Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 20 mai 2014 et le 19 mars 2015, la société ISTA Comptage Immobilier Services, représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 20 mars 2014 ;
2°) de condamner l'OPH d'Orléans au paiement de la somme de 310 182,20 euros TTC, assortie des intérêts moratoires et de la capitalisation de ces intérêts, en exécution des quatre contrats conclus le 31 mars 2008 ;
3°) de condamner l'OPH d'Orléans à lui verser une somme de 20 000 euros au titre des intérêts compensatoires ;
4°) de mettre à la charge de l'office public de l'habitat d'Orléans la somme de 4 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ont insuffisamment motivé leur réponse au moyen tiré de la méconnaissance, par l'OPHLM d'Orléans, du principe de loyauté des relations contractuelles ;
- les stipulations contenues dans le bordereau des prix unitaires doivent être interprétées, compte tenu de la commune intention des parties et de l'exigence de loyauté des relations contractuelles, comme comportant l'obligation de rachat des compteurs d'eau par l'OPH, au prix de leur valeur non amortie, en cas de changement de prestataire à l'échéance du marché ; cette obligation de rachat ne vient en contradiction d'aucune des stipulations du contrat ;
- outre les intérêts moratoires, des intérêts compensatoires sont dus en raison de la mauvaise fois du débiteur.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 septembre 2014, l'OPH d'Orléans conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la société ISTA Comptage Immobilier Services sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que le jugement attaqué est régulier et que les moyens invoqués par l'OPH d'Orléans ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code civil ;
- l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Loirat, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., représentant la société ISTA Comptage Immobilier Services, et de MeA..., représentant l'office public de l'habitat (OPH) d'Orléans.
1. Considérant que l'office public de l'habitat (OPH) d'Orléans a confié à la société ISTA Comptage Immobilier Services, par quatre marchés distincts conclus le 31 mars 2008 et notifiés le lendemain, la prestation du service du comptage et de la répartition des consommations d'eau, comprenant la location, l'entretien et le relevé des compteurs dans les résidences gérées par chacune de ses agences d'Argonne, de l'Ouest, du Centre et de la Source ; qu'à l'expiration de ces contrats d'une durée de cinq ans, l'OPH d'Orléans a lancé un nouvel appel d'offres au terme duquel la société ISTA Comptage Immobilier Services n'a pas été déclarée attributaire des nouveaux marchés ; que par un courrier du 29 avril 2013, la société requérante a réclamé à l'OPH, par quatre factures distinctes, le coût du rachat de ses compteurs d'eau froide et d'eau chaude sanitaire, à hauteur d'un prix unitaire de 25 euros HT par compteur ; qu'elle relève appel du jugement du 20 mars 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses demandes tendant à la condamation de l'OPH d'Orléans à lui verser la somme totale de 310 182, 60 euros TTC, incluant une somme de 20 000 euros à titre d'intérêts compensatoires, qu'elle estime lui être due au titre du rachat de ces compteurs ;
Sur la responsabilité contractuelle :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du cahier des clauses particulières (CCP) applicable au marché de fournitures et prestations de service en cause : " la prestation attendue est celle du service de comptage et de la répartition des consommations d'eau dans les immeubles du patrimoine de l'office. / Elle comprend : - la location des compteurs individuels (fournis, posés), - les vérifications du bon fonctionnement et les entretiens, - les relevés de compteurs (et leur exploitation) individuels en général, - l'établissement de bordereaux de consommation individuelle informatisés, - le remplacement des compteurs si nécessaire ", étant précisé que " le relevé des compteurs généraux est effectué à titre gratuit par l'entreprise " ; que l'article 4 du CCP prévoit que : " le marché est conclu pour une durée de cinq ans à compter du 01/04/2008. Il ne pourra être reconduit " ; que l'article 6 du même CCP définit le contenu de la prestation et que l'article 6-1, intitulé " location des appareils ", mentionne le nombre et les caractéristiques techniques des compteurs à installer ; que l'article 10, relatif aux prestations complémentaires, indique en outre que : " Le remplacement des compteurs loués pour vétusté ou défectuosité est compris dans le contrat. / Toute modification du nombre de compteurs devra être concrétisé par la passation d'un avenant au marché... " ; qu'enfin, l'article 22 du CCP, relatif à la mise en place des compteurs et à leur enlèvement, prévoit que : " Le titulaire du présent marché fait son affaire de l'enlèvement et de la remise à l'ancien titulaire de ses compteurs actuellement en place " ;
