Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 12 février 2018, 11 juillet 2018 et 18 octobre 2018, la société DSC, représentée par Me A...et MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1600533 du 14 décembre 2017 du tribunal administratif de Bordeaux ;
2°) de prononcer la décharge des rappels en litige au titre de l'année 2010 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société DSC soutient que :
- elle exerce une activité de commerce de gros qui n'entre pas dans le champ d'application de la taxe sur les surfaces commerciales ; le commerce de détail s'entend d'une activité qui effectue au moins la moitié de son chiffre d'affaires grâce à la vente à des consommateurs pour un usage domestique (BOI-TFP-TSC n° 60).
- à titre subsidiaire, elle exerce une activité de vente exclusive de meubles meublants et de matériaux de construction et bénéficie de l'application de la réduction de 30 % du taux de la taxe ; elle se prévaut de la doctrine référencée BOI-TFP-TSC n° 410 ;
- à titre infiniment subsidiaire, si elle ne soutient plus que la condition d'exclusivité imposée par le décret n° 95-85 du 26 janvier 1995 méconnaît l'habilitation confiée par le législateur, en revanche elle affirme que cette condition méconnaît les principes constitutionnels d'égalité devant la loi et devant les charges publiques ;
Par des mémoires en défense, enregistrés les 16 mai 2018 et le 25 mars 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la société DSC ne sont pas fondés.
Vu les pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code civil ;
- la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 ;
- le décret n° 95-85 du 26 janvier 1995 ;
- le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, les présidents des cours administratives d'appel, les premiers vice-présidents des cours et les présidents des formations de jugement des cours peuvent, par ordonnance, rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, " les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement ".
2. La société DSC exerce une activité de vente de matériels dans les domaines des sanitaires, du chauffage, de la plomberie et de la climatisation. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale a estimé que la société avait appliqué à tort la réduction de 30 % prévue par le A de l'article 3 du décret du 26 janvier 1995. En conséquence, le service a notifié à la société DSC des rappels de taxe sur les surfaces commerciales au titre des années 2010, 2011 et 2012 à raison de ses établissements exploités à Bordeaux et Villeneuve-sur-Lot. La société a demandé au tribunal administratif de Bordeaux prononcer la décharge de ces rappels. Elle relève appel du jugement du tribunal du 7 février 2017 qui a rejeté sa demande mais seulement en tant que le tribunal n'y a pas fait droit en ce qui concerne les rappels de l'année 2010.
3. Aux termes de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 applicable au présent litige : " Il est institué une taxe sur les surfaces commerciales assise sur la surface de vente des magasins de commerce de détail, dès lors qu'elle dépasse 400 mètres carrés des établissements ouverts à partir du 1er janvier 1960 quelle que soit la forme juridique de l'entreprise qui les exploite. / (...) Pour les établissements dont le chiffre d'affaires au mètre carré est inférieur à 3 000 euros, le taux de cette taxe est de 5, 74 euros au mètre carré de surface définie au troisième alinéa. Pour les établissements dont le chiffre d'affaires au mètre carré est supérieur à 12 000 euros, le taux est fixé à 34, 12 euros (...) Lorsque le chiffre d'affaires au mètre carré est compris entre 3 000 et 12 000 euros, le taux de la taxe est déterminé par la formule suivante (...). / Un décret prévoira, par rapport aux taux ci-dessus, des réductions pour les professions dont l'exercice requiert des superficies de vente anormalement élevées (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 26 janvier 1995 : " Pour l'application de la loi du 13 juillet 1972 susvisée, l'établissement s'entend de l'unité locale où s'exerce tout ou partie de l'activité d'une entreprise. (...)/ Lorsqu'un établissement réalise à la fois des ventes au détail de marchandises en l'état et une autre activité, le chiffre d'affaires à prendre en considération au titre de la taxe sur les surfaces commerciales est celui des ventes au détail en l'état, dès lors que les deux activités font l'objet de comptes distincts ". Aux termes du A de l'article 3 de ce décret, dans sa version alors applicable : " La réduction de taux prévue au dix-septième alinéa de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 susvisée en faveur des professions dont l'exercice requiert des superficies de vente anormalement élevées est fixée à 30 p. 100 en ce qui concerne la vente exclusive des marchandises énumérées ci-après : - meubles meublants ; - véhicules automobiles ; - machinismes agricoles - matériaux de construction (...) ". Aux termes de l'article 534 du code civil : " Les mots " meubles meublants " ne comprennent que les meubles destinés à l'usage et à l'ornement des appartements, comme tapisseries, lits, sièges, glaces, pendules, tables, porcelaines et autres objets de cette nature. / Les tableaux et les statues qui font partie du meuble d'un appartement y sont aussi compris, mais non les collections de tableaux qui peuvent être dans les galeries ou pièces particulières. / Il en est de même des porcelaines : celles seulement qui font partie de la décoration d'un appartement sont comprises sous la dénomination de " meubles meublants ".
