II. Mme D... H... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 5 décembre 2018 par lequel le préfet du Gers a refusé son admission au séjour à quelque titre que ce soit, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et l'a astreinte à se présenter une fois par semaine au commissariat de police d'Auch, et d'enjoindre au préfet du Gers, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à venir ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans le même délai.
Par un jugement n° 1802890 du 13 février 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a rejeté cette demande.
III. M. A... H... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 5 décembre 2018 par lequel le préfet du Gers a refusé son admission au séjour à quelque titre que ce soit, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et l'a astreint à se présenter une fois par semaine au commissariat de police d'Auch, et d'enjoindre au préfet du Gers, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à venir ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans le même délai.
Par un jugement n° 1802887 du 13 février 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée le 24 juin 2019 sous le n° 19BX02466, M. B... H..., représenté par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau du 13 février 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Gers du 5 décembre 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Gers de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans le même délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement est entaché d'un défaut de réponse à un moyen ;
La décision portant refus d'admission au séjour :
- est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- n'a pas été précédée d'un examen réel et sérieux de sa situation ;
- méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
La décision portant obligation de quitter le territoire français :
- est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- est privée de base légale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- est entachée d'une erreur de droit dès lors que les dispositions du 6° du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile faisaient obstacle à ce qu'il fasse l'objet d'une mesure d'éloignement, la décision de la Cour nationale du droit d'asile du 24 octobre 2018 ne lui ayant pas été régulièrement notifiée et n'étant pas devenue définitive ;
- méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
La décision fixant le pays de destination :
- est insuffisamment motivée ;
- est privée de base légale ;
La décision d'astreinte à se présenter aux services de police :
- est insuffisamment motivée ;
- est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
M. H... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 mai 2019.
II. Par une requête enregistrée le 24 juin 2019 sous le n° 19BX02467, Mme D... G... épouse H..., représentée par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau du 13 février 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 5 décembre 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Gers de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans le même délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soulève les mêmes moyens que ceux invoqués dans la requête n° 19BX02466.
Mme H... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 mai 2019.
III. Par une requête enregistrée le 24 juin 2019 sous le n° 19BX02468, M. A... H..., représenté par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau du 13 février 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Gers du 5 décembre 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Gers de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans le même délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soulève les mêmes moyens que ceux invoqués dans la requête n° 19BX02466.
M. H... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 mai 2019.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. C... E... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... H... et Mme D... H... ainsi que leurs deux enfants Ardit et Armela, de nationalité albanaise, sont entrés en France, selon leurs déclarations, le 12 janvier 2018, accompagnés de la mère de M. H..., I... H..., également de nationalité albanaise. Le même jour, M. et Mme H... et leur fils Ardit ont déposé chacun une demande d'asile. Leurs demandes ont été rejetées par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 31 mai 2018, confirmées par des décisions de la Cour nationale du droit d'asile du 24 octobre 2018. Le 22 novembre 2018, M. et Mme H... et leur fils ont sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou, subsidiairement, sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du même code. Par trois arrêtés du 5 décembre 2018, le préfet du Gers a refusé de faire droit à leurs demandes, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et les a astreints à se présenter une fois par semaine au commissariat de police d'Auch. Sous les n° 19BX02466, 19BX02467, 19BX02468 M. et Mme H... et leur fils relèvent respectivement appel des jugements n° 1802891, 1802890 et 1802887 du 13 février 2019 par lesquels le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces trois arrêtés du 5 décembre 2018.
