Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 27 mai 2014 et le 6 octobre 2015, la SARL Hamant Energie Solaire, représentées par MeA..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1309810/2-1 du 22 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
2°) avant dire droit, de saisir la Cour de justice de l'Union européenne à l'effet qu'elle statue, à titre de question préjudicielle, sur l'interprétation de la jurisprudence communautaire relative à l'application du principe de confiance légitime à tout opérateur économique et, notamment, à un profane en la matière ;
3°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions des 29 octobre 2012 et 17 mai 2013 ;
4°) d'enjoindre à la SA " Electricité de France " de conclure un contrat d'obligation d'achat au tarif de 0,60 euros par kWh à compter du 5 juin 2012, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
5°) d'enjoindre à la SA " Electricité de France " de procéder à la régularisation de sa situation au titre du paiement de la production injectée sur le réseau depuis le 5 juin 2012 sur la base du tarif de rachat de 0,60 euros par kWh ;
6°) de mettre à la charge de la SA " Electricité de France " la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal ne pouvait considérer qu'elle était en mesure, nonobstant sa qualité d'opérateur économique profane, de prévoir la suspension de l'obligation d'achat et la mise en place de mesures dérogatoires en se fondant sur la décision du Conseil d'Etat n° 344972, cette décision étant manifestement contraire à la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne dont il ressort que tout opérateur économique qui se trouve dans une " situation de laquelle il ressort que l'administration a fait naître dans son chef des espérances fondées " est fondé à se prévaloir du principe de confiance légitime ;
- elle est fondée à invoquer le principe de confiance légitime dans la mesure où, compte tenu de sa qualité d'opérateur profane, elle ne peut être regardée comme un opérateur économique prudent et avisé ;
- le tribunal a omis de répondre au moyen tiré de la mauvaise foi ou de l'attitude déloyale de la SA " Electricité de France " ;
- le comportement de la SA " Electricité de France " relève de pratiques déloyales dans le traitement inégalitaire des demandes des petits producteurs et dans l'interprétation des dispositions du décret du 9 décembre 2010 ;
- le tribunal a omis de répondre au moyen tiré d'une situation juridiquement constituée au titre de la signature d'une convention de raccordement avant l'entrée en vigueur du 9 décembre 2010 ;
- les dispositions du décret du 9 décembre 2010 sont inapplicables dès lors qu'en vertu d'une convention de raccordement signée avant l'entrée en vigueur du décret du 9 décembre 2010, elle se trouvait dans une situation juridiquement constituée compte tenu, notamment, du lien étroit et nécessaire entre convention de raccordement et contrat d'obligation d'achat ;
- le tribunal a omis de répondre aux moyens tenant à l'assimilation de la convention de raccordement à la proposition technique et financière et n'a pas motivé le jugement attaqué sur ce point ;
- c'est à tort que le tribunal a assimilé " convention de raccordement " et " proposition technique et financière " pour justifier l'application des dispositions du décret du 9 décembre 2010 alors que ledit décret ne régit, dans ses articles 3 et 4, que la proposition technique et financière ;
- le tribunal ne peut se fonder sur la décision du Conseil d'Etat n° 344972 pour juger que les dispositions de l'article 4 du décret du 9 décembre 2010 ne méconnaissent pas le principe de sécurité juridique ni le principe de confiance légitime dès lors que cette décision n'est revêtue que de l'autorité relative de la chose jugée ;
- elle ne rentre manifestement pas dans la catégorie des " opérateurs économiques prudents et avisés " ;
- l'article 4 du décret du 9 décembre 2010 méconnaît le principe de non-rétroactivité des actes administratifs en tant que, d'une part, il fait abstraction d'une première situation juridiquement constituée et tirée de la signature avant son entrée en vigueur de la convention de raccordement et, d'autre part, il lui fait perdre le bénéfice du tarif fixé par l'arrêté du 10 juillet 2006 en imposant des conditions nouvelles à l'obtention d'un contrat d'obligation d'achat d'électricité ;
- la loi du 10 février 2000 qui ne vise expressément que la suspension de l'obligation d'achat d'électricité pour l'avenir sur une période ne pouvant excéder 10 ans ne peut remettre en cause le bénéfice de cette obligation à des situations juridiquement constituées antérieurement et l'obliger à reprendre la procédure engagée ;
- la suspension de l'obligation d'achat d'électricité n'est pas justifiée par la circonstance que l'obligation d'achat ne répond plus aux objectifs de la programmation pluriannuelle des investissements ;
