Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 6 août 2104, M. C..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 30 mai 2014 ;
2°) de le décharger de ces impositions et des pénalités y afférentes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. C... soutient que :
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
- l'administration ne pouvait, pour l'année 2005, mettre en oeuvre les procédures de taxation d'office, pour la taxe sur la valeur ajoutée, et d'évaluation d'office, pour les bénéfices industriels et commerciaux, respectivement prévues aux articles L. 66-3° et L. 73 du livre des procédures fiscales, car ayant cessé son activité à titre individuel le 31 décembre 2004, il n'était pas soumis à l'obligation de déposer des déclarations pour son activité, laquelle était exercée dans le cadre de la SARL C...; qu'à supposer même que l'administration apporte la preuve qu'il ait poursuivi une telle activité, les bénéfices afférents à l'activité individuelle devaient être réintégrés aux résultats de la société ;
Sur le bien fondé des impositions :
S'agissant des bénéfices industriels et commerciaux :
- au titre de l'année 2005, puisque son activité était exercée dans le cadre de la SARLC..., les bénéfices afférents à l'activité individuelle devaient être réintégrés aux résultats de cette société et ne pouvaient être imposés en son nom propre ;
- le rejet de la comptabilité pour les années 2003 et 2004 n'est pas fondé puisque les insuffisances de la comptabilité étaient imputables à un comptable qui a été mis en examen et a cessé son activité sans remettre à ses clients les documents qui lui avaient été confiés concernant tant les charges que les recettes, et notamment les factures de sous-traitance ; l'administration aurait dû exercer son droit de communication auprès des sous-traitants et des fournisseurs pour obtenir ces documents ;
- les reconstitutions de recettes ont été réalisées sur la seule base des encaissements sur son compte bancaire, sans que soient prises en compte les charges correspondantes, prélevées sur son compte bancaire, ce que l'administration aurait pu vérifier en mettant en oeuvre son droit de communication auprès des fournisseurs et des sous-traitants ;
- en méconnaissance de la documentation de base DB 4 G 3342 du 25 juin 1998 le service n'a utilisé qu'une méthode d'évaluation pour reconstituer sa comptabilité et ne s'est pas fondé sur les conditions concrètes de fonctionnement de l'entreprise ;
S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée :
- il était bien fondé à déduire la taxe sur la valeur ajoutée déductible payée au titre des prestations de sous-traitance et de fournitures qu'il a réglées, ce que l'administration aurait pu vérifier en mettant en oeuvre son droit de communication.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 décembre 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Le ministre des finances et des comptes publics soutient que :
- les conclusions de la demande tendant à la décharge des impositions dues au titre de l'année 2003, tant en matière d'impôt sur le revenu que de taxe sur la valeur ajoutée, sont tardives, le délai de réclamation expirant, tant en application de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales que de l'article R. 196-3 du même livre, le 31 décembre 2009, alors que M. C... n'a déposé ses réclamations préalables que les 20, 21 et 22 décembre 2010 ;
- les autres moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 10 juin 2015 la clôture d'instruction a été fixée au 26 juin 2015, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Besse, rapporteur public.
