Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 1er décembre 2017, Mme A...C..., représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour est insuffisamment motivée en fait ; sa demande d'admission exceptionnelle au séjour au titre du travail et de la vie privée et familiale n'a pas été examinée dans ses deux branches ; le préfet de la Loire-Atlantique a commis une erreur de droit en ajoutant une condition d'expérience professionnelle en France qui n'est pas prévue par l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le préfet de la Loire-Atlantique a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant à l'absence de circonstances exceptionnelles justifiant la délivrance d'un titre de séjour ; la décision de refus de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de sa durée de séjour en France, de ses liens privés et familiaux et d'absence d'attaches au Cameroun ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas motivée ; elle doit être annulée compte tenu de l'illégalité de la décision de refus de séjour ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'un éloignement reviendrait à la priver de toute attache familiale et personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de sa durée de séjour en France, de ses liens privés et familiaux et d'absence d'attaches au Cameroun.
Par un mémoire, enregistré le 16 janvier 2018, la préfète de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que :
-les moyens tirés de l'absence d'examen de sa situation privée et familiale dans le cadre de l'instruction de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour et de ce que la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sont pas fondés ;
- elle s'en remet, s'agissant des autres moyens présentés, à ses écritures de première instance.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 30 octobre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Malingue a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeC..., ressortissante camerounaise née le 10 avril 1985, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 novembre 2016 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Sur l'admission exceptionnelle au séjour :
2. L'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. ". En présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention "vie privée et familiale" répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant par là-même des motifs exceptionnels exigés par la loi. Il appartient en effet à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger, ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.
3. Il résulte des termes mêmes de l'arrêté du 10 novembre 2016 que le préfet de la Loire-Atlantique a rejeté la demande présentée par Mme C...sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en motivant cette décision au regard à la fois des éléments pris en compte pour la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " et des éléments de situation privée et personnelle de la requérante pris en compte pour la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Par conséquent, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que sa demande n'a pas été examinée dans son intégralité.
4. Il ressort également des termes de l'arrêté contesté que le préfet de la Loire-Atlantique a rejeté la demande de titre en qualité de salarié aux motifs que Mme C...n'a obtenu aucun diplôme depuis son entrée en France, que sa présence sur le territoire n'est établie qu'à compter de l'année 2012, qu'elle ne justifie pas des qualifications en adéquation avec le poste mentionné dans le contrat de travail de la société Wouri Entertainment, que le salaire proposé est juste équivalent au salaire minimum interprofessionnel de croissance, que la société ne donne pas toutes les garanties de sécurité et de viabilité de son activité et que l'intéressée ne justifie d'aucune ancienneté dans une activité salariée. Ce faisant, l'autorité administrative a pris en compte la qualification, l'expérience et les diplômes de la requérante ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel elle postule et l'ancienneté de son séjour en France. Contrairement à ce que soutient MmeC..., le préfet n'a donc ajouté aucune condition qui ne serait pas prévue par la loi et n'a pas commis d'erreur de droit.
5. Si Mme C...fait valoir l'ancienneté de son séjour en France, le contrat de travail qui lui est proposé par la société Wouri Entertainment en qualité de " community manager ", ses liens personnels et familiaux en France ainsi que sa bonne intégration, ces circonstances ne peuvent être regardées comme constituant un motif humanitaire ou exceptionnel au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile justifiant que lui soit délivré un titre de séjour sur ce fondement. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que l'autorité administrative a commis une erreur manifeste d'appréciation en rejetant sa demande d'admission exceptionnelle au séjour tant au vu de la délivrance d'une carte de séjour portant la mention " salarié " que de la délivrance de celle portant la mention " vie privée et familiale ".
Sur l'atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale :
6. Il ressort des pièces du dossier que Mme C...est entrée irrégulièrement en France le 11 septembre 2011, selon ses déclarations. Elle est célibataire et sans enfant. Si elle se prévaut de la présence en France de son frère et de son épouse ainsi que de sa cousine, ceux-ci résident à Paris et Lille, villes qui sont éloignées de Bouguenais où elle loue un appartement depuis le 1er juillet 2014. Les seuls faits que ses parents sont décédés et que son autre frère réside à Dubai ne permettent pas de tenir pour établi qu'elle est dépourvue de toute attache au Cameroun, pays dont elle est originaire et où elle a vécu jusqu'à l'âge de 26 ans. Dans ces conditions, et en dépit de ses efforts d'intégration sociale et professionnelle et de formation, l'arrêté contesté n'a pas porté à son droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur les autres moyens :
7. Mme C...se borne à reprendre en appel, sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de séjour et du défaut de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
8. La décision de refus de séjour n'étant pas annulée, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit l'être par voie de conséquence.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par suite, sa requête, y compris les conclusions portant sur les frais liés au litige, doit être rejetée.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, à la préfète de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 19 avril 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président-assesseur,
- Mme Malingue, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 mai 2018.
Le rapporteur,
F. MalingueLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°17NT03596
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