Résumé de la décision
Dans l'affaire opposant la société Daoudal et Boué à la veuve de l'ouvrier X..., la Cour d'appel d'Orléans a reconnu l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur suite à un accident mortel par électrocution survenu le 27 février 1961. L'ouvrier, sous les ordres de son chef d'équipe Y..., a manœuvré un échafaudage métallique qui a heurté une ligne électrique à haute tension. Bien que l'employeur ait donné des consignes de sécurité, la Cour a estimé que le chef d'équipe, conscient du danger, avait agi de manière irresponsable, engageant ainsi la responsabilité de l'employeur.
Arguments pertinents
1. Responsabilité de l'employeur : La Cour a établi que l'employeur ne pouvait pas se décharger de sa responsabilité en invoquant l'absence de faute personnelle, car la faute inexcusable était attribuée au chef d'équipe Y..., qui avait donné l'ordre de manœuvre malgré la connaissance du danger. La Cour a souligné que "X..., placé en état de subordination, ne pouvait se dispenser d'y participer".
2. Confiance envers le supérieur hiérarchique : La décision insiste sur le fait que l'ouvrier avait le droit de faire confiance à son supérieur hiérarchique. La Cour a noté que "rien ne pouvant lui permettre de penser que Y... [...] ordonnerait une approche périlleuse de l'échafaudage métallique".
3. Connaissance du risque : La Cour a également mis en avant que le chef d'équipe était pleinement conscient du risque que représentait la ligne électrique, ce qui constitue un élément clé de la faute inexcusable.
Interprétations et citations légales
La décision s'appuie sur les principes de la responsabilité de l'employeur en matière de sécurité au travail, notamment en vertu du Code du travail et des règles de la faute inexcusable.
- Code du travail - Article L. 4121-1 : Cet article impose à l'employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs. La Cour a interprété cet article comme une obligation de vigilance accrue, surtout lorsque des risques évidents sont présents.
- Code civil - Article 1382 : Cet article établit la responsabilité délictuelle, stipulant que "tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer". La Cour a appliqué cet article pour conclure que la faute du chef d'équipe engageait la responsabilité de l'employeur, car il avait délégué une autorité à un individu conscient du danger.
En conclusion, la décision de la Cour d'appel d'Orléans a été fondée sur une analyse rigoureuse de la responsabilité de l'employeur face à la faute inexcusable de son représentant, mettant en lumière l'importance de la sécurité au travail et la confiance que les employés doivent pouvoir accorder à leurs supérieurs.