Par une requête, enregistrée le 15 septembre 2015, M. C...B..., représenté par Me A...demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 2 avril 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 janvier 2015 du préfet d'Ille-et-Vilaine en tant qu'il porte refus de délivrance du titre de séjour sollicité ;
3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour et à titre subsidiaire de procéder au réexamen de sa situation et de l'admettre au séjour durant ce laps de temps, dans un délai de trois jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros à Me A...au titre des dispositions des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- c'est à tort que le préfet a estimé que le défaut de sa prise en charge médicale ne serait pas de nature à emporter des conséquences d'une exceptionnelle gravité et c'est également à tort qu'il a estimé qu'un traitement approprié pour ses troubles psychiatriques existerait en Mongolie alors que les médicaments qui lui sont actuellement administrés ne sont pas disponibles dans son pays d'origine ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, compte tenu de la présence en France de son épouse et de leurs trois enfants mineurs et de la scolarité réussie de ses enfants ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de l'intéressé.
Une mise en demeure a été adressée le 2 novembre 2015 au préfet d'Ille-et-Vilaine.
Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été communiquée au préfet d'Ille-et-Vilaine qui n'a pas produit de mémoire en défense.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 août 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Loirat, président-assesseur.
1. Considérant que M. B...ressortissant mongol né le 27 janvier 1964 à Oulan-Bator (Mongolie), est entré irrégulièrement en France le 15 décembre 2011 ; que son admission provisoire au séjour au titre de l'asile, présentée sous l'identité de Dashdavaa Marya, lui a été refusée par un arrêté du 21 février 2012 du préfet du Loiret ; que sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 31 mai 2013, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 21 mars 2014 ; que le 21 février 2014, M. B...a sollicité, sous sa véritable identité, la délivrance d'un titre de séjour pour raisons de santé auprès des services de la préfecture d'Ille-et-Vilaine ; que le préfet d'Ille-et-Vilaine a, par arrêté du 6 janvier 2015, refusé de délivrer un titre de séjour à M.B..., lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai à destination de la Mongolie ou de tout autre pays où il établirait être légalement admissible, et a prononcé à son encontre une interdiction de retour en France d'une durée d'un an ; que par la présente requête, l'intéressé relève appel du jugement n°1500030 du 2 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 janvier 2015 du préfet d'Ille-et-Vilaine en tant qu'il refuse de lui délivrer un titre de séjour ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté contesté du 6 janvier 2015 en tant qu'il porte refus de délivrance du titre de séjour sollicité :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé (...). Le médecin de l'agence régionale de santé (...) peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) " ;
3. Considérant, que sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;
4. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé allant dans le sens de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
5. Considérant que pour refuser de délivrer un titre de séjour à M.B..., le préfet d'Ille-et-Vilaine s'est notamment fondé sur l'avis du 14 août 2014 émis par le médecin de l'agence régionale de santé de la région Bretagne, selon lequel l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il existe un traitement approprié dans son pays d'origine et qu'il peut voyager sans risque vers la Mongolie ; que ni le certificat médical émanant d'un médecin psychiatre du centre hospitalier Guillaume Régnier de Rennes, établi postérieurement à la décision contestée, selon lequel la prise en charge et le suivi médical de M. B...semble " peu réalisable " en Mongolie, ni le rapport de 2006 élaboré conjointement par une association internationale et par le ministère de la santé en Mongolie et relatif à la situation générale de la santé mentale dans ce pays, ne sont de nature à remettre en cause l'avis précité du médecin de l'agence régionale de santé ; que l'intéressé n'apporte en outre aucun justificatif à l'appui de son allégation selon laquelle les médicaments anti-épileptiques et anti-psychotiques qui lui sont prescrits en France ne seront pas disponibles dans son pays d'origine ; que dans ces conditions et alors que M. B...ne fait valoir aucune circonstance humanitaire exceptionnelle au sens du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet d'Ille-et-Vilaine, n'a pas méconnu les dispositions précitées en prenant la décision contestée de refus de titre de séjour ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que si M. B...se prévaut de la présence en France de son épouse et de leurs trois enfants mineurs, et du parcours scolaire réussi des deux aînés, il ressort, toutefois, des pièces du dossier, qu'il est entré irrégulièrement en France en décembre 2011 à l'âge de quarante sept ans, que son épouse, ressortissante mongole, est elle-même en situation irrégulière sur le territoire français et que rien ne s'oppose à la reconstitution de la cellule familiale en Mongolie où résident deux autres de leurs enfants ; que, dans ces conditions, la décision contestée portant refus de séjour n'a, en tout état de cause, pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale du requérant et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, le préfet d'Ille-et-Vilaine n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle du requérant ;
7. Considérant, en troisième lieu, que la décision de refus de titre de séjour n'a pas pour effet de séparer les enfants de M. B...de leurs parents et qu'il n'est ni établi ni même allégué qu'ils ne pourraient poursuivre leur scolarité en Mongolie ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ne peut qu'être également écarté ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;
9. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par M. B...ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
DECIDE :
Article 1 : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera transmise pour information au préfet d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 7 juin 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président assesseur,
- Mme Rimeu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 juin 2016.
Le rapporteur,
C. LOIRATLe président,
L. LAINÉ
Le greffier,
V. DESBOUILLONS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°15NT02843 2
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