1. Considérant que M. C..., qui exerçait une activité de carreleur, a déclaré avoir cessé l'exercice de cette activité à titre individuel le 31 décembre 2004, et a, pour poursuivre cette même activité, créé à compter du 1er janvier 2005, avec son frère, une SARL dont il était le gérant ; que son activité individuelle a fait l'objet d'une première vérification de comptabilité portant sur les années 2003 et 2004, puis d'une nouvelle vérification de comptabilité pour la période portant sur l'année 2005, l'administration ayant considéré qu'il avait poursuivi son activité individuelle de façon occulte postérieurement à sa déclaration de cessation d'activité, concomitamment à l'activité de même nature exercée par la SARL, qui a elle aussi fait l'objet d'une vérification de comptabilité ; qu'à l'issue de ces vérifications, l'administration a adressé à M. C...deux propositions de rectification datées du 20 décembre 2006 et du 10 mai 2007 portant sur des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée portant sur les années 2003 à 2005 ; que, s'agissant des exercices clos en 2003 et 2005, ces impositions supplémentaires ont été notifiées, pour les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, selon la procédure d'évaluation d'office prévue par l'article L. 73 du livre des procédures fiscales, et pour les rappels de taxe sur la valeur ajoutée, selon la procédure de taxation d'office prévue au 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales ; que les impositions supplémentaires concernant l'année 2004 ont été notifiées selon la procédure contradictoire ; que M. C...n'ayant pas présenté d'observations sur ces deux propositions de rectification, les impositions supplémentaires en résultant et les pénalités afférentes ont été mises en recouvrement le 23 août 2007 concernant les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et le 30 septembre 2007 s'agissant des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ; que M. C... relève appel du jugement du 30 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités y afférentes ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : 3° aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes ... " ; qu'aux termes de l'article L. 73 du même livre : " Peuvent être évalués d'office : 1° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus provenant d'entreprises industrielles, commerciales ou artisanales, ou des revenus d'exploitations agricoles imposables selon un régime de bénéfice réel, lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 53 A du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal. (...) Les dispositions de l'article L. 68 sont applicables dans les cas d'évaluation d'office prévus aux 1° et 2° " ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, bien qu'il ait déclaré avoir cessé d'exercer son activité de carreleur à titre individuel à compter du 31 décembre 1994, M. C...a poursuivi, à titre individuel, pour son propre compte une activité de carreleur en 2005 ; qu'il a reconnu au cours d'un entretien avec le vérificateur le 5 décembre 2006 avoir conservé certains clients dans le cadre de son activité individuelle ; que ces faits sont confirmés par la circonstance qu'il a facturé, au cours de cette année, des prestations avec son code Siret d'entrepreneur individuel et procédé à la majorité des encaissements clients correspondants sur des comptes ouverts à son nom personnel ; que, contrairement à ce qu'allègue le requérant, le vérificateur a distingué les opérations réalisées par la SARL C...elle-même, et facturées par elle, des opérations réalisées et facturées par M. C...dans le cadre de son activité exercée à titre individuel ; que, bien que l'activité exercée directement par M. C...ait le même objet que l'activité de la SARLC..., l'administration a pu, dans les circonstances de l'espèce, dans la mesure où les prestations étaient directement facturées par M. C...sous son identifiant d'entrepreneur individuel, et qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'il les réalisait en ayant recours aux moyens en matériel et en personnel de la société, estimer qu'elles se rapportaient à l'activité personnelle de M. C...et ne devaient pas être rattachées aux résultats de la SARL C...; que, par suite, l'administration a pu, sans entacher d'irrégularité la procédure d'imposition, mettre en oeuvre la procédure d'imposition d'office prévue au 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales en l'absence de dépôt par M. C...d'une déclaration annuelle CA12 s'agissant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée portant sur la période du 1er janvier au 31 décembre 2005 et la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 73 du livre des procédures fiscales en l'absence de déclaration de résultats s'agissant des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu dues au titre de l'exercice clos en 2005 ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions :
4. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition " ; qu'en l'espèce, les impositions mises à la charge de M. C...au titre des années 2003 et 2005 ont été établies d'office sur le fondement des dispositions des articles L. 66 et L. 73 du livre des procédures fiscales ; que le requérant supporte donc la charge de la preuve de leur exagération ;
5. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. (...). " ; que M. C... n'a formulé aucune observation à l'encontre de la proposition de rectification du 10 mai 2007 portant notamment sur les impositions supplémentaires dues au titre de l'année 2004 ; que par suite, il supporte la charge de la preuve du caractère infondé et exagéré des impositions litigieuses ;