3. Considérant que compte tenu de l'objet et des modalités d'exécution du marché litigieux, clairement définies par les stipulations précitées du CCP, la mention, dans le bordereau de prix unitaires annexé à l'acte d'engagement de la société ISTA, d'une " valeur de rachat de 25 euros HT par compteur en cas de changement de prestataire à échéance du marché ", doit être regardée comme afférente à une simple faculté de reprise des compteurs d'eau par l'office maître d'ouvrage, distincte et extérieure aux prestations constituant l'objet du marché, lequel prévoit la location simple des compteurs individuels de consommation d'eau ; que, par suite, et sans qu'y puisse utilement faire obstacle, la circonstance que ce bordereau de prix constitue, en vertu des stipulations de l'article 3 du CCP, une pièce contractuelle, l'office public de l'habitat d'Orléans ne peut être regardé comme ayant, par la seule signature de cet acte d'engagement, consenti à être tenu de procéder au rachat des compteurs loués dans l'hypothèse où, à l'expiration du contrat, la société ISTA ne serait pas attributaire du nouveau marché ayant le même objet ; qu'ainsi, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en refusant d'acquitter les factures émises le 29 avril 2013 pour avoir paiement d'une somme totale de 259 350 euros HT, l'office public de l'habitat d'Orléans aurait méconnu ses obligations contractuelles ;
4. Considérant par ailleurs que la société ISTA soutient que le rachat par l'office public de l'habitat d'Orléans des compteurs en fin de contrat était une condition indispensable à l'équilibre économique de ce contrat, dès lors que la durée de vie de ces matériels est d'au moins dix ans et que les prix de location consentis pour un marché d'une durée de cinq ans ne lui permettaient pas, en l'absence d'amortissement complet des matériels, de dégager un bénéfice, et que de tels contrats sont usuellement conclus pour une durée de dix ans ; que, toutefois, la société ISTA ne peut être fondée à se prévaloir de ce que les prix pratiqués révèleraient la commune intention des parties de prévoir une obligation de reprise des compteurs d'eau en cas de non reconduction du contrat, dès lors qu'il résulte de l'instruction qu'elle a soumissionné en parfaite connaissance de cause et qu'il lui appartenait de proposer des tarifs tenant compte non seulement d'un amortissement de dépréciation des biens donnés en location, mais également, le cas échéant, d'un amortissement de caducité destiné à corriger l'inadéquation alléguée entre la durée d'usage des biens objet de la prestation de location et la durée du marché ; que la requérante n'est enfin pas fondée à se prévaloir de difficultés matérielles rencontrées dans l'exécution du marché, dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que ces difficultés présentaient un caractère imprévisible lors de la conclusion du contrat ;
Sur les intérêts compensatoires :
5. Considérant qu'aux termes de l'article 1153 du code civil : " Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance. " ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société ISTA n'a pas établi l'existence d'une faute commise par l'office public de l'habitat d'Orléans dans l'exécution de ses obligations contractuelles ; qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction que l'OPH d'Orléans n'aurait pas exécuté de bonne foi les contrats en cause ; que sa demande tendant à la condamnation de l'office à lui verser une somme de 20 000 euros sur le fondement des dispositions précitées du code civil ne peut dès lors qu'être rejetée ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société ISTA Comptage Immobilier Services n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses demandes ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'OPH d'Orléans, qui n'est pas la partie perdante, verse à la société ISTA Comptage Immobilier Services une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société ISTA Comptage Immobilier Services une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par l'OPH d'Orléans et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société ISTA Comptage Immobilier Services est rejetée.
Article 2 : La société ISTA Comptage Immobilier Services versera à l'OPH d'Orléans la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société ISTA Comptage Immobilier Services et à l'Office Public de l'Habitat d'Orléans.
Délibéré après l'audience du 7 juin 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président-assesseur,
- Mme Rimeu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 juin 2016.
Le rapporteur,
C. LOIRAT Le président,
L. LAINÉ
Le greffier,
V. DESBOUILLONS
La République mande et ordonne au préfet du Loiret en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°14NT013722