4. En premier lieu, il résulte de ces dispositions que les surfaces commerciales des activités de commerce de détail réalisées dans des établissements pratiquant également le commerce en gros ou d'autres activités sont assujetties à la taxe sur les surfaces commerciales à concurrence du chiffre d'affaires relatif à la surface de commerce de détail. Le chiffre d'affaires à prendre en compte pour le calcul de la taxe est alors celui réalisé par les surfaces de ventes au détail en l'état, sans qu'il y ait lieu de distinguer selon que l'acheteur est un particulier ou un professionnel. Il s'en déduit que les ventes au détail en l'état à des professionnels, tant pour leurs besoins propres que lorsqu'ils incorporent les produits qu'ils ont ainsi achetés dans les produits qu'ils vendent ou les prestations qu'ils fournissent, doivent être prises en compte pour la détermination du chiffre d'affaires par mètre carré, sauf s'il est établi que ces ventes sont réalisées avec des grossistes ou des intermédiaires. Or, la société requérante ne justifie pas du montant de ses ventes à des professionnels dans un but autre que la revente au détail en l'état, c'est-à-dire à des grossistes ou à des intermédiaires. Ainsi, le moyen tiré de ce qu'elle n'était pas assujettie à la taxe sur les surfaces commerciales au titre de l'année 2010 doit être écarté. La société ne peut utilement se prévaloir de la modification ultérieure des dispositions de la loi du 13 juillet 1972 qui ne sauraient être regardées comme ayant la portée d'une interprétation rétroactive de la législation applicable au litige, ni non plus de l'instruction 6 F-1-12 du 9 mars 2012 reprise au BOI-TFP-TSC -20150506, postérieure à l'imposition en litige .
5. La société DSC soutient qu'elle peut prétendre à une réduction du taux de la taxe de 30 % en application du A de l'article 3 du décret du 26 janvier 1995 précité pour ses établissements. A l'appui de son moyen, elle fournit des tableaux indiquant la proportion que représentent les ventes de ces produits par rapport au montant total des ventes. Dans ces tableaux, la société fait figurer les appareils, équipements et accessoires de sanitaires, de chauffage, de production d'eau chaude de climatisation, ainsi que la robinetterie et le mobilier de sanitaires. Ces tableaux reprennent ainsi, en des termes généraux, des gammes de produits qui ne sont pas destinés à l'usage et à l'ornement des appartements et dont la nature s'apparente davantage, pour la plupart d'entre eux, à des immeubles par destination qu'à des meubles meublants. En outre, elle ne produit aucun élément faisant état de la vente, à titre principal ou exclusif, de matériaux de construction. Il en résulte que pour les établissements en litige, la condition tenant à la nature du commerce exercé ouvrant droit au taux réduit de la taxe sur les surfaces commerciales ne peut manifestement pas être considéré comme remplie. La société ne peut dès lors prétendre au bénéfice de ce taux réduit au titre de ses établissements, ni sur le terrain de la loi fiscale, ni sur celui de la doctrine qu'elle invoque qui est postérieure à l'imposition en litige ainsi qu'il vient d'être dit et qui, en tout état de cause, ne contient aucune interprétation différente de la loi fiscale ni d'un rescrit ° 2012/34 du 15 mai 2012 qui a trait aux ventes d'accessoires ou de pièces détachées d'automobiles.
6. La société requérante soutient que les dispositions précitées du décret du 26 janvier 1995, en posant une condition selon laquelle seule la vente à titre exclusif de certaines marchandises peut permettre aux professions nécessitant des surfaces anormalement élevées de bénéficier d'une réduction de 30 % du taux de la taxe portent atteinte aux principes constitutionnels d'égalité devant les charges publiques et méconnaît ainsi les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Toutefois, ainsi que la société l'admet d'ailleurs puisqu'elle a abandonné ce moyen, en ayant édicté les dispositions contestées, y compris en ayant fixé la condition d'exclusivité, le pouvoir réglementaire n'a pas excédé les limites de l'habilitation conférée par le législateur et a seulement déterminé les professions dont l'activité requiert des surfaces anormalement élevées pouvant bénéficier de la réduction du taux de la TASCOM dont le principe même a été institué par l'article 3 de la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972. Ainsi, le moyen de la société requérante, qui revient à contester la constitutionnalité de ces dispositions législatives au regard des principes constitutionnels d'égalité devant la loi et d'égalité devant les charges publiques, garantis par l'article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958 et par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, ne peut pas être utilement invoqué en dehors de la procédure prévue à l'article 61-1 de la Constitution. Et, à défaut d'avoir été présenté par mémoire distinct, il est irrecevable.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la requête est manifestement dépourvue de fondement et peut dès lors être rejetée selon la procédure prévue par l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par la société sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administratives doivent être rejetées.
ORDONNE :
Article 1er : La requête de la société Distribution Sanitaire Chauffage est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Distribution Sanitaire Chauffage et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction des vérifications nationales et internationales.
Fait à Bordeaux le 14 juin 2019
Le président de chambre
Philippe Pouzoulet.
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 18BX00599