Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 16 décembre 2014, complétée par un mémoire enregistré le 8 juillet 2015, Mme B...représentée par Me D...demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 17 octobre 2014 ;
2°) de condamner la commune du Pradet à lui verser les sommes demandées ;
3°) et de mettre à la charge de la commune du Pradet une somme de 2 500 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la commune, propriétaire d'arbres infestés à proximité de sa propriété, a méconnu l'obligation de communication appropriée auprès des détenteurs de végétaux sensibles prévue par l'article 3 de l'arrêté du 21 juillet 2010 ;
- le tribunal a retenu à tort qu'elle avait reçu une communication appropriée alors qu'elle a dû rechercher par elle-même les informations nécessaires ;
- la notice produite par la commune et l'organisation d'une conférence lors du salon des plantes et fleurs ne démontrent pas une communication suffisante en particulier dans la zone contaminée ;
- la commune a reconnu sa responsabilité ;
- la faute commise est directement à l'origine d'une perte de chance de procéder au traitement préventif du palmier qui a dû être traité, puis tronçonné, arraché et remplacé ;
- l'abattage de l'arbre, planté pour la naissance de son fils et d'une grande valeur esthétique, lui a causé un préjudice moral.
Par un mémoire en défense enregistré le 31 mars 2015, la commune du Pradet conclut au rejet de la requête de Mme B...et à ce que soit mise à la charge de celle-ci une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens invoqués par la requérante n'est fondé.
Le 2 mai 2016, la Cour a informé les parties que la décision à intervenir était susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office tiré de ce que l'action en responsabilité pour faute formée à l'encontre de la commune du Pradet et non de l'Etat à raison de la mise en oeuvre de l'arrêté ministériel du 21 juillet 2010 était mal dirigée.
Mme B...a présenté le 9 mai 2016 des observations sur le moyen susceptible d'être relevé d'office par la Cour, par lesquelles elle persiste dans les mêmes fins que sa requête.
Elle soutient que la commune est responsable de ses propres manquements aux obligations de surveillance et de signalement mises à sa charge par l'arrêté ministériel.
La commune du Pradet a présenté des observations le 12 mai 2016 sur le moyen susceptible d'être relevé d'office par la Cour, qu'elle déclare s'approprier.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- l'arrêté du ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche du 21 juillet 2010 relatif à la lutte contre le Rhynchophorus ferrugineus ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Hameline,
- les conclusions de M. Thielé, rapporteur public,
- et les observations de Me C...substituant MeD..., représentant MmeB....
Vu les notes en délibéré présentées le 25 mai 2016 pour Mme B...et le 27 mai 2016 pour la commune du Pradet.
1. Considérant que Mme A...B...est propriétaire sur le territoire de la commune du Pradet d'une habitation avec jardin dans lequel était planté depuis une vingtaine d'années un palmier " Phoenix " qu'elle a fait curer puis abattre à la suite d'une infestation de celui-ci par le charançon rouge (Rhynchophorus ferrugineus) en 2011 ; qu'elle a réclamé le 8 février 2012 au maire du Pradet la réparation des préjudices subis de ce fait, qu'elle estime imputables au comportement fautif de la commune ; que le maire a rejeté cette réclamation par courrier du 27 mars 2012 ; que Mme B...a saisi le tribunal administratif de Toulon de conclusions tendant à la condamnation de la commune du Pradet à lui verser une somme de 16 434,08 euros majorée des intérêts au taux légal au titre de son préjudice matériel ainsi qu'une somme de 1 500 euros au titre de son préjudice moral ; que, par jugement du 17 octobre 2014 dont Mme B... relève appel, le tribunal administratif a rejeté l'ensemble de ses demandes ;
Sur le bien-fondé du jugement contesté :
2. Considérant que l'Etat est compétent afin de prendre les mesures réglementaires et matérielles relevant de la police administrative de la protection des végétaux sur le territoire national dans les conditions fixées par les articles L. 250-1 et suivants et L. 251-3 et suivants du code rural et de la pêche maritime ; que les articles 3, 10 et 14 de l'arrêté du ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche du 21 juillet 2010 relatif à la lutte contre le Rhyncophorus ferrugineus édicté dans ce cadre n'imposaient à la commune du Pradet, dont le maire ne dispose pas lui-même de pouvoirs de police spéciale en la matière, que d'apporter sa collaboration à la politique de lutte contre le charançon rouge menée par l'Etat, et notamment de fournir un " appui " aux services de la direction de l'agriculture et de la forêt compétents dans la réalisation d'une " communication appropriée " auprès des détenteurs de palmiers sur les obligations de ces derniers et sur la définition d'un périmètre géographique de lutte ;
3. Considérant que les dispositions de l'article L. 251-11 du code rural et celles de l'arrêté ministériel du 21 juillet 2010 faisaient par ailleurs obligation à la commune du Pradet, comme à tout détenteur de végétaux, d'assurer la surveillance des spécimens situés sur son domaine public et privé, et, en cas de détection de la présence de l'organisme nuisible, de déclarer celle-ci aux services de l'Etat chargés de la protection des végétaux et de prendre des mesures d'éradication selon les modalités définies par l'arrêté ;
4. Considérant, d'une part, que si Mme B...fait valoir qu'elle n'a pas reçu de communication appropriée en application des dispositions des articles 3 et 10 de l'arrêté ministériel du 21 juillet 2010, et n'a ainsi pu savoir dans un délai utile ni que les propriétaires de palmiers devaient exercer une surveillance particulière ni que sa propriété se trouvait dans une zone regardée comme contaminée, il résulte de ce qui précède qu'elle ne peut, en tout état de cause, utilement rechercher de ce fait que la responsabilité de l'Etat dont les services sont chargés de définir le périmètre des zones contaminées dans les conditions prévues aux articles 4 à 8 de l'arrêté, et de contrôler l'ensemble des opérations de surveillance et de lutte ainsi que le précisent les articles 10 et 14 de ce même arrêté ; que la requérante ne saurait, dès lors, invoquer la responsabilité pour faute de la commune du Pradet à raison de l'obligation d'information des propriétaires de végétaux résultant de l'arrêté ministériel, alors d'ailleurs que la commune relève sans être valablement contredite qu'elle a diffusé sur son territoire le 2 septembre 2010 une note à l'intention des propriétaires de palmiers ;
5. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que la commune du Pradet a procédé en novembre 2011 aux mesures de destruction des végétaux contaminés lui appartenant sur le terrain de la bibliothèque municipale conformément aux prescriptions de l'arrêté ministériel ; qu'il n'est pas établi, et qu'il n'a au demeurant pas été soutenu avant la clôture de l'instruction par la requérante que la commune se serait par ailleurs abstenue, après avoir constaté la présence de l'organisme nuisible sur les palmiers entourant la bibliothèque, d'en aviser les services de l'Etat chargés de la protection des végétaux ainsi que le lui imposait l'article 3 de l'arrêté ministériel, afin que ceux-ci puissent étendre en conséquence le périmètre de lutte ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...ne démontre pas que la responsabilité de la commune du Pradet serait engagée à son égard à raison des faits susmentionnés ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner la réalité des préjudices qu'elle invoque ni leur lien de causalité avec les faits litigieux, la requérante n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande dirigée contre la commune du Pradet ; que sa requête doit, par suite, être rejetée ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune du Pradet, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à Mme B...la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune du Pradet présentées sur le fondement des mêmes dispositions ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune du Pradet sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et à la commune du Pradet.
Copie en sera adressée au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.
Délibéré après l'audience du 23 mai 2016, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Pocheron, président-assesseur,
- Mme Hameline, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 juin 2016.
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N° 14MA04986