- l'article 5 du décret du 9 décembre 2010 méconnaît, également, le principe de non-rétroactivité en ce qu'il impose une nouvelle demande complète de raccordement pour bénéficier d'un contrat d'obligation d'achat ;
- les dispositions de l'article 4 du décret du 9 décembre 2010 méconnaissent le principe de sécurité juridique, compte tenu du changement brutal de réglementation auquel elle a dû faire face et de l'atteinte excessive portée à ses intérêts, en imposant sans préavis des délais d'achèvement et de mise en oeuvre de son installation qui se sont révélés trop courts ;
- les dispositions de l'article 4 du décret du 9 décembre 2010 méconnaissent le principe de confiance légitime ;
- le point de départ du délai de mise en service, qui est fonction de l'acceptation de la proposition technique et financière et, par assimilation, de la convention de raccordement, a commencé à courir à compter du 23 novembre 2010 ;
- le délai de 18 mois expirant le 23 mai 2012 a été respecté ;
- à supposer que les dispositions de l'article 4 du décret du 9 décembre 2010 s'appliquent, le délai de 18 mois ne pourrait commencer à courir qu'à compter du 23 novembre 2010 soit de la date d'encaissement du chèque d'acompte, joint à la proposition de raccordement, et matérialisant l'acceptation de ladite proposition ;
- la date d'achèvement des travaux, qui correspond à la date d'obtention du Consuel, soit le 22 mai 2012, respecte le délai de 18 mois ;
- dans le cas d'un retard de ERDF dans les travaux de raccordement au réseau, le délai de 18 mois doit être prorogé pour éviter toute discrimination.
Par deux mémoire en défense, enregistrés le 3 novembre 2014 et le 18 janvier 2016, la SA " Electricité de France ", représenté par Mes Guillaume et Coudray, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SARL Hamant Energie Solaire au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la décision n° 3906 du Tribunal des conflits du 8 juillet 2013 ;
- le code de l'énergie ;
- la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 ;
- le décret n° 2000-1196 du 6 décembre 2000 ;
- le décret n° 2001-410 du 10 mai 2001 ;
- le décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 ;
- l'arrêté du 10 juillet 2006 fixant les conditions d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative du soleil telles que visées au 3° de l'article 2 du décret n° 2000-1196 du 6 décembre 2000 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot,
- les conclusions de M. Sorin, rapporteur public,
- et les observations de Me Coudray, avocat de la SA " Electricité de France ".
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Hamant Energie Solaire demande à la Cour d'annuler le jugement
n° 1309810/2-1 du 22 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation des décisions des 29 octobre 2012 et 17 mai 2013 de la SA " Electricité de France " (EDF) l'ayant informée que l'installation de production photovoltaïque située à Guébestroff ne pouvait plus bénéficier d'une obligation d'achat d'électricité, en application du décret n° 2010-510 du 9 décembre 2010, et refusant de conclure un contrat d'obligation d'achat selon les conditions tarifaires fixées par l'arrêté du 10 juillet 2006, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à la société EDF de conclure un contrat d'obligation d'achat au tarif de 0,60 euros par kWh à compter du 5 juin 2012, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir et, enfin, à ce qu'il soit enjoint à la société EDF de procéder à la régularisation de sa situation au titre du paiement de la production injectée sur le réseau depuis le 5 juin 2012 sur la base du tarif de rachat de 0,60 euros par kWh.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, la SARL Hamant Energie Solaire fait valoir que le tribunal a omis de répondre aux moyens tirés de la mauvaise foi ou de l'attitude déloyale de la société EDF et de la constitution d'une situation juridique au titre de la signature d'une convention de raccordement avant l'entrée en vigueur du décret du 9 décembre 2010. D'une part, le comportement général de la société EDF étant sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse, la circonstance que le tribunal n'ait pas répondu à ce moyen qui est inopérant n'entache pas la régularité du jugement. D'autre part, ainsi qu'il ressort du point n° 5 du jugement attaqué, les premiers juges ont, en jugeant que la conclusion d'une convention de raccordement, laquelle est juridiquement distincte du contrat d'achat, ne permettait pas à la société requérante d'invoquer utilement la garantie du maintien des contrats en cours ont répondu au moyen tiré de la méconnaissance du principe de non-rétroactivité à l'appui duquel la SARL Hamant Energie Solaire s'était prévalu de la constitution de situations juridiques avant l'entrée en vigueur du décret du 9 décembre 2010, qui aurait été de nature à faire obstacle à l'application des dispositions de l'article 4 dudit décret.
