Procédure contentieuse devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 15 juillet et le 4 décembre 2015, M. C...A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1431778 du 4 juin 2015 par laquelle le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 25 novembre 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 800 euros à verser à MeB..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- cette ordonnance est entachée d'irrégularité dans la mesure où il a justifié en première instance des persécutions qu'il avait subies dans son pays d'origine, à raison de son militantisme politique d'opposition et de l'engagement de poursuites judiciaires abusives à son encontre, en indiquant expressément et de manière détaillée les faits qui l'ont conduit à fuir son pays et à craindre pour sa vie en cas de retour ;
- l'arrêté litigieux est entaché d'un défaut de motivation à travers ses trois décisions ;
- cet arrêté méconnait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce qu'il fixe le Bangladesh comme pays de renvoi.
La requête a été communiquée au préfet de police, qui n'a pas présenté de défense.
M. C... A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 16 octobre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation du jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme d'Argenlieu a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.A..., de nationalité bangladaise, né le 2 mars 1984, a déclaré être entré en France le 3 mars 2013 pour y solliciter la reconnaissance du statut de réfugié ; que, par une décision du 21 novembre 2013, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) lui a refusé la qualité de réfugié ; qu'elle a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 3 octobre 2014 ; que le préfet de police a, par un arrêté du 25 novembre 2014, rejeté sa demande de délivrance d'une carte de séjour au titre de l'asile, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que M. A...relève appel de l'ordonnance du 4 juin 2015 par laquelle le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif (...), le vice-président du tribunal administratif de Paris (...) peuvent, par ordonnance : (...) /5° Statuer sur les requêtes qui ne présentent plus à juger de questions autres que la condamnation prévue à l'article L. 761-1 ou la charge des dépens ;(...) / 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.(...) " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...a soulevé devant le Tribunal administratif de Paris plusieurs moyens à l'appui de sa contestation de la décision du préfet de police en tant notamment qu'elle fixe le pays de destination, dont celui tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que les termes dans lesquels ce moyen était présenté permettait d'en saisir le sens et la portée et étaient suffisants pour permettre au juge d'exercer son office en en appréciant le bien-fondé au regard des pièces produites ; que, dans ces conditions, la demande de M. A...ne pouvait pas être rejetée par l'ordonnance attaquée, en application des dispositions précitées, au motif que les faits invoqués par l'intéressé ne pouvaient manifestement pas venir au soutien de ses conclusions ; que, par suite, il y a lieu d'annuler l'ordonnance attaquée puis d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
4. Considérant, en premier lieu, que la décision de refus de titre de séjour vise les articles L. 314-11 8° et L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, fait mention des décisions de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile, et ajoute qu'il n'est pas porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée ; que, par suite, la décision contestée en tant qu'elle emporte refus de titre de séjour est suffisamment motivée ; qu'il en va de même de l'obligation de quitter le territoire laquelle n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte ; qu'enfin, le préfet de police, en visant l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et en indiquant que M. A...n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à cette même convention en cas de retour dans son pays d'origine, a suffisamment motivé la décision fixant le pays de renvoi ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué, à travers ses trois décisions, doit être écarté comme manquant en fait ;
5. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (...) " ; que le moyen tiré de la violation de ces articles étant inopérant à l'encontre des décisions refusant la délivrance d'un titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français, il ne peut utilement être invoqué qu'à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ;
6. Considérant que si M. A...fait valoir qu'il a été victime de persécutions dans son pays par la " ligue Awami " en raison de ses engagements et idéologies politiques au sein du parti socialiste bangladais, sa demande d'admission au statut de réfugié a été rejetée par l'OFPRA puis par la CNDA ; qu'il ne produit aucune pièce nouvelle suffisamment probante pour établir la réalité des risques auxquels il affirme être personnellement exposé, qui seraient susceptibles de faire obstacle à sa reconduite à destination de son pays d'origine ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention précitée et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : L'ordonnance du Tribunal administratif de Paris n° 1431778 du 4 juin 2015 est annulée.
Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police de Paris.
Délibéré après l'audience du 24 mai 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Even, président de chambre,
- M. Dellevedove, premier conseiller,
- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 14 juin 2016.
Le rapporteur,
L. d'ARGENLIEULe président,
B. EVENLe greffier,
I. BEDR
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA02919