En ce qui concerne les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu résultant du rehaussement des bénéfices industriels et commerciaux :
6. Considérant qu'eu égard à ce qui a été indiqué ci-dessus sur l'exercice par M. C... d'une activité à titre individuel au cours de l'année 2005, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que les revenus tirés de cette activité ne devaient pas être intégrés dans ses propres revenus dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux mais dans le résultat de la société SARLC... ;
Sur le rejet de la comptabilité :
7. Considérant qu'il résulte des propositions de rectification du 20 décembre 2006 et du 10 mai 2007 que pour écarter la comptabilité de M. C...au titre des années 2003 et 2004, le vérificateur s'est fondé sur le fait que l'intéressé avait présenté, lors du contrôle, un document intitulé " Grand livre global du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2004 ", comportant 11 feuillets, ne retraçant que certains comptes, accompagné de factures de ventes et pièces justificatives d'achats et de frais généraux, mais que, pour l'année 2003, les factures de vente s'établissaient à un montant de 53 306,69 euros hors taxe, alors que leur montant comptabilisé et déclaré s'élevait à 38 835 euros, tandis qu'en 2004 elles s'établissaient à 106 544,07 euros pour un montant comptabilisé et déclaré de 66 377 euros ; que le vérificateur a, par ailleurs, noté que M. C...n'avait pas été en mesure de présenter le grand livre définitif de ces exercices, les journaux auxiliaires, un état détaillé des immobilisations, un inventaire des stocks et les relevés bancaires de son activité ; que, s'agissant de l'année 2005, le vérificateur a noté qu'aucun document comptable n'avait été présenté ; que, dans ces conditions, l'administration établit que c'est à bon droit que le vérificateur a écarté comme non probante la comptabilité de M. C...au titre des trois années litigieuses, sans que celui-ci puisse utilement faire valoir qu'au titre des années 2003 et 2004 la comptabilité était tenue par un comptable, qui a été mis en examen et a cessé son activité sans remettre à ses clients les documents qui lui avaient été confiés et que l'administration aurait dû exercer son droit de communication afin d'obtenir auprès des fournisseurs et des sous-traitants certains éléments manquants de la comptabilité ;
Sur la reconstitution des bénéfices nets :
8. Considérant que, contrairement à ce qu'allègue M.C..., l'administration n'a pas uniquement pris en compte les encaissements sur ses comptes bancaires, à l'exclusion de ses charges, pour déterminer son bénéfice net ; qu'au titre de l'exercice clos en 2003, outre les charges qui avaient été comptabilisées, elle a pris en compte, les dépenses de sous-traitance à l'entreprise " SMP Carrelages " dont le montant a été déterminé sur la base des déclarations faites par l'intéressé à partir de ses débits bancaires ; que pour les exercices clos en 2004 et 2005, outre les charges qui avaient été comptabilisées, et des dépenses de sous-traitance qui ont pu être identifiées au cours du contrôle, l'administration a pris en compte un montant complémentaire forfaitaire de charges permettant d'atteindre un montant total de charges correspondant à 42 % du chiffre d'affaires reconstitué, ce qui correspond au pourcentage qui ressortait des propres déclarations de l'intéressé ; que M.C..., auquel incombe la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions litigieuses, ne démontre pas que l'ensemble des débits constatés sur ses comptes bancaires constituerait des charges de sous-traitance déductibles des résultats de son activité individuelle et ne peut utilement soutenir que l'administration aurait dû user de son droit de communication auprès de ses fournisseurs et de ses sous-traitants afin de déterminer le montant des charges qu'il a engagées alors qu'il lui appartenait d'engager de lui-même toutes les démarches nécessaires auprès de ces derniers ;
9. Considérant que si la documentation administrative 4 G 3342 n° 4 du 25 juin 1998 indique que les reconstitutions de recettes doivent être opérées selon plusieurs méthodes et être effectuées à partir des conditions concrètes de fonctionnement de l'entreprise, elle ne peut, en tout état de cause, être utilement invoquée par M. C...s'agissant de simples recommandations qui ne peuvent être opposées à l'administration sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :
10. Considérant qu'en se bornant à faire valoir qu'il était bien fondé à déduire la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les prestations de sous-traitance et les fournitures qu'il a réglées, ce que l'administration aurait pu vérifier en mettant en oeuvre son droit de communication, M. C...n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, du caractère exagéré des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par l'administration fiscale, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, les conclusions qu'il présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. B... C...et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 24 mai 2006 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Mear, président-assesseur,
Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 14 juin 2016
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N° 14LY02604