3. En second lieu, contrairement à ce que soutient la SARL Hamant Energie Solaire, les premiers juges, ont, d'une part, bien répondu au point n° 6 du jugement attaqué au moyen tiré de ce que la société n'entrait pas dans le champ d'application du décret du 9 décembre 2010 dès lors qu'elle n'avait fait l'objet d'aucune proposition technique et financière, et, d'autre part, ont bien motivé, en se référant au principe de sécurité juridique, l'assimilation qu'ils ont faite entre la convention de raccordement et la proposition technique et financière.
4. Il résulte de ce qui précède que le jugement attaqué n'est entaché d'aucune irrégularité susceptible d'entraîner son annulation.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
5. Aux termes de l'article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, désormais codifié à l'article L. 314-1 du code de l'énergie : " Sous réserve de la nécessité de préserver le bon fonctionnement des réseaux, Electricité de France et, dans le cadre de leur objet légal et dès lors que les installations de production sont raccordées aux réseaux publics de distribution qu'ils exploitent, les distributeurs non nationalisés mentionnés à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée sont tenus de conclure, si les producteurs intéressés en font la demande, un contrat pour l'achat de l'électricité produite sur le territoire national : / [...] ; 2° Les installations de production d'électricité qui utilisent des énergies renouvelables, [...].Un décret en Conseil d'Etat fixe les limites de puissance installée des installations de production qui peuvent bénéficier de l'obligation d'achat. / Sous réserve du maintien des contrats en cours et des dispositions de l'article 50, l'obligation de conclure un contrat d'achat prévu au présent article peut être partiellement ou totalement suspendue par décret, pour une durée qui ne peut excéder dix ans, si cette obligation ne répond plus aux objectifs de la programmation pluriannuelle des investissements. / [...] ".
6. Aux termes de l'article 1er du décret du 9 décembre 2010 suspendant l'obligation d'achat de l'électricité produite par certaines installations utilisant l'énergie radiative du soleil : " L'obligation de conclure un contrat d'achat de l'électricité produite par les installations mentionnées au 3° de l'article 2 du décret du 6 décembre 2000 susvisé est suspendue pour une durée de trois mois courant à compter de l'entrée en vigueur du présent décret. Aucune nouvelle demande ne peut être déposée durant la période de suspension ". Aux termes de l'article 3 du même décret : " Les dispositions de l'article 1er ne s'appliquent pas aux installations de production d'électricité issue de l'énergie radiative du soleil dont le producteur a notifié au gestionnaire de réseau, avant le 2 décembre 2010, son acceptation de la proposition technique et financière de raccordement au réseau ". L'article 4 précise, toutefois, que " le bénéfice de l'obligation d'achat au titre de l'article 3 est subordonné à la mise en service de l'installation dans un délai de dix-huit mois à compter de la notification de l'acceptation de la proposition technique et financière de raccordement au réseau ou, lorsque cette notification est antérieure de plus de neuf mois à la date d'entrée en vigueur du présent décret, à la mise en service de l'installation dans les neuf mois suivant cette date. / Les délais mentionnés au premier alinéa sont prolongés lorsque la mise en service de l'installation est retardée du fait des délais nécessaires à la réalisation des travaux de raccordement et à condition que l'installation ait été achevée dans les délais prévus au premier alinéa. La mise en service de l'installation doit, dans tous les cas, intervenir au plus tard deux mois après la fin des travaux de raccordement. / La date de mise en service de l'installation correspond à la date de mise en service de son raccordement au réseau ". Aux termes de l'article 5 du même décret : " A l'issue de la période de suspension mentionnée à l'article 1er, les demandes suspendues devront faire l'objet d'une nouvelle demande complète de raccordement au réseau pour bénéficier d'un contrat d'obligation d'achat ".
