé des justifications, constituent des " transferts entre comptes " ; que l'examen des relevés desdits comptes obtenus par l'administration dans l'exercice de son droit de communication auprès de la banque espagnole fait apparaitre que le crédit de 250 euros porté sur le compte BBVA n° 5505 020 00151267 le 6 juin 2006 provient effectivement d'un virement entre les comptes bancaires détenus par les intéressés, puisqu'il provient du compte BBVA n° 5505 020 00152053 ; qu'en revanche, il n'est pas établi, au vu de cette seule attestation et des relevés de comptes que les autres crédits proviendraient de virements entre les comptes détenus par M. et Mme C...et dont l'administration avait la connaissance ; qu'en outre, les relevés bancaires font apparaître que le crédit de 20 000 euros porté sur le compte BBVA n° 5505 020 00151267 le 10 juillet 2006 et le crédit de 5 000 euros porté le 31 juillet 2006 sur le compte BBVA n° 5505 041 00150934 proviennent également d'un virement du compte BBVA n° 5505 020 00152053 ; que, par ailleurs, ces relevés bancaires font apparaître que le crédit de 18 000 euros porté le 20 octobre 2006 sur le compte BBVA n° 5505 041 00150990 et les crédits de 188,16 euros, 20 euros et 5 euros portés respectivement le 9 février 2007, le 22 juin 2007 et le 7 novembre 2007 sur le compte BBVA n° 5505 020 00152810 proviennent de virements du compte BBVA n° 5505 020 00151267 ; que M. et Mme C...sont fondés à soutenir que l'administration ne pouvait imposer, sur le fondement des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, lesdits crédits ; que, par suite, les bases d'impôt sur le revenu assignées à M. et Mme C...doivent être respectivement réduites au titre de l'année 2006 de 43 250 euros et au titre de l'année 2007 de 213,16 euros ;
Sur les autres crédits :
4. Considérant que la circonstance que Mme C...a encaissé en 2005 trois chèques provenant d'une assurance vie et que ces sommes ne seraient pas imposables est sans incidence sur le bien-fondé de l'imposition, en tant que revenus d'origine indéterminée, des crédits portés en 2006 et en 2007 sur les comptes bancaires détenus par M. et Mme C...en Espagne dans la mesure où les intéressés ne démontrent pas que les sommes provenant de l'encaissement de ces chèques ont été créditées sur leurs comptes espagnols en 2006 ou en 2007 ;
5. Considérant que si M. et Mme C...se prévalent de l'attestation de la banque BBVA aux termes de laquelle seuls certains des crédits litigieux, visés dans ladite attestation comme des " ingresos ", constituaient des revenus pour les intéressés, cette attestation ne permet pas, à elle seule, d'apporter la preuve que les autres crédits litigieux ne constituent pas des revenus imposables ;
6. Considérant qu'en outre, si cette attestation comporte une information fiscale portant, d'après sa traduction, sur un " compte d'épargne ", des " fonds d'investissement ", un " plan de pensions " et des " valeurs ", les montants qui y sont mentionnés ne permettent pas de les rattacher aux crédits litigieux et, par suite, de prouver que les revenus provenant de l'étranger et les revenus provenant des intérêts des sommes créditées sur leurs comptes auraient déjà été soumis à une imposition en Espagne ;
7. Considérant que la circonstance, au demeurant non avérée, que l'administration aurait mis en recouvrement une somme supérieure à la somme due par les intéressés à l'issue de la procédure d'imposition, est sans incidence sur le bien-fondé des impositions litigieuses ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C...sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à la décharge partielle des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2006 et 2007 ainsi que des pénalités dont elles ont été assorties ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. et Mme C...et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1 : Les bases des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu assignées à M. et Mme C...au titre des années 2006 et 2007 sont respectivement réduites des sommes de 43 250 euros et 213,16 euros.
Article 2 : M. et Mme C...sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, ainsi que des pénalités y afférentes, correspondant à ces réductions des bases d'imposition.
Article 3 : Le jugement n° 1002600 - 1101562 du 16 mai 2014 du tribunal administratif de Grenoble est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à M. et Mme C...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de M. et Mme C...est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié M. et Mme A...C...et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 24 mai 2016 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Mear, président-assesseur,
Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 14 juin 2016.
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N° 14LY02358