Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 23 mai 2017, le PRÉFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de rejeter la demande de M. B....
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a estimé que les services de la préfecture n'ont pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M.B..., ce dernier n'ayant pas sollicité le réexamen de sa demande d'asile à l'occasion de son interpellation par les services de police ;
- l'arrêté contesté a été signé par une autorité qui avait reçu délégation à cet effet ;
- cet arrêté répond aux exigences de motivation ;
- le principe général du droit d'être entendu n'a pas été méconnu, M. B...ayant pu présenter ses observations au cours de la procédure à l'issue de laquelle l'arrêté contesté a été pris ;
- il n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de M.B....
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Soyez a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que, par un arrêté du 19 avril 2017, le PRÉFET DE LA
SEINE-SAINT-DENIS a obligé M. B..., ressortissant ivoirien, à quitter le territoire français sans délai et lui a assigné un pays de destination ; que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a annulé cette décision, par un jugement du
25 avril 2017, motif pris d'un défaut d'examen particulier de la situation personnelle de M. B... ; que le PRÉFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS relève appel de ce jugement ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande / (...) / Lorsque l'enregistrement de sa demande d'asile a été effectué, l'étranger se voit remettre une attestation de demande d'asile (...) / La délivrance de cette attestation (...) ne peut être refusée que dans les cas prévus aux 5° et 6° de l'article L. 743-2. / Cette attestation n'est pas délivrée à l'étranger qui demande l'asile à la frontière ou en rétention. " ; qu'aux termes de l'article L. 743-1 du même code : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent. " ; qu'aux termes de l'article L. 743-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : (...) / 5° L'étranger présente une nouvelle demande de réexamen après le rejet définitif d'une première demande de réexamen / (...) " ;
3. Considérant que ces dispositions ont pour effet d'obliger l'autorité de police à transmettre au préfet, et ce dernier à enregistrer, une demande d'admission au séjour lorsqu'un étranger, à l'occasion de son interpellation, formule une demande d'asile ; que, hors les cas visés tant à l'article L. 556-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile concernant l'hypothèse d'un ressortissant étranger placé en rétention, qu'aux 5° et 6° de l'article L. 743-2 du même code, le préfet saisi d'une demande d'asile est ainsi tenu de délivrer au demandeur l'attestation mentionnée à l'article L. 741-1 précité de ce code ; qu'il résulte, en outre, de ces dispositions que le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et, le cas échéant, de celle de la Cour nationale du droit d'asile ; que, par voie de conséquence, les dispositions précitées font obstacle à ce que le préfet fasse usage des pouvoirs que lui confère le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en matière d'éloignement des étrangers en situation irrégulière tant que l'étranger, demandeur d'asile, bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français ;
4. Considérant que M.B..., dont la demande d'asile avait été rejetée par décision du 2 novembre 2016 de la Cour nationale du droit d'asile, a été interpellé par les services de police le 19 avril 2017 ; qu'il ressort du procès-verbal dressé le même jour à 15h39, qu'il a expressément sollicité l'asile en France ; que, par suite, il doit être regardé comme ayant demandé, dès son interpellation, et avant l'édiction de la mesure d'éloignement litigieuse, le réexamen de sa demande d'asile ; qu'il ne résulte pas des mentions de l'arrêté en litige, notifié le 19 avril 2017 à 19h46, que le PRÉFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS se soit prononcé sur cette demande conformément aux dispositions et stipulations précitées ; que, dans ces conditions, le PRÉFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ne pouvait légalement édicter à l'encontre de M. B... une obligation de quitter le territoire français, non plus qu'une décision lui refusant un délai de départ volontaire et lui assignant un pays de retour, sans que l'administration se soit préalablement prononcée sur la demande d'admission provisoire au séjour en qualité de demandeur d'asile de l'intimé ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PRÉFET DE LA
SEINE-SAINT-DENIS n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté susvisé du 19 avril 2017, et lui a enjoint de procéder au réexamen de la situation de M. B... ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête du PRÉFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est rejetée.
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N° 17VE01588