7. En premier lieu, il ressort des pièces versées au dossier que si, à la date d'entrée en vigueur du décret du 9 décembre 2010, soit le 10 décembre suivant, la SARL Hamant Energie Solaire avait accepté la proposition de convention de raccordement au réseau faite par ERDF et l'avait signée, elle n'avait, en revanche, pas conclu de contrat d'achat d'électricité avec la société EDF. Si le raccordement constitue un préalable technique nécessaire à la délivrance de l'électricité produite à la société EDF, il n'en résulte, cependant, pas que le contrat de raccordement soit l'accessoire du contrat d'achat d'électricité (TC, 8 juillet 2013, Société d'exploitation des énergies renouvelables photovoltaïques, n°3906). Dans ces conditions, la SARL Hamant Energie Solaire ne peut utilement invoquer la réserve du " maintien des contrats en cours " prévue au quatorzième alinéa de l'article 10 de la loi précitée du 10 février 2000 et repris à l'article L. 314-6 du code de l'énergie laquelle ne vise que les contrats d'achat d'électricité effectivement conclus à la date de publication dudit décret. Par suite, la seule circonstance que la SARL Hamant Energie Solaire ait signé une convention de raccordement avec ERDF avant le 2 décembre 2010 ne pouvait l'exclure du dispositif du décret du 9 décembre 2010. Dans ces conditions, la SARL Hamant Energie Solaire ne peut, à l'appui du moyen tiré de l'illégalité dudit décret, soulevé par la voie de l'exception, soutenir qu'il aurait porté atteinte à une situation contractuelle constituée et méconnu le principe de non-rétroactivité.
8. En deuxième lieu, la circonstance qu'aucune proposition technique et financière n'ait été adressée puis acceptée par la SARL Hamant Energie Solaire avant le 2 décembre 2010, laquelle avait signé la proposition de convention de raccordement faite par ERDF, n'a pas pour effet de l'exclure du champ d'application du décret du 9 décembre 2010. D'une part, la proposition technique et financière n'a d'autre objet que de fixer les conditions techniques et administratives du raccordement qui ont vocation à se retrouver au sein de la convention de raccordement au réseau. D'autre part, le décret du 9 décembre 2010 a vocation à s'appliquer aux demandeurs n'ayant pas conclu de contrat d'achat d'électricité avec la société EDF. Par suite, la seule acceptation de la proposition de convention de raccordement au réseau par la SARL Hamant Energie Solaire, en tant qu'elle n'avait d'effet qu'à l'égard de ERDF et ne pouvait faire l'objet d'aucune suspension sur le fondement de l'article 3 du décret du 9 décembre 2010, ne pouvait faire échec à l'application dudit décret dans les relations de la société requérante avec la société EDF. Dans ces conditions, et ainsi que l'a jugé le tribunal administratif au point n° 6 du jugement attaqué, les producteurs dont le projet se trouvait dans un état réputé plus avancé que ceux qui avaient simplement notifié au gestionnaire de réseau leur acceptation d'une proposition technique et financière devaient nécessairement, au regard du principe de sécurité juridique, être assimilés à ces derniers, pour l'application des dispositions transitoires du décret.
9. En troisième lieu, si, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif au point n° 7 du jugement attaqué, les producteurs d'électricité peuvent, à bon droit, se prévaloir des dispositions transitoires de l'article 3 du décret du 9 décembre 2010, ceux-ci sont nécessairement soumis aux dispositions de son article 4, lesquelles en sont indissociables, et, par suite, aux conditions de délais de mise en service ou d'achèvement de leur installation définies par cet article. La SARL Hamant Energie Solaire entend invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité dudit décret et, notamment, de son article 4 en tant que les principes de confiance légitime et de sécurité juridique auraient été méconnus.
10. D'une part, et contrairement à ce que soutient la SARL Hamant Energie Solaire, l'adoption du décret du 9 décembre 2010 dont l'objet a été de redéfinir les conditions d'achat de l'électricité issue de l'énergie radiative du soleil ainsi que de préciser les effets limités dans le temps de la mesure de suspension n'a pas méconnu le principe de confiance légitime dès lors qu'un opérateur économique prudent et avisé, au regard duquel doit s'apprécier la mise en oeuvre du principe de confiance légitime, n'était pas dans une situation telle qu'il n'aurait pas été mis en mesure de prévoir la suspension provisoire de l'obligation d'achat et la remise en cause des tarifs applicables aux installations pour lesquelles un contrat d'achat d'électricité n'avait pas encore été conclu. La SARL Hamant Energie Solaire ne peut utilement exciper au regard de la mise en oeuvre du principe de confiance légitime qu'elle est profane en la matière, et que c'est à cette aune qu'aurait dû être appréciée, la concernant, le respect par le décret du 9 décembre 2010 du principe de confiance légitime. Par suite, et sans qu'il soit besoin de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne, dont les lignes générales de la jurisprudence en matière de confiance légitime sont établies, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de confiance légitime ne peut qu'être écarté.
