Par un jugement n° 1300931 du 23 juin 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 15 octobre 2015, présentée pour M. D... C..., il est demandé à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 23 juin 2015 ;
2°) d'annuler ladite décision ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer l'autorisation de regroupement familial au bénéfice de son épouse dans un délai de 30 jours à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard,
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge pour lui de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- le préfet a insuffisamment motivé la décision de refus de regroupement familial, n'a pas procédé à un examen particulier de sa demande et s'est estimé à tort lié par le seul motif des ressources ;
- le préfet a commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation en estimant que ses revenus étaient insuffisants ; c'est à tort que la décision confirmative indique que les revenus des mois de février à juillet 2012 ne pouvaient être pris en compte au motif qu'ils n'entraient pas dans la période des 12 mois précédant le regroupement familial, le préfet lui ayant demandé communication de ces éléments par un courrier du 24 août 2012 et seul le mois de janvier laissait apparaître un revenu inférieur au SMIC ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés ;
- les décisions sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur sa situation personnelle.
Par ordonnance en date du 14 janvier 2016 la clôture d'instruction a été fixée au 9 février 2016, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 février 2016, le préfet du Rhône s'en rapporte à ses écritures de première instance.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 septembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée, relative à l'aide juridique, et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour son application ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Segado, premier conseiller.
1. Considérant que M.C..., ressortissant algérien né le 29 mai 1959, titulaire d'un certificat de résidence algérien de dix ans, a sollicité le regroupement familial au bénéfice de son épouse, le 3 février 2012 ; que, par décision en date du 13 septembre 2012, le préfet du Rhône a refusé de faire droit à sa demande en raison de l'insuffisance de ses ressources ; que, par décision en date du 2 octobre 2012, le préfet a rejeté le recours gracieux formé par l'intéressé ; que M. C...relève appel du jugement du 23 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...). " et qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " ;
3. Considérant que la décision contestée, qui énonce les considérations de droit et les raisons de fait justifiant le rejet de la demande de regroupement familial, est suffisamment motivée au regard des exigences de l'article 3 précité de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet a procédé à un examen particulier de sa demande de regroupement familial et, notamment, qu'il ne s'est pas estimé tenu de rejeter la demande au seul motif tiré de ce que les conditions de ressources prévues à l'article 4 de l'accord franco-algérien n'étaient pas remplies, mais a procédé à un examen de la situation de l'intéressé tant au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qu'à titre dérogatoire ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 4 de l'accord francoalgérien du 27 décembre 1968 modifié susvisé : " Les membres de la famille qui s'établissent en France sont mis en possession d'un certificat de résidence de même durée de validité que celui de la personne qu'ils rejoignent. / Sans préjudice des dispositions de l'article 9, l'admission sur le territoire français en vue de l'établissement des membres de famille d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence d'une durée de validité d'au moins un an, présent en France depuis au moins un an sauf cas de force majeure, et l'octroi du certificat de résidence sont subordonnés à la délivrance de l'autorisation de regroupement familial par l'autorité française compétente. / Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : / 1 - Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont pris en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales. L'insuffisance des ressources ne peut motiver un refus si celles-ci sont égales ou supérieures au salaire minimum interprofessionnel de croissance " ;
6. Considérant qu'il résulte de la combinaison des stipulations précitées de l'article 4 de l'accord franco-algérien et des dispositions des articles R. 411-4 et R. 421-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui lui sont compatibles, que le caractère suffisant du niveau de ressources du demandeur est apprécié sur la période de douze mois précédant le dépôt de la demande de regroupement familial, par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum interprofessionnel de croissance au cours de cette même période même si, lorsque ce seuil n'est pas atteint au cours de la période considérée, il est toujours possible pour le préfet de prendre une décision favorable en tenant compte de l'évolution des ressources du demandeur, y compris après le dépôt de la demande ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et, comme l'ont indiqué les décisions litigieuses, que pour solliciter la venue en France de son épouse, M. C...se prévalait, au titre de la période de référence allant de février 2011 à janvier 2012, de ressources mensuelles, y compris les indemnités journalières perçues en janvier 2011, d'un montant total de 1 131,51 euros, inférieures au montant du salaire minimum interprofessionnel de croissance s'élevant à 1 369,80 euros sur la même période ; que le requérant fait valoir que le préfet a sollicité le 24 août 2012 des justificatifs de ressources concernant aussi les mois de février à juillet 2012 ; que toutefois, outre que le préfet pouvait légalement, sans entacher ses décisions de refus et de rejet du recours gracieux d'erreur de droit, se fonder sur les revenus perçus par M. C... au cours des 12 derniers mois précédant le dépôt de la demande de regroupement familial formée le 3 février 2012 pour vérifier que l'intéressé remplissait les conditions de ressources prévues par l'article 4 de l'accord franco-algérien précité, l'intéressé s'est en tout état de cause abstenu de transmettre lesdits justificatifs avant la décision de refus du 13 septembre 2012 ; qu'il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que les revenus perçus au cours des douze mois précédents la décision de refus et la décision rejetant le recours gracieux, soit au cours des périodes de septembre 2011 à août 2012 et d'octobre 2011 à septembre 2012, ont atteint une moyenne mensuelle au moins égale au salaire minimum de croissance en vigueur, au vu des éléments produits par l'intéressé qui font au demeurant état d'une moyenne mensuelle inférieure à celle correspondant aux douze mois précédant la demande, notamment au cours des mois de juillet à septembre 2012 ; que, dans ces conditions, c'est sans erreur d'appréciation, sans erreur de droit et sans méconnaître les stipulations précitées de l'article 4 de l'accord franco-algérien que le préfet du Rhône a pu estimer que le requérant ne justifiait pas de ressources stables et suffisantes permettant de subvenir aux besoins de sa famille ;
8. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
9. Considérant que M. C... fait valoir qu'il vit en France depuis 1992, qu'il dispose d'un certificat de résidence de 10 ans, bénéficie d'un contrat à durée indéterminée depuis juillet 2012, qu'il a en France un enfant, né le 23 décembre 1993 d'une précédente union, sans apporter cependant d'autres éléments sur les conditions de son séjour en France et notamment sur les relations qu'il entretient avec cet enfant ; qu'il ressort en outre des pièces du dossier qu'il a épousé MmeB..., sa compatriote, le 13 mars 2011, un an et demi avant les décisions litigieuses ; que le contrat de travail dont se prévaut le requérant a été établi un peu plus d'un an avant les décisions litigieuses et il n'est pas justifié, comme il a été dit ci-dessus, que l'intéressé dispose des ressources stables et suffisantes notamment à raison de ce contrat de travail ; qu'enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il existe un obstacle, à raison de ces décisions, à la poursuite de la vie familiale des époux C...en Algérie ; que dans les circonstances de l'espèce, le préfet n'a, par les décisions litigieuses, pas porté une atteinte disproportionnée au droit des époux C...de mener une vie privée et familiale normale au regard des buts poursuivis et n'a pas ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, ces décisions ne sont pas davantage entachées d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de la situation personnelle des époux C...;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C..., et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 19 mai 2016, à laquelle siégeaient :
M. Faessel, président de chambre,
M. Seillet, président-assesseur,
M. Segado, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 juin 2016.
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N° 15LY03336