2. Les requêtes n° 19BX02466, 19BX02467 et 19BX02468 présentées pour M. B... H..., Mme D... H... et M. A... H... présentent à juger des questions semblables et sont relatives à la situation d'une même famille. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur les conclusions en annulation :
3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment du certificat médical établi le 16 novembre 2018 par un médecin oncologue du centre hospitalier d'Auch, que Mme I... H... y a été prise en charge à compter du 14 mai 2018 dans le cadre d'une affection grave et de longue durée pour le traitement de laquelle elle subit une chimiothérapie et qui a motivé la délivrance par le préfet d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ressort également des pièces du dossier que Mme I... H... a, de ce fait, besoin d'aide pour tous les actes de la vie quotidienne, notamment les déplacements, et qu'elle ne parle pas le français. Enfin, il résulte de l'attestation établie le 16 novembre 2018 par la directrice de l'association Réseau expérimental gersois d'aide et de réinsertion, grâce à laquelle la famille est hébergée, que Mme I... H... a toujours été prise en charge par sa famille et n'est pas autonome sans elle. Ces éléments ne sont pas sérieusement contredits par le préfet, qui se borne à soutenir sur ce point qu'il n'est pas justifié que Mme I... H... ne bénéficierait pas " d'un accompagnement médico-social de droit commun en relation avec son état de santé ". Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu de la gravité de l'affection en cause et de son caractère invalidant, de la nécessité de la présence permanente d'une tierce personne au côté de Mme I... H..., de l'âge de cette dernière, soit 72 ans, et de son incapacité à s'exprimer en français qu'une assistance adaptée à ses besoins pourrait lui être procurée par une personne extérieure. Dans ces conditions, la présence aux côtés de Mme I... H... d'un membre de sa famille doit être regardée comme indispensable.
4. En deuxième lieu, l'attribution d'un titre de séjour ou d'une autorisation provisoire de séjour à M. ou Mme H... ou à leur fils en qualité d'accompagnant d'étranger malade aurait nécessairement pour effet d'entraîner soit une séparation du couple, et celle d'un des parents de ses enfants, dont l'une était mineure à la date des décisions attaquées, soit une séparation du fils de M. et Mme H... de ses parents et de sa soeur, alors qu'il est lui-même tout jeune majeur, qu'il serait ainsi isolé en France et qu'il ne pourrait, sauf à interrompre sa scolarisation, apporter à sa grand-mère les soins qu'elle nécessite. Par ailleurs, le préfet ne conteste pas que le père de M. B... H... est décédé en 2005 et que la famille ne conserve pas d'attache dans son pays d'origine.
5. Dès lors, dans les circonstances très particulières de l'espèce, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des requêtes, M. B... H..., Mme D... H... et M. A... H... sont fondés à soutenir que les décisions portant refus de titre de séjour qui leur ont été opposées sont entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur leur situation personnelle et familiale. Par voie de conséquence, l'illégalité des décisions portant refus de séjour prive de base légale les décisions portant obligation de quitter le territoire français, fixant le pays de destination et astreignant les intéressés à se présenter aux services de police.
6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens tirés de la régularité des jugements attaqués, que M. B... H..., Mme D... H... et M. A... H... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par ces jugements, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a rejeté leurs demandes.
Sur les conclusions en injonction :
7. Eu égard à ses motifs, le présent arrêt n'implique pas nécessairement la délivrance d'un titre de séjour aux intéressés mais implique seulement le réexamen de leurs demandes au regard de l'état de santé de Mme I... H.... Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Gers de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les frais liés au litige :
8. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, qui est la partie perdante dans les instances introduites par M. B... H..., Mme D... H... et M. A... H..., une somme globale de 1 500 euros pour l'ensemble des instances, à verser à Me F... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette dernière renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
DECIDE :
Article 1er : Les jugements n° 1802891, 1802890 et 1802887 du 13 février 2019 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau sont annulés.
Article 2 : Les arrêtés du préfet du Gers du 5 décembre 2018 pris à l'encontre de M. B... H..., de Mme D... H... et de M. A... H... sont annulés.
Article 3 : Il est enjoint au préfet du Gers de réexaminer les demandes de M. B... H..., de Mme D... H... et de M. A... H... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera, pour l'ensemble des instances n° 19BX02466, 19BX02467 et 19BX02468, une somme globale de 1 500 euros à Me F... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette dernière renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... H..., à Mme D... H..., à M. A... H..., à Me F... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Gers.
Délibéré après l'audience du 21 novembre 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, président,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
M. C... E..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 décembre 2019.
Le rapporteur,
David E...Le président,
Marianne Hardy
Le greffier,
Sophie Lecarpentier
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 19BX02466,19BX02467,19BX02468