11. D'autre part, et contrairement à ce que soutient la SARL Hamant Energie Solaire, l'adoption du décret du 9 décembre 2010 n'a pas méconnu le principe de sécurité juridique au regard de l'intérêt général qui s'attachait à redéfinir les conditions d'achat de l'électricité issue de l'énergie radiative du soleil et des effets limités dans le temps de la mesure de suspension prononcée dès lors que le pouvoir réglementaire a laissé aux producteurs d'électricité, qui n'avaient pas encore conclu de contrat d'achat d'électricité avec la société EDF, des délais raisonnables pour leur permettre de mettre en service ou au moins d'achever leur installation. En mentionnant dans leur jugement la référence de l'arrêt du Conseil d'Etat (CE, 16 novembre 2011, n° 344972 Société Ciel et terre et autres) qui a rejeté des requêtes qui tendaient à l'annulation pour excès de pouvoir du décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010, les premiers juges n'ont pas entendu se fonder sur l'autorité de la chose jugée par cet arrêt, laquelle autorité n'était que relative, ainsi que le soutient à juste titre la société requérante, mais seulement apporter une information sur l'état actuel de la jurisprudence du Conseil d'Etat en la matière.
12. Enfin, d'une part, il ressort des pièces du dossier que le délai de dix-huit mois prévu par l'article 4 du décret du 9 décembre 2010, lequel doit être décompté à partir de la date à laquelle le demandeur avait retourné signée à ERDF la proposition de convention de raccordement et non, comme le soutient la requérante, à compter de l'encaissement du chèque d'acompte ou de la réception de son règlement par ERDF, a commencé à courir, au plus tard le 15 novembre 2010, date de la réception par ERDF de la proposition de convention de raccordement. D'autre part, il est constant que l'installation photovoltaïque, objet de la demande, n'a été mise en service que le 5 juin 2012, soit postérieurement à l'expiration du délai de dix-huit mois susmentionné. Au demeurant, en se situant même à la date du 22 mai 2012 d'établissement du visa du Consuel, comme le voudrait la société requérante, cette date est postérieure à l'expiration du délai de 18 mois précité, laquelle est intervenue le 16 mai 2012. La SARL Hamant Energie Solaire n'apporte aucun élément de nature à établir qu'elle était susceptible de bénéficier de l'alinéa 2 de l'article 4 dudit décret compte tenu d'un prétendu retard de ERDF, ni, en tout état de cause, de nature à établir que les délais impartis auraient été trop brefs compte tenu de la date de publication du décret. Dans ces conditions, la SARL Hamant Energie Solaire n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que la société EDF lui a opposé la suspension de l'obligation d'achat d'électricité et a refusé de conclure un contrat d'achat d'électricité en vertu des conditions tarifaires fixées à l'arrêté du 10 juillet 2006.
13. En dernier lieu, si la SARL Hamant Energie Solaire prétend que la suspension de l'obligation d'achat d'électricité n'est pas justifiée par la circonstance qu'elle ne répond plus aux objectifs de la programmation pluriannuelle des investissements et que l'évaluation du dépassement des objectifs de cette programmation dépend nécessairement des situations juridiques constituées, telle la sienne, elle n'assortit pas son moyen des précisions suffisantes permettant à la Cour d'en apprécier le bien-fondé. Par suite, ce moyen ne pourra qu'être écarté.
14. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Hamant Energie Solaire n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. En conséquence, les conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par la SARL Hamant Energie Solaire doivent être rejetées. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les conclusions présentées par la S.A. " Electricité de France " sur le même fondement.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Hamant Energie Solaire est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la SA " Electricité de France " sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Hamant Energie Solaire et à la SA " Electricité de France ".
Délibéré après l'audience du 15 février 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. Luben, président assesseur,
- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 7 mars 2016.
Le rapporteur,
S. BONNEAU-MATHELOTLe président,
J. LAPOUZADE
Le greffier,
A. CLEMENTLa République mande et ordonne au ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14PA02325