Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 20 décembre 2017 et 27 février 2018, M. C... A..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler ces décisions ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Loire-Atlantique de lui délivrer, à titre principal, un titre de séjour mention " vie privée et familiale " et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir et de le munir d'un récépissé pendant la période de ce réexamen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision portant refus de séjour est insuffisamment motivée ; sa situation professionnelle, sa situation privée et familiale et ses craintes d'être exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Guinée constituent des circonstances exceptionnelles et des considérations humanitaires justifiant que lui soit délivré, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un titre de séjour ; la décision de refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de sa vie de couple avec une ressortissante malienne enceinte et mère d'un enfant français, de son intégration professionnelle et de sa situation d'isolement dans son pays d'origine ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas motivée ; elle doit être annulée du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que sa vie privée et familiale ne peut que se dérouler sur le territoire français ; elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors que ses parents ont vocation à être renvoyés vers des pays différents ;
- la décision fixant le pays de renvoi n'est pas motivée ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'en raison de la nationalité différente de sa compagne et de la sienne, elle conduit à une séparation de fait du couple ; elle méconnaît l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il craint de subir des traitements inhumains et dégradants en cas de retour en Guinée.
Par un mémoire, enregistré le 22 janvier 2018, la préfète de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que :
- la compagne de M. A...ne justifie pas être mère d'un enfant français et l'enfant dont M. A...est le père n'est pas né ;
- le jugement attaqué fait état de l'activité professionnelle de M.A... ;
- la circonstance que les intéressés sont de deux nationalités distinctes est sans incidence sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle s'en remet, s'agissant des autres moyens présentés, à ses écritures de première instance.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 29 novembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990, notamment son article 3 paragraphe 1 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Malingue,
- et les observations de MeB..., substituant MeD..., représentant M.A....
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., ressortissant guinéen né le 3 avril 1985, relève appel du jugement du 15 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 novembre 2016 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Sur l'admission exceptionnelle au séjour :
2. L'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. ". En présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale" répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant par là-même des motifs exceptionnels exigés par la loi. Il appartient en effet à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger, ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.
3. M.A..., qui déclare être entré en France en juin 2014, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en se prévalant de l'activité professionnelle à laquelle il s'est livré en France. Toutefois, si les pièces qu'il produit permettent d'établir qu'il a travaillé du 24 juillet au 31 août 2015, le 12 novembre 2015, du 3 au 15 décembre 2015, du 5 au 6 janvier 2016, du 14 au 24 janvier 2016 et du 22 mai au 31 août 2016 en qualité de plongeur, agent d'entretien ou manoeuvre, le préfet de la Loire-Atlantique a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, estimer que son ancienneté en qualité de salarié était insuffisante pour justifier d'une insertion professionnelle significative. Par ailleurs, s'il se prévaut en appel d'une promesse d'embauche, il s'agit d'un contrat à durée indéterminée en tant que plongeur qui lui est proposé à compter du 13 juillet 2017, soit bien postérieurement à la décision contestée. Dès lors, M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet a estimé qu'il ne justifiait pas de motifs exceptionnels justifiant la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié.
4. Par ailleurs, si M. A...se prévaut désormais de sa situation de concubinage, dont il n'avait pas fait état dans sa demande auprès des services de la préfecture, avec une ressortissante malienne et de leur enfant dont la naissance était attendue pour le mois de janvier 2018, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, leur relation était récente, même en admettant une vie commune à compter du mois de juin 2016. Il n'est, par ailleurs, pas établi que l'enfant de nationalité française de sa compagne résidait avec eux. Enfin, si M. A...évoque des craintes en cas de retour en Guinée compte tenu du passé d'opposant politique de son père, il ne produit aucun élément justifiant de la réalité de leur bien-fondé. Dès lors, ces circonstances ne peuvent être regardées comme constituant un motif humanitaire ou exceptionnel au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile justifiant que lui soit délivré un titre de séjour sur ce fondement. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que l'autorité administrative a commis une erreur manifeste d'appréciation en rejetant sa demande d'admission exceptionnelle au séjour.
Sur l'atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale :
5. Il ressort des pièces du dossier que M. A...est entré en France en juin 2014, selon ses déclarations. A la suite du rejet de la demande d'asile qu'il avait déposée le 2 septembre 2014 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par une décision du 22 janvier 2015, confirmée le 23 décembre 2015 par la Cour nationale du droit d'asile, le préfet de la Loire-Atlantique lui a, par arrêté du 25 février 2016, refusé la délivrance d'un titre de séjour et fait obligation de quitter le territoire français. Le requérant a déposé une demande de titre de séjour en qualité de salarié le 1er février 2016, réitérée le 23 mai 2016, sans faire état de sa situation familiale. S'il se prévaut de sa situation de concubinage avec une ressortissante malienne, mère d'un enfant français et alors enceinte de lui, les pièces produites sont insuffisantes pour justifier, à la date de l'arrêté contesté, de l'ancienneté de cette relation qui a débuté, selon lui, en mai 2016 ainsi que la réalité d'une vie commune à compter du 1er juin 2016. Ainsi qu'il a été précédemment dit, il n'est pas établi que l'enfant de nationalité française de sa compagne résidait avec eux de sorte que celle-ci aurait vocation à rester en France. En outre, s'il se prévaut de son intégration professionnelle, il résulte également que ce qui a été dit auparavant que celle-ci ne revêt pas un caractère significatif. Par ailleurs, le seul fait que ses parents seraient décédés ne permet pas de tenir pour établi qu'il soit dépourvu de toute attache dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 29 ans. Dans ces conditions, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le droit au respect de sa vie privée et familiale implique qu'il reste en France. Enfin, dès lors qu'il n'établit ni même n'allègue ne pas être admissible dans le pays de sa compagne et que celle-ci ne serait pas admissible en Guinée, la décision mentionnant qu'il pourra être reconduit à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout pays pour lequel il établit être admissible n'implique pas, en elle-même, une séparation de la cellule familiale. Par conséquent, M. A...n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté contesté, en toutes ses décisions, méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur la méconnaissance du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant :
6. Si M. A...soutient que l'arrêté contesté porte atteinte à l'intérêt supérieur de son enfant, les stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ne sont pas applicables à un enfant qui n'était pas encore né à la date du 24 novembre 2016 à laquelle cet arrêté a été pris.
S'agissant des autres moyens :
7. M. A...se borne à reprendre en appel, sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau, les moyens tirés de l'insuffisance ou du défaut de motivation des décisions contestées ainsi que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
8. La décision de refus de séjour n'étant pas annulée, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit l'être par voie de conséquence.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par suite, sa requête, y compris les conclusions portant sur les frais liés au litige, doit être rejetée.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, à la préfète de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 19 avril 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président-assesseur,
- Mme Malingue, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 mai 2018.
Le rapporteur,
F. MalingueLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°17NT03856
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